Des Russes et des hélicoptères à Kerguelen - Ratmanoff -Jury Dolgoruky - 1963
Jury Dolgoruky a régné en tant que Velikiy Kniaz (Grand Prince ) de Kiev de septembre 1149 à avril 1151 puis à nouveau de mars 1155 à mai 1157. Il serait à l'origine de la création de Moscou.
les manchots ont semblent-ils fini par accepter les hélicoptères...
Une plage de sable noir, des milliers de manchots, des éléphants de mer et une cabane rouge orangé... La cabane du guetteur et juste derrière une carcasse de ferraille rouillé, un moteur...
J'ai retrouvé dans un vieux numéro de libération cette histoire que je vous fais partager.
Les Manchots de la République par Yann Libessart
"Avant le départ, Aimé contemple les vols en piqué des grands albatros hurleurs installés près du cadavre calciné d’un hélicoptère échoué là depuis des lustres. Cette carcasse permet au vétéran de ressortir inlassablement son indémodable vanne étymologique qui prétend que c’est en annonçant avec un accent slave très prononcé qu’il avait raté sa manœuvre d’atterrissage («Raté manov’») que le pilote moscovite donna son nom à la plage."Ratmanoff photo JM Bergougniou |
L’inconvénient de cette légende savoureuse est qu’elle a fait disparaître la vérité. S’il est bien établi que Ratmanoff était en fait un géomètre embarqué en 1931 sur l’Austral, le vapeur de la société Pêches Australes qui exploitait la concession des Kerguelen aux temps prospères et éléphanticides de l’industrie phoquière, j’ai dû en revanche m’immerger dans mes colossales archives pour retrouver la trace du crash.
Mon premier réflexe fut d’accréditer l’origine russe de l’engin, version la plus plausible en raison d’une coopération scientifique dans les années 1970 entre le CNES et son équivalent soviétique, le Conseil Intercosmos de l’Académie des Sciences d’URSS, pour l’étude et l’exploration de l’espace à des fins pacifiques. Entre 1971 et 1980, de nombreuses fusées furent lancées dans l’atmosphère depuis le pas de tir installé à quelques kilomètres de Port-aux-Français et des apparatchiks séjournèrent à maintes reprises sur le district. Il était alors naturel d’imaginer qu’ils en aient profité pour aller survoler la côte jusqu’à être victimes d’un banal accident. Je dénichais un premier indice dans le rapport d’activité du disker de la 21e mission mentionnant succinctement la destruction d’un hélicoptère décollant de Port-aux-Français pour les Monts du Château le 16 janvier 1971.
Mais cette piste s’avéra vite être une impasse car il s’agissait vraisemblablement d’une Alouette française de l’Armée de l’air mise à disposition des scientifiques pendant la campagne d’été et les circonstances ne correspondaient en rien à la localisation actuelle de l’épave.
Parmi la tonne de paperasses jaunies, un autre compte-rendu d’incident attira alors mon attention.
Un navire océanographique sud-africain, le Protea, qui était venu découvrir l’archipel et accompagner une cordée d’alpinistes décidés à en découdre avec le Mont Ross, disposait d’un hélico. Pour tuer le temps pendant l’ascension de leurs compatriotes, une partie de l’équipage décida d’aller admirer le site mythique où le Dr Ferreira, leur médecin de bord, fut mortellement happé par le rotor arrière de l’appareil. C’était le 4 mars 1975 et l’expédition endeuillée fut écourtée pour retourner au plus vite vers son port d’attache Simonstown, station balnéaire ironiquement connue pour sa colonie de manchots du cap (Spheniscus demersus) que j’ai d’ailleurs photographiée en 2004. J’extrapolais donc logiquement que le drame avait aussi endommagé le volatile métallique qui avait été abandonné sur place. CQFD.
Afin de classer l’affaire avec la confirmation d’un témoin, je contactais Claude, le chef scientifique de la 25e mission en 1975, qui à mon grand dam ruina ma théorie en m’assurant que l’hélicoptère était également reparti vers l’Afrique du sud, tout en m’indiquant de remonter encore dans le temps pour découvrir la clé du mystère.
la cabane du guetteur Ratmanoff
photo JM Bergougniou
Grâce à ses bons tuyaux, je pus enfin conclure mon enquête. Sur un vieux document dactylographié à demi effacé, le chef de district de la 13e mission relatait le mouillage dans la Passe Royale d’une flotte baleinière soviétique composée d’un navire-usine de 20 000 tonnes, le Jury Dolgoruki, du ravitailleur le Neva et de plusieurs chasseurs.
Reste de l'hélicoptère russe du Jury Dolgoruky photo JM Bergougniou
Une courte phrase de mon prédécesseur mettait définitivement un terme à mes investigations poussiéreuses :
Navire usine Yuri Dolgoruky |
Passage de la ligne sur le Yuri Dolgoruky; on voit l'hélicoptère M1-1M en arrière plan |
Reste de l'hélicoptère russe du Jury Dolgoruky photo JM Bergougniou
type d'hélicoptère MI-1M armant le Yuri Dolgoruky |
Une courte phrase de mon prédécesseur mettait définitivement un terme à mes investigations poussiéreuses :
«Le 17 janvier 1963, au cours d’un vol au-dessus de la Péninsule Courbet, l’hélicoptère du Dolgoruki s’est écrasé au sol sans dommages pour le personnel et a été incendié sur ordre du commandant.» En pleine guerre froide, moins de trois mois après que la crise des missiles de Cuba eut failli déclenché la troisième guerre mondiale, pas question de laisser un spécimen de la technologie communiste derrière soi, serait-ce au bout du monde ! C’est bien connu, les manchots sont des impérialistes à la solde du grand capital, les bénéfices générés par la Marche de l’Empereur en attestent.
En tout cas, le pilote était bien russe et le doyen Henri avait encore raison. Il va finir par me faire douter pour Ratmanoff...
Restes de l'hélicoptère russe du Jury Dolgoruky photo JM Bergougniou
et en fouillant dans les sites russes du bateau j'ai trouvé ces photos d'une alouette II n° 22 à la cocarde française Si quelqu'un peut en dire plus? Elle semble être sur le pont du baleinier.
Sources :
http://kerguelen.blogs.liberation.fr/2008/03/24/cold-case-sur-l/
http://xn--80aafy5bs.xn--p1ai/aviamuseum/aviatsiya/sssr/vertolety/vertolety-kb-milya/mnogotselevoj-vertolet-mi-1/mnogotselevoj-vertolet-mi-1m/
http://forums.airbase.ru/2018/04/t56882_26--foto-kitoboev-sssr.html
En tout cas, le pilote était bien russe et le doyen Henri avait encore raison. Il va finir par me faire douter pour Ratmanoff...
Restes de l'hélicoptère russe du Jury Dolgoruky photo JM Bergougniou
et en fouillant dans les sites russes du bateau j'ai trouvé ces photos d'une alouette II n° 22 à la cocarde française Si quelqu'un peut en dire plus? Elle semble être sur le pont du baleinier.
Sources :
http://kerguelen.blogs.liberation.fr/2008/03/24/cold-case-sur-l/
http://xn--80aafy5bs.xn--p1ai/aviamuseum/aviatsiya/sssr/vertolety/vertolety-kb-milya/mnogotselevoj-vertolet-mi-1/mnogotselevoj-vertolet-mi-1m/
http://forums.airbase.ru/2018/04/t56882_26--foto-kitoboev-sssr.html