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23 novembre 2022

Sous-marin naufrage Prométhée 7 juillet 1932 Cap Lévi juillet 1932 Cherbourg

Un naufrage à Cherbourg juillet 1932 Sous-marin Prométhée

Le Prométhée était un sous-marin de 1500 tonnes capable de plonger jusqu'à 80 mètres. Il était équipé en surface de 2 moteurs diesels, d'une puissance totale de 6000 CV qui lui permettaient d'atteindre une vitesse de 18,6 nœuds et en plongée d'une propulsion électrique de 2 250 CV lui permettant de filer 10 nœuds. Il possédait un armement canon et 11 tubes lance-torpilles.

L'Ouest-Eclair 9 juillet 1932


Conçu par l'ingénieur Léon Roquebert, le sous-marin Prométhée fait partie d'une série de 31 sous-marins de type Redoutable entrés en service dans la Marine nationale progressivement, entre 1931 et 1937. L'appareil est commencé sur la cale n° 3 le 2 juillet 1928 et lancé le 23 octobre 1930. Ses premiers essais ont lieu le 1er décembre 1931. 

Lancement du Prométhée à Cherbourg


Le 7 juillet 1932, alors qu'il est en plein période d'essai, il fait naufrage au large du Cap Lévi à une distance de 7 nautiques. La catastrophe, qui provoque la disparition de 62 membres d'équipage, est attribuée selon le rapport des experts à une ouverture inopinée des purges qui permettent de remplir les ballasts d'eau, ayant eu pour effet d'alourdir subitement le sous-marin et de le faire plonger à la verticale. 
Le drame suscite dans le pays une profonde émotion. Un monument est érigé peu après par souscription à la mémoire des victimes dans la commune de Fermanville, le lieu le plus proche du naufrage.







Cherbourg, 8 juillet (de notre rédaction).


Cherbourg vit depuis jeudi après-midi les heures les plus pénibles de son histoire de ville maritime et de port de guerre enregistré. Ce n'est certes pas que cette histoire n'ait connu de trop nombreux sinistres, ce n'est pas qu'elle n'ait enregistré depuis l'invention de sous-marins de catastrophes mémorables comme celles du Pluviôse, du Vendémiaire, et, plus récemment, de l'Ondine. Mais les accidents qui, dans le passé, endeuillaient la Marine et la France étaient, par le nombre des victimes, moins terribles et moins affreuses. Jusqu'ici, les sous-marina coulés n'étaient montés que par leurs officiers et leurs hommes d'équipage. Aujourd'hui, parmi les 8O et quelques disparus, figurent à côté de l'équipage et du personnel de la maison Schneider, de trop nombreux ingénieurs, agents techniques et ouvriers de l'Arsenal,


c'est-à-dire des habitants de notre ville et de ses faubourgs. On peut dire que l'angoisse étreint tous les coeurs et que la foule attend avec une indicible émotion les moindres nouvelles, pour essayer de trouver quelques raisons d'espérer encore le renflouement du Prométhée et le sauvetage définitif de ceux qu'il retient dans ses flancs, au milieu des flots, par 75 mètres de fond.


L'Ouest-Eclair, qui prend part à la douloureuse inquiétude de tous ceux que frapperaient cette catastrophe, si aucun espoir n'était plus permis, veut encore, autant qu'il se peut, apporter aujourd'hui des paroles de confiance et faire des vœux pour que soit épargné aux familles et à la Marine française un deuil particulièrement atroce.



















UNE ENTREVUE AVEC LES RESCAPÉS

Cherbourg, 8 juillet. Le hasard qui porte un nom que la discrétion professionnelle ne nous permet pas de lui donner, nous a permis d'avoir une courte entrevue avec la plupart des rescapés. Voici sans phrases inutiles ce que ces braves gens nous ont raconté Le deuxième maitre Gouasguen qui se porte à merveille se trouvait vers midi sur le pont lorsqu'on l'appela à l'intérieur pour aller manger. 



Il descendit au carré mais par une chance providentielle Il ne trouva point de place et remonta sur le pont. Il commençait à rouler une cigarette lorsque aussitôt une voix, qui doit être celle du commandant. cria «Tout le monde en bas Fermez les panneaux ». Sur les vingt ou vingt-cinq, nous a dit M. Gouasguen, qui se trouvaient sur le pont, plusieurs descendirent aussitôt. D'autres, dont j'étais, restèrent et se mirent en devoir de fermer les panneaux à coups de pieds. Tous furent fermés, sauf un qui résista. D'ailleurs il était trop tard Dès ce moment le sous-marin s'enfonçait par l'arrière, où, comme nous disons en terme de métier, descendait en charrue. Je sautai à la baille comme les camarades. Je réussis à envoyer promener mes chaussures et à nager puis a attraper une bouée. Sur cette bouée et sur une autre plusieurs camarades s'étaient de leur côté agrippés.
Pendant ce temps, le commandant Couespel du Mesnil et l'enseigne Bienvenu nageaient vigoureusement et faisaient les efforts les plus méritoires et les plus dignes d'éloges pour porter secours à des hommes qui se noyaient. e Je me souviens surtout d'avoir vu l'enseigne de vaisseau Bienvenu porter secours à M Bouthier qui. frappé de congestion ne put se maintenir que quelques secondes et coula.

Les recherches
Le premier patron Prigent de son côté venait de manger et remontait sur le pont. n fut surpris par la soudainetè de l'événement et reste obstinément muet sur les raisons qui. selon lui, ont pu motiver la catastrophe. Le matelot Gattepallle, un grand gaillard qui hier semblait assez sérieusement atteint par son séjour à la mer, va maintenant fort bien. Il mangeait sa gamelle sur le pont lorsque retentit l'ordre du branlebas. Il se précipita lui aussi pour fermer les panneaux à coups de pieds et se trouva lancé à la mer avant d'avoir pu savoir exactement ce qui se passait. Le matelot Thérart, qui hier ne semblait pas se sentir de sa périlleuse aventure, faisait, hier après-midi, un peu de fièvre, mais son état ne présentait aucune inquiétude et nous n'avons pas insisté pour le fatiguer outre mesure.


Le quartier -maître Carpentier était de quart au moteur Diésel. Il venait de manger et au lieu de rentrer très vite à l'intérieur, il resta quelques secondes à prendre l'air sur le pont e DVllleurs. dit-il le navire marhait. avec ses moteurs électriques et ma présence en bas n'était pas absolument nécessaire. J'entendis l'ordre de branlebas et l'ordre prescrivant à tout le monde de descendre en bas et de fermer les panneaux. J'exécutai une partie de l'ordre comme mes camarades. mais je me trouvai tout de suite à la mer et vis le navire qui s'enfonçait par l'arrière

Le commandant Couespel du Mesnil dont tous les hommes s'accordent à vanter la belle tenue se montre, on le conçoit, extrêmement réservé. Tout d'abord il affirme n'avoir rien à ajouter à ce qu'il a dit primitivement, n se trouvait au fond du Prométhée lors- qu'un bruit qui lui paru anormal se fit entendre sur le pont
e
Bouée marquant l'épave
x
« Ma première pensée, dit-il, fut qu'un homme était tombé à la mer et je me précipitai pour procéder aux opérations de sauvetage. Lorsque j'arrivai sur le pont je vis tout de suite le danger et je commandai de fermer tous les panneaux. Je sais qu'à ce moment il y avait quinze à dix-sept hommes sur le pont, mais je ne saurais dire le nombre exact de ceux qui furent noyés



On a pu trouver étrange, dit le commandant, que je ne sois pas descendu dans le sous-marin. Je dois faire observer qu'à mon avis mon devoir était de rester sur le pont le dernier jusqu'à ce que la manœuvre commandée fût achevée et de descendre ensuite à l'Intérieur du Prométhée. Malheureusement la catastrophe s'est produite tellement vite que je n'ai pas eu le temps de mettre mon projet à exécution et que je me suis trouvé moi-même lancé à la mer. J'ai alors nagé pour porter secours à mes hommes et rallié une bouée où se trouvaient déjà Gattepaille et Prigent. »

Le matelot Lecarpentier, dont nous parlons plus haut, nous a répété à diverses reprises que la catastrophe s'était produite en un temps maximum de 30 à 40 secondes.

Nous n'avons pu rencontrer l'enseigne Bienvenu qui était allé le matin avec l'Ailette pour procéder aux travaux de recherches du sous-marin disparu, mais nous tenons à dire que tous les marins que nous avons rencontrés sont unanimes à vanter son courage intrépide et à faire de lui le plus vif éloge.






La manœuvre intempestive
La preuve est maintenant faite, de la manière la plus indiscutable, que la catastrophe du Prométhée, qui a causé la mort de 62 hommes et entraîné la perte d'un navire tout neuf, dont le pays pouvait avoir besoin, est due, suivant les paroles mêmes du commissaire-rapporteur à une manœuvre intempestive du robinet de sectionnement des vannes Morin » accomplie par erreur (tout à fait en dehors du commandant du Prométhée qui n'avait guère que la direction de la route du bâtiment) par un des disparus resté forcément inconnu et qui, dit encore le rapporteur, peu familiarisé avec la manœuvre, aura fermé par mégarde au lieu de la purge un sectionnement beaucoup plus apparent que celle-ci qui est placée près du parquet ».



Pdt Henriot Georges Leygues



cérémonie en l'honneur des victimes


Les recherches Jules Verne

Sources

L'Ouest-Eclair 


Gallica BnF

L'Illustration 23 juillet 1932 n° 4664


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