01 mars 2017

Marc Joseph Marion Dufresne Julien Crozet Nouvelle-Zélande Maori

Mort de Marion Dufresne dévoré par les Maoris en Nouvelle-Zélande




Natif d'une riche famille malouine, les Marion, alliée aux Magon, qui avaient de grands intérêts dans la Compagnie des Indes, il est le dernier des huit enfants de Julien Marion, seigneur du Fresne (1681-1739), armateur, corsaire et négociant, capitaine de l'expédition du marquis de Vibraye à la mer du sud (1711-1715), et de sa femme Marie Séraphique, née Le Fer de la Lande.

le cabinet du Maire de Saint-Malo conserve les plafonds de l'hôtel des Marion Dufresne qui ont connus une vie mouvementée...





Je vous propose aujourd'hui un texte trouvé dans Tahiti Infos sur ce navigateur et explorateur dévoré par les Maoris en Nouvelle-Zélande.





NOUVELLE-ZELANDE, le 29 décembre 2016. Histoire - 


12 juin 1772, côtes de la Nouvelle-Zélande : le navigateur français malouin Marc-Joseph Marion-Dufresne (47 ans), un autre officier de son expédition et onze hommes d'équipage se rendent à terre sans méfiance… Voilà plusieurs semaines que le navigateur sympathise avec les Maoris. Il est en confiance, loin de se douter qu’un comité d’accueil l’attend… 


Depuis le 4 mai, deux bateaux, le “Mascarin” (commandé par Dufresne) et le “Marquis de Castries” (commandant : Ambroise du Clesmeur, 22 ans) mouillent dans Bay of Islands où les hommes d'équipage se refont une santé et où les navires font l'objet de grosses réparations. 



Malgré la méfiance initiale des Maoris, tout se passe très bien entre les visiteurs et les indigènes, au point que ceux-ci leur indiquent même quels arbres, des kauris, ils peuvent abattre pour changer certains de leurs mâts. Ces arbres sont sacrés, mais ceux qui sont désignés ne sont pas frappés de "tapu". A terre, l'expédition française établit trois camps, l'un à Waipao (île de Moturoa) pour les malades et l'infirmerie, le second dans les terres, à trois kilomètres du rivage, pour couper des arbres et fabriquer des mâts et des vergues, et un troisième, simple relais sur la côte entre les deux premiers camps. 



Marion-Dufresne intronisé “chef maori”

L'entente est plus que cordiale entre les étrangers et les locaux, puisque les chroniques d'alors font état du fait que les chefs Maoris couchaient volontiers à bord des navires, tandis que Marion-Dufresne et ses officiers aimaient se reposer à terre. On travaillait ensemble, on s'amusait ensemble, on festoyait ensemble et tout le monde circulait dans la plus grande des libertés, sous le contrôle des chefs Tacouri (ou Takuri) et Pikiore. Le 8 juin, Takuri alla même jusqu'à introniser Marion-Dufresne au sein de sa tribu : une grande cérémonie maorie fut organisée, au terme de laquelle le navigateur français devint un membre à part entière de la tribu de Takuri ; il se vit alors, reconnaissance suprême, coiffé des quatre plumes blanches de chef. 

Si le commandant de l'expédition française vivait sur un petit nuage, ayant ici rencontré les bons sauvages décrits par Jean-Jacques Rousseau, les visiteurs ne voyaient pas que, malgré tout ces bons sentiments et même cette reconnaissance de Dufresne comme Maori à part (presque) entière, leur présence s'éternisait, alors que l'hiver battait son plein et que les ressources des clans s'amenuisaient.

Ils ne pouvaient pas non plus comprendre qu'une multitude de “tapu” régulait la vie des hommes et des femmes de la “Terre du long nuage blanc” (Aotearoa) et que marcher ici, pêcher là, rire ici, dormir là, pouvait, en réalité, être des gestes sacrilèges.

Querelles, frictions, humiliations…




Des tensions s'étaient fait jour comme la fois où des Français attachèrent un chef pour récupérer un mousquet. Dufresne rétablit l'ordre, mais l'humiliation avait été vécue et ressentie comme telle. L’officier Du Clesmeur, malgré son très jeune âge, avait gardé les pieds sur terre, et ne cessait de mettre son commandant en garde et de lui demander de lever les ancres.

De querelles, on en vint très vite à des faits plus graves, au point que même Dufresne l'utopiste fit arrêter un Maori. Pire, des Français, sans autorisation, utilisèrent une grande pirogue d'une quarantaine de mètres qu'ils jugèrent pratique pour leurs travaux. L'embarcation avait, sans doute, des usages précis (la guerre ou des cérémonies) et l'irrespect des Français suscita une telle colère que ces derniers ne purent utiliser le bateau que sous la menace de leurs mousquets. 



La période de grâce était terminée, les marins le comprirent, mais ils n'avaient pas été assez vite dans leurs travaux de réparation ; il leur manquait encore quelques arbres, et les camps, face aux menaces, durent être gardés et même fortifiés. De territoire ami, on était passé en territoire ennemi. 

Baie du Marin Crozet


Prévenu qu’il allait être tué

Malgré ces signes avant-coureurs d'un désastre, Marion-Dufresne continuait à se rendre à terre, ce qu'il fit le 12 juin avec un groupe de ses hommes pour chasser et pêcher. Il n'avait pas pris de gardes armés avec lui et personne ne s'inquiéta à bord de son absence au soir, puisque le commandant dormait souvent à terre dans l'un des camps. 



Prévenu avant de parvenir sur le rivage par un indigène que Takuri allait le tuer s'il posait le pied à terre, Dufresne balaya la menace et débarqua donc le 12 juin, confiant en sa bonne étoile et en son statut de chef maori. Il n'eut sans doute que le temps de comprendre qu'il était tombé dans une embuscade. Les Maoris étaient armés et leurs casse-tête firent merveille face à des hommes totalement surpris, qui furent soit enlevés et tués au village, soit massacrés sur place.

Le lendemain, d'autres marins débarquèrent pour faire du bois et de l'eau. Ils étaient onze à bord d'une chaloupe du “Marquis de Castries” et aucun ne revint ; plus exactement un homme parvint à s'échapper et à nager en direction des navires au mouillage ; repéré, il fut sauvé, gravement blessé à la cuisse, les autres étant sauvagement tués. Les explications du rescapé ouvrirent enfin les yeux des équipages et de leurs officiers. Marion Dufresne avait été tué, comme ceux de la chaloupe. 



Sauver les hommes encore à terre

Les jours suivant, pour les narguer, les Maoris exhibèrent leur butin : des armes et des vêtements ayant appartenu aux hommes des deux chaloupes, dont les vêtements de Marion-Dufresne et ses armes.

Il ne fut plus alors question que l'aller sauver les équipages encore à terre dans les camps, et donc très vulnérables face à une attaque possible de plusieurs centaines de Maoris. 





photo de la stèle (dr)


Un officier prit la tête d'une petite expédition ; ils dégagèrent Julien Crozet, coincé au camp des mâts et le même Crozet organisa le repli de cette colonne, qui se fit sans incident.

Malgré tout, lorsqu'ils embarquèrent pour regagner les navires, ils subirent une attaque massive des Maoris à laquelle ils répliquèrent avec leurs mousquets, tuant un certain nombre de leurs agresseurs. Profitant du répit provoqué par l'efficacité de leurs armes à feu, les Français repartirent immédiatement sur l'île pour évacuer le camp des malades. 




Vengeance : plus de 60 Maoris tués 



Le 14 juin, une opération commando fut montée contre un village fortifié, le “pa” de Pikiore. Le village fut rasé et brûlé, plus de 60 Maoris tués. Un autre groupe armé débarqua sans crier gare chez Takuri. Mais il n'y avait plus personne. Les marins se résolurent à brûler le village après l'avoir pillé et c'est là qu'ils firent l'atroce découverte des restes humains cuits et partiellement mangés. Takuri avait eu le temps de s'enfuir, mais pas de cacher les preuves du sort qu'il avait réservé à ses ennemis. D'ailleurs voulait-il les cacher, sachant que ce spectacle contribuerait à les effrayer et à les faire peut-être partir au plus vite ? C'est ce que les Français avaient de mieux à faire, mais ils étaient dans l'incapacité de mettre les voiles, les réparations sur les navires étant loin d'être terminées. Dès lors, s'engagea une course contre la montre, les Français travaillant nuit et jour à la préparation des deux bateaux et les Maoris les guettant pour les tuer.

photo de la plaque souvenir (DR)


Prise de possession de la France australe 




Finalement, Du Clesmeur, le commandant du “Marquis de Castries”, fit lever les ancres le 12 juillet 1772, soit un mois après le massacre du chef de l'expédition et un peu plus de deux mois après l'arrivée des navires à Bay of Islands. Moturoa fut rebaptisée (bien vainement et inutilement) “île de Marion”, une bouteille fut enterrée à terre pour prendre possession du pays baptisé “France australe” (là encore, de manière bien dérisoire) et les deux bateaux firent voile vers Guam sans plus perdre de temps, pour arriver dans le courant du second trimestre à l'île de La Réunion, avec 27 hommes perdus en Nouvelle-Zélande, dont le chef de l'expédition.

Cette mort tragique détourna durablement la France de la Nouvelle-Zélande, pays jugé dangereux et ne méritant pas de s’y établir, compte tenu de la cruauté et de la sauvagerie des Maoris…

Daniel Pardon

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