Navire-Hôpital Sainte-Jeanne-d'Arc et pêche à la Morue
Excellent coup de filet ce matin aux halles de Saint-Servan. Mon copain Pascal m'avait réservé un lot de courriers écrit entre les années 1914 et 1930.
et notamment des courriers de terre-neuvas. Saint-Malo et la région de Dinan ont fourni de nombreux marins et capitaines.
Certains deviendront armateurs, c'est le cas de Marie Ange Glâtre de Ploubalay.
Et dans ce lot quelques plis envoyé par des morutiers : "Juliette", "Léone" de Granville ou "Remy Chuinard"
et au verso le cachet du navire hôpital "Sainte-Jeanne-d'Arc" qui "soigne gratuitement les marins de toutes les nations" et "remet aux pêcheurs en mer toute correspondance qui leur est adressée"
L'assistance à la grande pêche, du milieu du XVIII° siècle jusqu'à nos jours, s'est faite sous différentes formes grâce à l'aide de fondations, de sociétés laïques ou religieuses, puis après le concordat (1903) avec la Marine Nationale. Souvent on les trouvait ensemble dans une action humanitaire commune, avec des spécificités propres à chacune d'elles et aux moyens de l'époque. La tâche était immense; les médecins et les infirmiers de la marine y ont vécu des années d'expérience en médecine navale
La Société des Œuvres de Mer a été créée en 1894 par le lieutenant de vaisseau Bernard Bailly. Elle a pris en charge la gestion d’une autre société d'assistance, la Société de Secours aux Familles des Marins français naufragés, fondée en 1879 par A.de Courcy, qui s'occupe plus particulièrement des orphelins des marins disparus en mer en les prenant en charge jusqu'à leur majorité.
L'histoire de la Société des OEuvres de Mer est intimement liée à l'épopée de la grande pêche, "Le grand métier «comme l'appelaient alors ceux qui le pratiquaient sur les Bancs de Terre-Neuve, d’Islande, de Saint Pierre et Miquelon et du Groenland. La Société a donné exemple à d'autres fondations qui oeuvraient alors pour la pêche côtière comme les Hospitaliers Bretons et l’œuvre du marin créée par J.de Thézac dans les ports français, d'où sont partis des milliers de pêcheurs : Boulogne, Fécamp, Le Havre, Paimpol, Saint-Malo, Saint-Brieuc, Bayonne, etc.
Les lettres sont remises à la Sainte Jeanne d'Arc non timbrées. Elles sont déposées au bureau de Poste de Saint Pierre et Miquelon qui appose le cachet T dans un triangle pour absence d'affranchissement. La lettre est taxée 50 cts (double du manque d'affranchissement) à l'arrivée au bureau de Ploubalay puis remise au destinataire avec cachet d'arrivée au verso.
TAD arrivée Ploubalay 1921 le reste est illisible le courrier est daté du 9 mai |
Aussi le lieutenant de vaisseau Bernard Bailly, aidé par ses frères assomptionnistes, le RP Emmanuel Bailly et le RP Vincent de Paul Bailly, créa une société reconnue d'utilité publique en 1894, ayant pour but "de porter les secours matériels, médicaux, moraux et religieux aux navires français et des autres nationalités et plus spécialement à ceux qui pratiquent la Grande Pêche, en armant des navires-hôpitaux (article 2 de l’ancien statut de la Société des OEuvres de Mer). La Société installa une maison à Saint Pierre dénommée "Maison de Famille" tenue par les assomptionnistes (Révérend Père Hamon) et un hôpital tenu par des religieuses. Le succès fut immense, les marins venant chercher soins et réconfort, mais aussi une aide à l'écriture publique pour leur courrier.
le timbre à date de Saint-Pierre est mal frappé et peu encré…
Tampon du navire hôpital et TAD d'arrivée à Ploubalay 30/08/1921 |
LA SAINTE-JEHANNE fut lancée le 2 mars 1914 aux Ateliers et Chantiers de Bretagne à Nantes. Elle fit une campagne avant la guerre puis réquisitionnée, elle fut transformée en patrouilleur armé et elle coula un U-boot par abordage le 30 mars 1915 (U.17).Ce fait de guerre a été remis en cause plus tard, le sous marin étant rentré à son port d’attache.
Elle reprit du service en 1920 puis fut refondue en 1924-1925 et rebaptisée SAINTE JEANNE D'ARC avec à bord des appareils modernes de TSF permettant aux pêcheurs d'envoyer la lettre OCEAN (télégramme de 4,75F le mot).
Elle fait 16 campagnes de pêche de 1914 à 1933 avec à son bord toujours un médecin et un aumônier, elle embarque également le délégué aux missions pour la pèche et de 1920 à 1925, celui-ci était le célèbre capitaine au long cours Raymond Rallier du Baty
En 1921, l'activité reprend, mais elle n'emploie plus que 10 morutiers en 1925, 8 en 1926 aux mains de la famille Chuinard et la société des pêcheries de France (la Suzanne, la Léone, la Raymonde, la Thérésa, la Magicienne…), même si Granville demeure parmi les 10 premiers ports morutiers, que dominent Saint-Malo et Fécamp, et troisième flottille à voile.
Les navires grossissent, avec un tonnage minimum de 218, contre une jauge moyenne de 156 tonneaux en 1900, une longueur de bâtiments de 30 à 50 mètres, une voilure de 400m²,
la TSF généralisée dès 1919. Mais ils vieillissent, 10 ans d'âge en moyenne en 1926.