03 février 2021

Force navale détachée au Maroc 1907 - 1908 Tanger

Force     navale    détachée   a u Maroc    1907 - 1908    Tanger


Harry Aubrey de Vere Maclean. 

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La situation intérieure du Maroc en 1907 était on ne peut plus embarrassée. Un sultan jeune, sans préjugés, accueillant pour les étrangers, mais sans énergie et laissé volontairement, par l'ancien premier ministre Ba-Ahmed, dans l'ignorance du gouvernement, abandonné depuis la mort de sa mère Lalla Requia aux conseils intéressés de El-Menebhi et du « caïd » Mac Léan, voyait ses Etats, gagnés par l'anarchie, lui échapper peu à peu. 

Ici, un roghi, Bou-Hamara (l'homme à l'ânesse) soulevait les tribus de l'est et, abusant de sa ressemblance avec Moulay-Mohammed, s'intitulait prétendant au trône (1902). Ce même Moulav-Mohammed, qu'une intrigue avait essayé d'établir sultan, avait dû être mis en détention. Dans le Riff, un « roi des montagnes », le bandit Raissouli, bravant les mahallas chérifiennes, exerçait ses brigandages.



Dans le sud, enfin, le vice-roi Moulay-Hafid, frère aîné d'Abd-el-Aziz, s'insurgeait, au nom de l'Islam, contre le sultan légitime et contre les infidèles. Enfin, un peu partout, suivant l'exemple des tribus montagnardes, le pays, soumis autrefois à Moulay-Hassan, se déclarait « bled siba » (pays de révolte). La Chaouïa, refusant toute autorité chérifienne, se faisait remarquer par sa haine de l'Européen.



Pour lutter contre tant d'ennemis, Abd-el-Aziz n'avait ni compétence, ni argent, ni armée bien organisée, ni généraux capables. Obligé d'appeler à son aide les nations européennes avides de se partager ses dépouilles, il avait perdu son prestige religieux auprès de populations fanatiques et xénophobes, et, tant par ses emprunts que par la signature de l'Acte d'Algésiras, il était forcé de subir la tutelle de l'étranger.

Le 30 juillet 1907, les ouvriers qui extrayaient la pierre aux carrières de Sidi-Bel-Yout pour la construction du port de Casablanca étaient occupés à leur travail. Un train Decauville y faisait, comme d'ordinaire, les transports de matériaux de la carrière aux chantiers Schneider, sur le quai, lorsqu'une bande d'indigènes, la plupart armés de bâtons, arrêta la locomotive, la renversa, cerna les travailleurs, dont dix furent massacrés. Après avoir mutilé les cadavres et tenté de les brûler, les meurtriers (on apprit plus tard qu'ils appartenaient aux tribus Médiouna, Harriz et Mdakra) pillèrent les chantiers et essayèrent de détruire les machines. Entrant en ville, ils dévalisèrent les boutiques, menaçant de mort Chrétiens et Israélites.


Terrorisée, la population de Casablanca se réfugia en grande partie dans les consulats de France, d'Angleterre et d'Espagne. Les hommes se préparèrent à combattre. Vers huit heures du soir, le gérant du consulat de France, ayant obtenu du maghzen une escorte de soldats, beaucoup de femmes et d'enfants furent conduits sur le quai, au milieu d'une populace menaçante, et embarqués sur le vapeur anglais Dérhétrian. Un navire allemand recueillait les Israélites.



La nouvelle des massacres de Casablanca, de l'exode des habitants menacés, fut connue à Tanger le 31 juillet, apportée par le vapeur Mogador. Au nombre des morts, il y avait : 5 Français, 3 Italiens et 2 Espagnols. L'émotion fut grande en Europe ; la France et l'Espagne décidèrent d'intervenir immédiatement. L'Italie s'en remettait aux mesures prises par ces deux puissances.


En France, sur décision du conseil des ministres en date du 1er août, les vaisseaux le Galilée, qui était à Tanger, le Forbin, qui croisait aux Açores, reçoivent ordre de partir pour Casablanca. 
De Toulon devaient suivre, en deux échelons : 1° les croiseurs Condé et Du Chayla ; 2° les croiseurs Jeanne-d'Arc, Gloire, Gueydon. 

Ordre était donné aux transports Nive, Schamrok, Mytho d'entrer en armement, et aux "divisions d'Alger et d'Oran de se tenir prêtes à fournir des troupes. Le conseil de cabinet du 3 août fixait ces dernières à : 3 bataillons d'infanterie, 1 batterie d'artillerie, 1 escadron et demi de cavalerie, 1 compagnie du génie, 1 détachement du service de santé et des services administratifs. Soit un effectif de 2.500 hommes et 300 chevaux ; le commandement de ces forces était confié au général Drude, bien qualifié par une longue pratique des guerres coloniales.

En Espagne, les croiseurs Infante-Isabelle et Don Alrar de Bazan étaient envoyés à Casablanca. Le Maria-Molina entrait en armement. Des troupes de terre se tenaient prêtes à s'embarquer.


Les Européens (au nombre de 700 avant les événements de Casablanca) sont fixés à la ville : ils y sont négociants, fonctionnaires, représentants de maisons de commerce ou de compagnies de navigation, artisans.

 


Dès le jeune âge, habitué à chasser et à combattre, le Marocain du littoral a abandonné l'antique « noukhala » à pierre ou à piston. L'Europe lui a amplement fourni les armes de gros et de petit calibre, à chargement arrière et à tir rapide. Tous modèles sont représentés ici : Winchester, Remington, Martini-Henri, Mauser et Gras, carabines ou fusils, avec ou sans baïonnette, voire des Lebel, toutes armes provenant du commerce, de la désertion ou de ventes par les domaines de matériel réformé.


Indépendamment des munitions qui lui sont fournies par des négociants sans scrupules, durant même les opérations militaires, le Marocain, à court de munitions, avec patience et habileté, fera de la poudre, fondra des balles, remandrinera des douilles de cuivre, le
s réamorcera, ressoudera des étuis ramassés sur le champ de bataille



CASABLANCA

Une population de 25.000 âmes (avant les troubles) se répartit très inégalement dans trois quartiers : 1° le quartier demi-européen, appelé Medina, renfermant les consulats, la douane, le dar-maghzen, les établissements de banque, le négoce européen ; 2° le Mellah (ailleurs ghetto), ou quartier juif, aux ruelles tortueuses, peuplé de 5.000 habitants ; il a ici la particularité de n'être pas séparé des autres parties de la ville ; 3° le Tnakker, quartier arabe, aux sordides recoins.
Le port de Casablanca, à l'époque des événements, n'était qu'une rade foraine, ouverte à tous les vents du nord et de l'est, mal protégée vers l'ouest, côté des orages, par une avancée rocheuse. Un petit wharf permettait le déchargement des barcasses qui font le va-et-vient de la terre aux vaisseaux, mouillés suivant leur tirant d'eau, à 1 ou 2 milles au large d'une côte irrégulière comme fond et hérissée d'écueils en deçà de la barre. Par gros temps, les navires sont obligés de prendre le large.

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