Les Recettes de Tante Jeanne
extrait de la Jeanne lettre n° 15
juillet 2016
En juin de cette année, la visite de l’école de santé navale de Rochefort n’a pas laissé Tante Jeanne insensible.
Le tourniquet compresseur, la lancette et la palette à saignée, la scie à amputation et le thermocautère, le trépan et les ventouses, la clysopompe, tous ces instruments vont influencer pour longtemps son art de la cuisine…
L’Edit royal de Marly du 18 mars 1707 voulait empêcher que des personnes sans titre et sans capacité ne continuent d’exercer la médecine sans y apporter souvent d’autres dispositions que l’art criminel d’abuser de la crédulité des peuples… »
Ecole de santé navale photo JM Bergougniou |
En ces temps lointains, tel le docteur Doxey dans Lucky Luke, au milieu des arracheurs de dents et des saltimbanques, les guérisseurs ambulants, les bateleurs et les saltimbanques abusaient de la naïveté des foules en vendant des drogues prétendues miraculeuses.
(texte en vieux français)
« Pour ceux qui craignent la paralysie, on préconise comme très utile la graisse de loir et de souris bouillis, les mille-pattes en boisson comme nous l’avons indiqueì pour l’angine ; pour les phtisiques, un leìzard vert bouilli dans trois setiers de vins reìduits aÌ un cyathe et dont on prend une seule cuillereìe par jour, jusqu’aÌ complet rétablissement ; la cendre d’escargot prise dans du vin. »Nul ne sait si Pierre Loti (capitaine de Vaisseau et non Pierre Loto capitaine de vessie), né à Rochefort, en partant sur les traces de son frère médecin de marine, ne recherchait pas un paradis artificiel… dans les décoctions médicinales comme la recette de l’antidotaire de Nicolas (1610).
« L’opium est la base de cet électuaire; mais on y fait entrer d’autres médicaments pour augmenter son action, et comme ces médicaments sont de mauvaise qualité, on en ajoute d’autres pour les corriger. Ce n’est pas tout encore : on entasse une quantité énorme de drogues, dont les unes sont chargées de diriger l’action de ce médicament vers la tête; les autres vers la poitrine, d’autres vers le coeur, l’estomac, la rate, le foie, les reins et plusieurs autres parties... Ainsi la vertu rafraîchissante et narcotique de l’opium est augmentée par la jusquiame et l’écorce de mandragore, tandis que la qualité nuisible de ces dernières est corrigée par la myrrhe, l‘euphorbe, le castor et les anacardes; leur action est déterminée vers le cerveau par le moyen des clous de girofle, de la sauge, de la pivoine, du bois d’aloès et de l’encens; ils pénètrent dans la poitrine et dans les poumons, par le moyen du soufre, du thym, du pouillot et de la gomme adragante. Enfin, ils vont au coeur par l’addition des perles, du blatta byzantia (opercule d’une coquille appelée unguis odoratus), de l’or, de l’argent, de l’os du coeur de cerf et de l’ivoire; à l’estomac par le mastic… »
Et pour Loti et ses amis, de quoi s’en rouler une, de participer costumés aux agapes, de rouler en pousse-pousse dans les rues ou parader en chevalier du moyen-âge ou en mandarin sous les yeux ébahis ou effarés des Rochefortais (1).
Jeu de mot laid photo JM Bergougniou |
Tante-Jeanne et ses adeptes en congrès (heureusement entourés par deux sorciers) sont aujourd’hui plus sages, se contentant, telle cette jeune stagiaire dans une maison de retraite, de récupérer dans une même bassine l’ensemble des dentiers des pensionnaires et se demandant le lendemain comment restituer à chacun son bien (3) ou encore de s’esbaudir de la forme phallique d’un baba au rhum ceint de ses deux boules de glace et cela au mépris de joueurs en culotte courte suisses ou français bataillant pour un même ballon (4).
Pierre Loti en tenue de sortie photo JM Bergougniou |
(1) Ce passsage est une allusion aux excentricités de Pierre Loti qui, comme beaucoup de ses confères marins, usaient de produits euphorisants. Pierre organisait des fêtes mémorables à Rochefort, obligeant ses invités à venir en train costumés. Sur place, des pousse-pousses les attendaient à la gare pour les conduire chez Loti où il étaient reçus dans une pièce de détente aux fumées bénéfiques...
Dans la marine, les infirmiers sont surnommés : les sorciers.
Cela fait suite à une histoire vraie, racontée à table par Rosine alors infirmière dans une maison de retraite. Une jeune stagiaire reçut la consigne de retirer le dentiers des pensionnaires avant le coucher et de les mettre dans l’eau ( les dentiers pas les pensionnaires). C’est ce qu’elle fit consciencieusement en mettant tous les dentiers dans la même bassine remplie d’eau. Le lendemain matin il y eut un certain malaise quand il fallut retrouver les dentiers de chaque pensionnaire.
Ecole de santé navale photo JM Bergougniou |
Jean-Michel Bergougniou
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Dessins (c) Alain Carpier
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