29 mars 2017

Le Redoutable il y a cinquante ans, le général de Gaulle procédait à son lancement 29 mars 1967 sous-marin Cherbourg arsenal

Le SNLE Le Redoutable 

29 mars 1967

Long de 128 m, l’engin représentait alors une innovation majeure dans la Marine nationale : propulsé à l’énergie nucléaire, il pouvait accueillir seize missiles à tête nucléaire, de quoi détruire plusieurs villes. Dans un contexte de guerre froide, l’objectif était de dissuader l’URSS d’attaquer la France en cas de conflit.

29-3-1967 Cherbourg et 25-oct-1969 TAD illustré Cherbourg signature du commandant Louzeau
Le sous-marin nucléaire lanceur d'engins (SNLE) Le Redoutable est le premier sous-marin de ce type que construisit la France, son numéro de coque est Q252, son indicatif visuel est S611.


photo (c) JM Bergougniou

Le premier sous-marin français destiné à être nucléaire reçut le numéro de construction Q244. Sa construction fut commencée à la fin des années 1950 puis abandonnée, le réacteur à uranium naturel-eau lourde ne pouvant tenir dans la coque pour une puissance suffisante. Les morceaux fabriqués furent néanmoins assemblés pour devenir le sous-marin Gymnote, sous-marin à propulsion classique mais équipé de 4 tubes lance missiles. Il fut toute sa carrière le sous-marin d'essais pour la qualification des systèmes de lancement des missiles stratégiques.


Entretien avec Raymond POUR LES 45 ANS DE LA FOST

Raymond était Premier Maître atomicien au sein de l’équipage rouge du Redoutable, [l’équipage qui a effectué la deuxième patrouille, du 3 mai au 28 juin 1972.



- Quel était votre état d’esprit au moment d’embarquer pour la première patrouille du Redoutable ? Aviez-vous conscience d’accomplir quelque chose d’exceptionnel ?



à la Cité de la mer photo (c) JM Bergougniou

Bien sûr j'avais, ainsi que mes camarades, le sentiment de démarrer quelque chose d'exceptionnel qui était en fait l'acte de naissance de la FOST, pour laquelle nous travaillions depuis déjà deux ans. Tous, nous étions tendus vers la réussite de cette première patrouille pour laquelle évidemment il y avait zéro retour d’expérience.



photo (c) JM Bergougniou


coursives photo (c) JM Bergougniou



Cependant j'étais un peu inquiet… Non pas que je n'aie pas confiance en notre sous-marin et notre équipage mais c'était plus personnel : je me demandais comment j'allais me comporter dans cet univers clos pendant les deux mois que duraient les patrouilles à cette époque.




l'accès au sas photo (c) JM Bergougniou


- Quelle était votre mission à bord ? Comment s’est passée la patrouille ?

En tant que premier maitre atomicien, j'étais responsable du fonctionnement de tout le matériel électrique de la tranche A, le compartiment machine. Cela allait des deux turboalternateurs de 2MW, au moteur électrique de propulsion de secours, en passant par de nombreux moteurs électriques des différentes servitudes et j'en passe... Tout a bien fonctionné : homme et matériel.



l'accès au sas photo (c) JM Bergougniou

Le 2 mars 1963, la décision de construire le premier SNLE français est signée, il se nomme le projet Q-252 (no de coque).

La construction de ce nouveau type de matériel débute fin 1964 à Cherbourg. Il s'agit de créer un sous-marin de plus de 9 000 tonnes, équipé d'un système de propulsion nucléaire et capable en outre de tirer des missiles à têtes nucléaires.




table à cartes photo (c) JM Bergougniou
- Qu’est-ce qui a changé entre cette première patrouille et celles qui se déroulent actuellement ?

Il faut préciser qu'en 1972 nous sommes dans la période dite de "guerre froide" et l'ennemi potentiel est parfaitement identifié. Ensuite ma dernière patrouille remonte à 1988 et j’ai constaté que les progrès technologiques ont permis une amélioration constante des SNLE. Cela a modifié la vie à bord et la manière de travailler sans changer pour autant les fondamentaux du métier de sous-marinier : l’exigence, l’esprit d’équipage, etc.



les barres photo (c) JM Bergougniou
Le 29 mars 1967, il est lancé à Cherbourg en présence du général de Gaulle et avec comme commandants les capitaines de frégate Louzeau et Bisson, commandant chacun l'un des deux équipages.

Le 25 septembre 1970, il est transféré de son quai provisoire situé dans l'arsenal de Brest à la nouvelle base de l'Île longue.
poste de veille photo (c) JM Bergougniou

périscope photo (c) JM Bergougniou
carré officier photo (c) JM Bergougniou





Le 1er décembre 1971, il est admis au service actif au sein de la Force océanique stratégique (FOST) sous le commandement de l'amiral Louzeau. À son admission au service actif, il est équipé de 16 missiles mer-sol balistiques M1 (450 kt sur 2 000 km), puis M2 à partir de 1974, puis de missiles M20 comportant chacun une tête nucléaire d'une mégatonne et d'une portée supérieure à 3 000 km.

Le sous-marin et son armement ont coûté 90 milliards de francs les quinze premières années, équivalant à 90 milliards d'euros d'aujourd'hui, en tenant compte de l'inflation1.




carré officiers photo (c) JM Bergougniou



Deux équipages de 135 hommes chacun (120 hommes et 15 officiers), les « Bleus » et les « Rouges » se relayaient pour que le navire soit opérationnel en tout temps. Sur les 6 SNLE, quatre devaient toujours se trouver en mer, dont trois en position de tir.





vaisselle photo (c) JM Bergougniou


Le 29 mai 1971, le premier tir Onagre d'un missile stratégique M1E a eu lieu à partir du Redoutable en plongée. Ce SNLE appareille pour sa première patrouille le 28 janvier 1972, celles-ci duraient de 55 jours au début à 75 jours de mer à la fin de sa carrière. Comme tous les autres SNLE, il fut durant toute sa carrière, intégré à la Force océanique stratégique de la Marine nationale française et basé à l'Île Longue, dans la rade de Brest. À la différence des cinq autres sous-marins de la série, il n'a pas bénéficié de la refonte M4.



table à carte photo (c) JM Bergougniou


vaisselier photo (c) JM Bergougniou
En 20 ans de service, il a effectué 51 patrouilles, 3 469 journées en mer, et 83 500 heures de plongée (soit 11 ans à la mer dont 10 en plongée). Le Redoutable a été retiré du service actif le 13 décembre 1991 et condamné le 24 juillet 1992. Avant son retrait du service actif et après enlèvement des missiles balistiques, il effectua une escale avec relève d'équipage à Dakar en avril 1991 soutenu par le TCD Orage (opération Jubarte, pour tester grandeur nature une relève d'équipage loin des bases). Ce fut la seule escale en terre africaine de l'histoire des SNLE français.



la cafétéria photo (c) JM Bergougniou

les cuisines photo (c) JM Bergougniou

l'hélice photo (c) JM Bergougniou

le lancement du Redoutable 


http://archives.ecpad.fr/le-rendez-vous-de-liroise/


http://archives.ecpad.fr/magazine-des-armees-674/


Vannes Photo (c) JM Bergougniou

Notre président Claude Arata en a fait parti 


Claude Arata VA (2S) photo (c) JM Bergougniou
les barres de plongée photo (c) JM Bergougniou




Service au rang d’officier subalterne : 

Ecole navale (septembre 1955)



 – Ecole des élèves ingénieurs mécaniciens (octobre 1957) – G.A.S.M. sur le Béarn (février 1958) – croiseur-école Jeanne d’Arc (octobre 1958) 




– Ecole d’application (octobre 1958) 




– chargé de la propulsion sur l’escorteur d’escadre Kersaint (août 1959)



 – Groupe des écoles de détection à Porquerolles (octobre 1960) 



croiseur anti-aérien De Grasse (mai 1961) – chargé de la propulsion sur l’escorteur d’escadre Tartu (février 1962) – stagiaire à l’E.A.M.E.A (octobre 1962) – 


ingénieur-adjoint du sous-marin Narval (janvier 1964) 



– chef du groupement machine-électricité du sous-marin Doris (octobre 1964) 



– Groupe des sous- marins à Cherbourg (janvier 1966) – ingénieur-adjoint chargé de suivre l’armement du Redoutable (août 1966) 






– commandant du Centre Marine Cadarache à l’Ecole de navigation sous-marine (septembre 1970).




photo (c) JM Bergougniou

Service au rang d’officier supérieur : 

C.G.E. du Terrible (juillet 1972) 



– chef du Bureau « nucléaire-énergie-propulsion » de la Division « stratégique » à l’état- major de la FOST à Houilles (janvier 1975)



 – adjoint « énergie » à la Section « emploi » du Bureau « officiers » de la D.P.M.M. (juin 1977) – sous-chef d’état- major d’ALINDIEN (septembre 1980) – adjoint à l’inspecteur du matériel naval (septembre 1981) 



– commandant de la base de l’Ile Longue (juillet 1984) – chef du Bureau « entretien de la Flotte » à la Division « logistique » de l’E.M.M. (juin 1986).


photo (c) JM Bergougniou

Service au rang d’officier général: 

Commandant de l’arrondissement maritime de Lorient (août 1988) 



– sous-chef d’état-major «logistique» (novembre 1990) – inspecteur des forces maritimes (novembre 1992) – placé en deuxième section (17 août 1994).


le coin de quart de CA photo (c) JM Bergougniou



photo (c) JM Bergougniou


photo (c) JM Bergougniou


photo (c) JM Bergougniou


photo (c) JM Bergougniou


Coursives photo (c) JM Bergougniou



photo (c) JM Bergougniou 


coursives photo (c) JM Bergougniou 


photo (c) JM Bergougniou 


photo (c) JM Bergougniou 


nuit photo (c) JM Bergougniou 


poste de conduite photo (c) JM Bergougniou 


photo (c) JM Bergougniou 


photo (c) JM Bergougniou 


Table à carte photo (c) JM Bergougniou 


banette photo (c) JM Bergougniou 


lavabo photo (c) JM Bergougniou 


coin cuisine photo (c) JM Bergougniou 




carré officiers photo (c) JM Bergougniou




24 mars 2017

Le Grand Anacréon 1830 Bayonne Bordeaux naufrage sauvetage

Le Grand Anacréon 1830 Bayonne Bordeaux



Bonjour à tous,

En feuilletant une revue Sauvetage de 1998, j’ai découvert un récit de l’amiral DAMBIER concernant la fin d’un paquebot de 283 tonneaux qui fait le service Bordeaux Vera-Cruz en décembre 1830 : le Grand Anacréon. Il est commandé par Martin Jorly qui fut corsaire dans sa jeunesse. Il fait un compte rendu du drame au lendemain du naufrage.

A la semaine prochaine

Donec



« L’an mille huit cent trente et le huit décembre à huit heures du soir par devant nous Philippe BAUDOIN adjoint au maire de la commune de Vendays, canton de Lesparre, délégué par celui-ci pour remplir les fonctions. Attendu son absence, c’est présenté le Sieur Martin JORLIS capitaine commandant le navire trois mats Grand Anacréon […] Il nous relate les faits suivants :


Le Grand Anacréon appareille le cinq courant à deux heures et demie de la relevée, de la rivière de Bordeaux avec le vent de la partie sud, fraiche brise, faisant route le cap à l’Ouest ; A huit heures parvenu à la distance d’à peu près vingt lieues de la tour de Cordouan les vents sautèrent à l’Ouest ventant tourmente ; nous fumes obligés de serrer toutes les voiles à l’exception de la misaine et du grand hunier deux ris pris, cinglant bâbord amure. A dix heures, les vents redoublant par grainasse, contraints de serrer la misaine, craignant d’accoster le danger de Rochebonne, nous fumes forcés de prendre les amures à tribord et de tenir la cape sur le grand hunier deux ris pris et le petit foc. A sept heures du matin, le six, faisant route près de terre et le temps continuant toujours, ils ont changés les amures à bâbord et amurés la misaine gouvernant au plus près du vent pour essayer de s’élever de la côte. A dix lieues, ils ont bordé le petit hunier tous les ris pris ; le bâtiment fatiguait extraordinairement, chaque coup de mer le couvrait. Il faisait beaucoup d’eau, 18 à 80 pouces par heure ; on pompait d’heure en heure ; Le temps était très couvert et sans vue ; nous ne pûmes nous décider à nous approcher plus près de la terre (pour cette dernière détermination le conseil avait été réuni). Il existait déjà des avaries au beaupré : les haubans, les barbejeans, les poulaines avaient été coupés brisés et enlevés par la mer. 



La journée et la nuit du six au sept se sont écoulées en courant tantôt sur un bord, tantôt sur l’autre ; serrant et bordant le petit hunier tous les ris pris selon la force du vent. A huit heures du matin du sept, le conseil de nouveau réuni, on prit la détermination de chercher les Pertuis ou la rivière de Bordeaux, mais le temps toujours couvert et sans vue empêcha de prendre hauteur. A quatre heures de la relevée se trouvant sur les brisant des Dangers de Cordouan, nous avons jugé être les Anes. Nous avons reçu trois coups de mer qui nous ont capelés par le travers. Le moment a été considéré comme la dernière heure de l’équipage. Après avoir doublé ce mauvais pas, on borda le petit hunier, tendant toujours les amures à bâbord. Le temps se couvrait de plus en plus et offrait un horizon très près du navire. La mer déferlait constamment à bord. L’équipage était harassé de fatigue et sans cesse mouillé. A huit heures nous nous aperçûmes que nous recevions par le travers de coup de mer du haut fond de la Côte d’Arcachon. Le conseil s’assembla alors pour la troisième fois et après avoir fait le résumé général du voyage on a reconnu qu’on se trouvait à la distance de sept milles de la côte. Désespérant de vaincre les obstacles qui s’opposaient à ce qu’on gagna le large, jaloux de conserver l’existence de l’équipage et des passagers on dut faire un choix de la côte sur laquelle le danger serait le moindre pour s’échouer. 



Une côte plate aurait laissé le navire à une distance trop considérable de la terre pour qu’on put espérer de sauver tout le monde. Une côte rapide présentait plus de chances de salut par la raison que près de terre il y avait plus d’eau : le navire calant onze pieds passés ce dernier moyen fut employé. La situation du navire était alors celle-ci : il était en face de Carcans, selon les calculs pris à peu près à cinq ou six lieues des Olivers dans le sud, on jugea qu’en laissant arriver la côte serait favorable. On calcula la marée ; on crut convenable d’arriver à terre au moment où il y aurait une heure et demie de jusan ; la pleine mer était à neuf heures. Cette heure était déjà proche car depuis le moment où le conseil était rassemblé jusqu’à celui de sa détermination, il s’était écoulé trois quarts d’heure. On se prépara ; on allégea le navire en défonçant les pièces à eau qui se trouvaient sur le pont et en débarrassant tout ce qui pouvait engager. On tint cette même situation du navire, ayant toujours le même temps jusqu’à dix heures et un quart, c’est l’instant qu’on choisit. On laissa arriver plat vent arrière en présentant le cap à terre et tout le monde se prépara. Le navire a bientôt échoué. Le ciel a voulu que les calculs du conseil se soient réalisés. Il était bien près de la terre sur une côte assez rapide. Aussitôt le maître d’équipage a été envoyé une ligne de loc à laquelle on avait attaché une cage à poules. Il s’est précipité à la mer, il a gagné la terre et le reste de l’équipage l’a bientôt suivit. La ligne de loc ainsi établie en un va et vient a servi à sauver les passagers ; le plus grand ordre a heureusement régné et à une heure et demie du matin tout le monde était à terre. Le capitaine n’a quitté son navire qu’au dernier moment. Il est à remarquer qu’un passager, Mr Dalwig resta à bord ne pouvant se décider à braver les dangers que présentait la côte. On parvint cependant à l’y décider et on le sauva vers les trois heures de la relevée. Le même jour à huit heures du matin un préposé des douanes à cheval se présenta sur la côte. Le capitaine le pria de prévenir les autorités locales de l’évènement arrivé… 

le Martin Jorlis SNSM Bayonne  photo Michel Floch

Le 8 décembre 1830 en fin d’après midi Martin JORLY va parcourir les huit kilomètres qui séparent la côte du village de Vanday. Dans le vent et la pluie de la tempête à laquelle il venait d’échapper probablement exténué par les trois derniers jours de mer. Il va mettre trois heures pour parvenir à destination.

A huit heures du soir il relate avec précision la dernière navigation du Grand Anacréon et l’ensemble des manœuvres qu’il a fait approuver par le conseil puis qu’il a conduites pour tenter d’abord d’échapper, au mauvais temps, pour essayer ensuite de rallier un havre abrité, enfin pour échouer son navire afin de sauver les vies humaines qu’il avait en charge.

Le 9 décembre à 9 heures du soir, il décède sans doute de désarroi moral et d’épuisement physique après avoir sauvé de la mort ses dix sept passagers et son équipage. Il avait 55 ans ».


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Passage de Toulon à Alger 1839 sur un navire de la Marine Royale Cerbere

 Passage maritime de Toulon à Alger 1839 Cerbere  La conquête de l'Algérie débute par le débarquement de l'armée d'Afrique à Sid...