BSAOM CHAMPLAIN EUROPA Îles Eparses TAAF avril 2021
Grâce à ses façades océaniques et à ses territoires ultra-marins répartis sur tous les océans, la France est, par essence, une grande nation maritime. La convention de Montego Bay, entrée en vigueur en 1994, a consacré ce fait en lui reconnaissant la zone économique exclusive (ZEE) la plus étendue au monde, après celle des États-Unis.
La France a-t-elle la volonté d’exploiter le potentiel de sa puissance maritime ? Tel ne semble pas avoir été le choix des gouvernements depuis une période de trente ans durant laquelle les crédits alloués à la Marine ont tendanciellement baissé. L’amiral Pierre Vandier, chef d’état-major de la Marine, a coutume de parler pour cette période de « grande retraite capacitaire ».
La zone économique exclusive de l'île Europa couvre 127 300 km2 et se trouve être immédiatement contiguë à celle de 123 700 km2 de Bassas da India dont l'atoll se trouve à 114km au nord-ouest.
L'île de la Réunion où siège l'administration du territoire des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), dont l'île Europa fait aujourd'hui partie, est éloignée de 1 546km à une latitude légèrement plus au nord. Paris est à 8 742 km
Ce n'est que le 24 décembre 1774 que le navire britannique Europa reconnut et positionna clairement l'île. Elle fut ultérieurement baptisée du nom de ce navire, en 1825, par le cartographe anglais William Owen (1774-1857).
Rattachements Art. 1er — L'arrêté du 21 novembre 1921 rattachant les Iles Juan de Nova et Europa à la province de Tananarive, est abrogé.
Art. 2. — L'Ile Juan de Nova est rattachée à la province de Maintirano et l'ile Europa à la province de Morombe.
On leur rend visite pour la première fois depuis 25 ans.
Une mission scientifique vient de faire une visite approfondie de l’île Europa et du récif de Bassas da India, en plein canal de Mozambique. Elle est composée du Dr Poisson, M. Paulhian, sous-directeur de la recherche scientifique à Madagascar, M. Sabouraud, inspecteur des réserves naturelles, et du commandant Milon, ornithologiste. Partie de Tuléar le 9 avril à bord des navires hydrographes Lapérouse et Alidade, cette mission est arrivée à Europa dans la journée du 10, y a séjourné jusqu’au 12, et s’est rendue à Bassas le 13. Le Lapérouse est rentré à Tuléar le 14, l'Alidade le 15. Sans prétendre m’immiscer dans îe détail des observations scientifiques qui ont été réalisées au cours de cette petite exploration, j’ai pensé que les lecteurs de Climats seraient sans doute curieux de savoir comment se présentent ces morceaux inhabités et peu connus de l’Union Française, et ce que les innombrables naufragés qui y ont échoué au cours des siècles ont trouvé pour servir de cadre à leur agonie.
Bernard l'ermite sur l'île Europa.
Europa est constituée par une sorte de galette madréporique, nettement émergée et bordée d’un récif frangeant de coraux vivants. Elle mesure à peine huit kilomètres dans sa plus grande dimension. En son milieu, un lagon formant deux poches contiguës, fermé à marée basse, se laisse pénétrer par la marée haute à travers un semblant de chenal orienté vers le Nord. Tout autour de l’Ue, ainsi que sur la chaussée qui divise le lagon en deux, s’élèvent des dunes de sable hautes de huit à dix mètres. Bassas da India n’est qu’un récif coralien, du type classique : étroit anneau de coraux que couvrent, en y brisant les hautes mers de vive-eau, et que découvrent amplement les basses mers.
L’habitabilité, absolument nulle à Bassas, est très précaire à Europa. On n’imagine guère, sur cette île, de station permanente, sans un ravitaillement d’une fréquence rédhibitoire, et sans une destruction complète des palétuviers — seule verdure reposante pour l’œil — en vue d’exterminer les moustiques. Comme escale pour l'hydraviation, Bassas da India dispose d’un magnifique plan d’eau, mais sans aucune ressource.
A Europa, le plan d’eau qui existe entre le récif périphérique et le rivage pourrait être utilisé par des appareils légers, mais à marée haute seulement. Un terrain de secours pour avions terrestres serait facile à aménager entre les dunes et le lagon; le sol y est fort consistant. Mais toutes ces hypothèses ne se peuvent formuler que dans le domaine du précaire, de l’exceptionnel, du «moyen de fortune». A quoi donc, finalement, pourraient servir ces rochers perdus dans l’immensité du canal de Mozambique ? Va-t-on les utiliser comme champs d’expérience pour de nouveaux Bikini ? Certes, leur disparition supprimerait un grave danger pour la navigation; les dizaines d’épaves qui couvrent leurs rivages témoignent, en effet, de nombreux drames obscurs du passé. Mais nous avons maintenant le radar, et il deviendra de moins en moins difficile aux marins de se garer de ces écueils. Une proposition beaucoup plus intéressante vaut d’être formulée. A Bassas da India, à Europa surtout, nullement troublées par la présence humaine, des espèces capables de bien résister à la soif et à l’absence d’humus et d’ombrage, se développent en toute sécurité.
Nul besoin d’y édifier de coûteuses barrières, d’y subvenir à l’entretien de cerbères permanents. L’accès de ces deux terres n’intéresse guère que des spécialistes. Rien de plus logique que de le leur réserver officiellement. Rares sont, sur le globe, les terres émergées, aisément accessibles, comme celles-ci, à partir d’un continent proche, sous un climat modéré, et pourtant livrées entièrement aux lois naturelles. Si l’homme veut absolument y introduire une de ses lois à lui, que ce soit une loi de protection, classant définitivement ces deux terres presque inviolées parmi les réserves naturelles de l’Union Française. La mise en valeur du monde n’a rien à y perdre. La science y gagnera. Le prestige de la France aussi.
CAPPELA
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