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23 août 2021

Croiseur cuirassé Gueydon lancement Lorient amiral pont Brest Lorient

Croiseur cuirassé Gueydon


Allons sur le quai Gueydon,
Devant l'petit pont, Chanter la chanson,

Le branle bas de la croisière,
Et dans la blanche baleinière,

Ce pont flottant doit son nom à Louis-Henri de Gueydon, préfet maritime de Brest, de 1859 à 1861. Il est installé en 1946. Grâce à lui, les civils pouvaient franchir à pied la Penfeld. En 1949, ses caissons de bois sont remplacés par des pontons métalliques. Lors de l'ouverture du pont de Recouvrance, le pont Gueydon est déplacé pour que les civils puissent y accéder en cas de dépose de la travée amovible de Recouvrance. Un scénario qui ne s'est jamais produit. Y compris quand le pont de Recouvrance a été en travaux pour permettre le passage du tram

.

Le Gueydon est armé au port militaire de Toulon en 1903. Il fait sa première campagne en Extrême-Orient. 

Lancement du Gueydon



Le croiseur le Gueydon sera mis à l'eau le mercredi 20 septembre à 3 heures un quart de l'après midi.

L'arsenal sera ouvert à une heure et demie au public (il pourra être admis dans les tribunes sur la présentation de cartes dont la demande devra être faite à l'état-major du 11 au 18 septembre. On exécute en ce moment les travaux de curage nécessaires pour la lancement de ce navire, l'un des plus longs construits dans notre port. 
L'Ouest-Eclair 4-09-1899

Il participe ensuite à la Première Guerre mondiale, faisant essentiellement campagne sur les rivages de l'Amérique du Sud et des Antilles.


En 1923, il subit une refonte à l'Arsenal de Brest et, en 1926, une autre à Toulon pour servir d'école de canonnage. En 1927, il remplace le Pothuau comme navire-école des canonniers. Il est rayé du service actif en 1935, et sert alors de ponton-caserne à l’École Préparatoire de la Marine.

L'Ouest-Eclair 23-09-1899

A noter que Gueydon est écrit Guédon


Le « Guédon"
L'amiral Le Croiseur

Ce croiseur porte le nom d'un vice-amiral. le comte Henri de Guédon, qui naquit Granville, le 22 novembre 1809. II entra dans la marine en 1825, fut nommé enseigne en 1880. lieutenant en 1835 et capitaine de vaisseau en 1847.
En 1854, il fut nommé contre-amiral et en 1858 il fut appelé à Lorient où il servit pendant quelques mois comme préfet maritime, il occupa ensuite le même poste à Brest.

Eu 1861, il fat promu vice-amiral et prit le commandement de l'escadre d'évolution. Le 2 mais 1870, M. de Gueydon siège au Conseil de l'amirauté et le 22 février de l'année suivante il fat promu grand croix de la Légion d'honneur.


Le 24 mars 1871, il fut nommé gouverneur civil de l'Algérie, c'est surtout dans ce poste que l'on put juger de la valeur de cet admirable officier.
Atteint par la limite d'âge, l'amiral Gueydon quitta son poste, mais fut néanmoins maintenu dans les cadres de l'activité, en reconnaissance de ses services.
Il mourut le 1er décembre 1886 Kernalec (Finistère).



Le croiseur le "Guedon" a été mis en chantier le 2 août 1898 d'après les plans de M. Bertin le savant directeur des constructions navales, c'est un croiseur de première classe, il mesure 139 mètres 90 de long, 19 mètres 50 de large, avec un tirant d'eau de 7 mètres, son déplacement total est de 19,600 chevaux. Le Guédon possédera trois machines à triple expansion et la surface des grilles des chaudières sera d'environ 100 mètres carrés. Sa vitesse atteindre 21 nœuds, sa puissance offensive se composera de 36 canons 2 canons de 194 m/m sur tourelles simples, 8 canons de 164 m/m à tir rapide en réduits cuirassés, 4 canons 108 m/m tir rapide découvert à l'avant et à l'arrière, 16 canons de 47 m/m tir rapide, dont 4 dans la hune d'avant, 4 canons de 37 m/m tir rapide. Elle comprendra en outre deux tubes lances-torpi!les sous-marins. Le Guédon aura 4 cheminées, 6 projecteurs et 2 mâts. dont un militaire et l'autre. à signaux.
Son équipage comprendra 562 hommes commandés par un capitaine de vaisseau.


Le lancement

Vers une heure de l'après-midi une immense foule se presse aux diverses issues de l'arsenal, et court à l'assaut des tribunes qui sont trop petites pour contenir toute cette foule; plus de 1,000 cartes ont été distribuées pour les tribunes officielles, et beaucoup plus grande est la foule non munie de cartes et qui s'est dispersée aux environs de la cale couverte.

Le commencement de la cérémonie est indiquée par une sonnerie des clairons du 3e dépôt, puis, après les prières rituelle d'usage, M. l'abbé Darrieux aumônier de la marine, procède à la bénédiction de l'imposante masse. Les pompiers forment la garde d'honneur. Pendant ce temps, la musique de l'artillerie de marine joue une marche religieuse qui se termine par le « Domine Salvam)


Quelques minutes plus lard ou entend plusieurs coups de masse; une immense clameur s'élève de la foule l'imposant croiseur glisse sur son berceau et prend possession de son élément.

C'est un succès de plus pour notre port qui contient en ce moment en achèvement trois grands navires destinés à faire l'ornement de nos escadres. Le Saint Louis, le Jurien de la Gravière et le Guedon. Remarqués parmi les invités du Préfet maritime, M, l'amiral Besnard, ancien ministre de la marine, actuellement en résidence Part Louis ; MM. les commandants du Bruix, du Surcouf et du Fleurus. Les membres de la famille de Guédon, M. Dumglas, capitaine de vaisseau de la marine anglaise, attaché naval d'Angleterre.


Ouest-Eclair 13-01-1903
Au début de la Seconde Guerre mondiale il était basé à Brest et sabordé le , la veille de l'entrée des troupes allemandes dans la ville, puis en 1943, les Allemands, pour leurrer les observateurs de la RAF, le maquillent en faux Prinz Eugen. Il sera détruit lors de la prise de Brest.






Le pont Gueydon à Lorient

13 février 2021

Croiseur cuirassé Victor Hugo Lorient caractéristiques lancement timbre

Croiseur cuirassé Victor Hugo

Oh ! combien de marins, combien de capitaines
Qui sont partis joyeux pour des courses lointaines,
Dans ce morne horizon se sont évanouis !
Combien ont disparu, dure et triste fortune !
Dans une mer sans fond, par une nuit sans lune,
Sous l'aveugle océan à jamais enfouis !
Oceano Nox

 

Timbre Victor Hugo Lilas Rose  1fr
dessin et gravure Achille Ouvré 
20-05-1935

Il y a souvent plus de choses naufragées au fond d'une âme qu'au fond de la mer. 
Victor Hugo.






La mer est omniprésente dans l'œuvre littéraire et graphique de Victor Hugo. La puissance, l'ampleur océane sont à la mesure de la création artistique de ce génie à la fois écrivain, plasticien, homme politique… La mer est l'un des éléments moteurs de son inspiration notamment au moment de l'exil.


La mer tient une place privilégiée dans la vie de Hugo. Les îles Anglo-Normandes de Jersey et surtout de Guernesey à partir de 1855, deviennent, pendant près de vingt ans, des lieux de résidence obligés. Durant ses séjours, l'homme s'approprie et se confronte à la mer, côtoie les pêcheurs et les marins… et écrit, peint depuis cette fenêtre maritime. Ce face-à-face lui permet de libérer son imagination et lui fait écrire les chefs-d'œuvre de la maturité des Contemplations à La Légende des siècles, des Misérables aux Travailleurs de la mer ou à L'Homme qui rit.


Dépêches maritimes

De nos correspondants particuliers de Paris et des ports par dépêche.
MARINE DE GUERRE LE VICTOR-HUGO Lorient, 15 octobre.


Lorient Le Victor Hugo lancé le 30 mars 1904

Le croiseur cuirassé Victor Hugo est maintenant terminé et ce magnifique navire va entrer prochainement dans la période des essais. Depuis plusieurs jours, le Victor Hugo était échoué dans le grand bassin de radoub où a été fait le nettoyage complet de sa carène.


Sous sa toilette neuve, le navire est prêt à faire belle figure en escadre. La coque est entièrement peinte en noir jusqu'à la hauteur du pont où la teinte est grise. Mardi, 16, le Victor Hugo sera remorqué en rade où il procédera à la régulation de ses compas, puis commenceront les essais. Ces essais devraient presque être achevés, mais on n'avait pas prévu les retards dans la livraison des machines et de quelques tourelles; ces retards ont eu leur répercussion sur la date primitivement fixée.

L'Ouest-Eclair 16-10-1906

Le Victor Hugo est entré en armement le 18 septembre. Son commandement est confié au capitaine de vaisseau Nayel. Son commandant en second est le capitaine de frégate Corlouer, du port de Brest. L'armement est réduit au strict nécessaire l'état-major ne comprend que quelques officiers, l'équipage est de deux cents officiers mariniers, quartiers-maîtres et marins. C'est, avec le personnel ouvrier qui sera à bord, un effectif suffisant pour les essais.

Voici quelques données sur les caractéristiques de ce croiseur Le Victor Hugo, comme le Jules Michelet, en voie d'achèvement, a une longueur totale de 149 m. 70 sa largeur au fort est de 21 m. 40 il déplace 12.604 tonneaux la puissance maxima de ses machines est de 27.500 chevaux; sa vitesse extrême prévue est de 22 nœuds, inférieure d'un nœud à celle du Waldeck-Rousseau encore sur chantier. Ce dernier navire a neuf mètres de long de plus que le Victor Hugo et que son similaire le Jules Michelet.

Comme la Gloire, comme le Condé, comme encore le Jules Miclielet, le Victor Hugo est construit sur les plans de M. l'ingénieur Bertin. L'ordre de construction date du 3 juin 1902, mais la mise en chantier ne se fit que le 2 mars 1903. Lancé le 30 mars 1904, le Victor Hugo est donc resté treize mois sur cale de construction. L'entrée en armement date du 18 septembre 1906, on voit par conséquent que la construction de ce navire aura duré trois ans et demi. Aussitôt ses compas réglés, le Victor Hugo commencera la série des essais de vitesse de consommation, etc.; après quoi, il fera partie, l'an prochain, de la division de croiseurs cuirassés de l'escadre de la Méditerranée, avec le Léon Gambetta et le Jules Ferry.


Il est le deuxième croiseur cuirassé de la classe, après le Léon-Gambetta (lancé en 1902) et avant le Jules Ferry (lancé en 1907).

Timbre Victor Hugo 2,10 fr + 0,50fr  - Jacques Jubert - 25-02-1985

Sa construction débute à l'arsenal de Lorient en mars 1903, et il est lancé le  30 mars 1904. Il est mis en service actif en avril 1907 et affecté à la flotte de Méditerranée. Il est mis en réserve de janvier 1911 à février 1912. Il participe à la  Première guerre mondiale, combattant en Méditerranée, puis est mis en réserve en juillet 1918. Il est réarmé en 1922 et affecté à la division volante de l'Atlantique le 21 août. Il effectue un voyage en Extrême-Orient avant d'être placé en réserve à Toulon le 11 juillet 1923. Il est rayé des listes le 2janvier 1928, puis vendu pour démolition le 26 novembre 1930


Sources :

http://expositions.bnf.fr/hugo/expo.htm

BnF L'Ouest-Eclair 16 octobre 1906

Wikipedia

31 janvier 2021

La perte du croiseur Cuirassé Edgar Quinet 4 janvier 1930 Algérie- îles Habibas Oran navire Ecole Jeanne d'Arc

 La perte du croiseur Cuirassé Edgar Quinet 4 janvier 1930 


L'EDGAR-QUINET était un croiseur cuirassé, lancé le 21 septembre 1907, à l'Arsenal de Brest de 158.20 mètres de long, 21.50 mètres de maître-bau et d'un tirant d'eau de 8.30 mètres. Son déplacement était de 13.650 tonnes. Propulsé par 3 machines à vapeur, alimentées par 40 chaudières Niclausse, il développait une puissance 36.000 C.V., lui assurant une vitesse de 23 nœuds.

Son armement était impressionnant 14 canons de 194 mm, (mod.1902), 20 canons de 65 mm, 8 canons de 47 mm et 2 lance-torpilles de 450 mm. Son rayon d'action atteignait 11.000 milles à 10 noeuds. L'équipage variait de 859 à 892 hommes (officiers, officiers mariniers, quartiers maîtres et matelots).

En 1920, il devient le navire-amiral de la 1° division légère, formée avec le Waldeck-Rousseau et l'Ernest Renan. En 1922, il est mis en réserve à Toulon et il devient navire école d'application en remplacement du Jeanne d'Arc.


Transformé en croiseur-école en 1929, des chaudières ont été débarquées afin de récupérer dans les entreponts, à la place des conduits de cheminées, de quoi installer des locaux supplémentaires (chambres d'officiers-élèves, salles de cours, etc). Il passe donc de six cheminées à quatre.

Torpilleur d'escadre Enseigne Roux 

Il était 2 heures de l’après-midi, ce jour du 4 janvier 1930. Le croiseur Edgar-Quinet accomplissait des exercices d'école de pilotage et des manoeuvres d'attaque avec le torpilleur Enseigne-Roux, ce qui explique sa position si proche de la côte. Le vaisseau école filait à une allure de 12 noeuds. En arrivant près du cap Blanc, à hauteur de la roche aux moules, un choc violent se produisit et l’avant se souleva légèrement. L'Edgar-Quinet continua sa course, puis s'arrêta brusquement. Surpris, les matelots montèrent, en hâte, sur les ponts.


Torpilleur d'escadre Enseigne Roux 

Le commandant Benoist, qui se trouvait a son poste de commandement, comprenant le danger que courait le bâtiment, ordonna de sonner immédiatement le "regagnez les postes de sécurité ". Tous les hommes se rendirent aux endroits désignés dans un ordre admirable. C'est le torpilleur Enseigne-Roux qui a porté les premiers secours au croiseur. Le torpilleur Enseigne-Roux qui suivait l’Edgar-Quinet à un quart d'heure de distance pour simuler une manoeuvre d'attaque, averti par un S.O. S., força sa marche et arriva sur les lieux de l'accident quelques instants après. Toutes les embarcations du croiseur et du torpilleur furent mises â la mer et le transbordement s'effectua très rapidement. Quatre cents officiers et marins prirent place sur l'Enseigne-Roux qui filait à toute vapeur sur Oran. Le reste de l'équipage débarquait ensuite à la défense mobile pour être réparti entre la caserne du Château-Neuf, l'Hôpital militaire et le Centre des flottilles.


Les derniers moments de l'« Edgar-Quinet »

Une déclaration de l'amiral Bouis Paris 12 janvier. 




Le Journal publie dans son édition départementale des déclarations faites par l'amiral Bouis à son correspondant à L'amiral, après avoir rappelé tes conditions dans lesquelles l'accident de l'Edgar-Quinet s'est produit, délement sur le fond, soit à une trentaine de mètres de profondeur. Le bateau parait se tasser par suite de son poids sur la roche. Celle-ci est un plateau de 20 à 25 mètres de long, sensiblement aussi large. Le hasard a fait qu'en cette circonstance l'Edgar-Quinet est monté à peu près sur le de côté c'eut été une catastropha de vies humaines, car le bâtiment aurait alors chaviré rapidement. « La roche n'est pas indiquée sut les cartes marines qui portent en cet endroit des fonds supérieurs à 20 mètres. La plus grande partie du petit matériel a été récupéré, mais la continuation des opérations de récupération du matériel léger reste fonction du temps qui continue à s opposer à tout travaux »





« L'EDGAR-QUINET » ECHOUÉ PRÈS DORAN - LE NAVIRE S'EST FAIT UNE DECHIRURE D'UNE QUINZAINE DE MÈTRES DE LONGUEUR 
Nous avons annoncé hier dans la plupart de nos éditions, que le croiseur Edgar-Quinet, faisant route d'Alger sur Casablanca, s'était échoué samedi entre le cap Blanc et les iles Habidas. Il n'y a aucun accident de personnel.

L'Edgar-Quinet, de 14.050 tonnes de déplacement, sert de bâtiment école d'application aux enseignes de vaisseau de 2e classe et est commandé par le capitaine de vaisseau A. Benoist. 

Oran, 5 janvier. 
Les scaphandriers ont constaté que le croiseur Edgar-Quinet portait une déchirure d'une quinzaine de mètres de longueur. Le navire repose sur un fond de rochers et de sable.

Le vice-amiral Bouis, commandant la marine en Algérie, est arrivé ce matin à Oran pour ouvrir une enquête sur les causes de l'accident. 


Toulon, 5 janvier. Deux remorqueurs fie la Direction du port de Toulon, le Samson et le Goliath, ont appareillé cette nuit pour Oran où ils procéderont au renflouement du croiseur Edgar-Quinet, échoué près d'Oran. Le port tient prêts d'autres vapeurs de secours

L'amiral exprime son opinion sur c Tenue parfaite, dit-ll. Ainsi, quand j'ai ordonné l'évacuation des hommes 18 heures 45, c'est-à-dire alors que la nuit était noire, il y a eu un coup de mer le long du bord. Le remorqueur était accosté à l'extrême arrière de l'Edgar-Quinet et faisait des bonds de deux mètres de hauteur. Eh bien les deux cents hommes de la corvée qui avaient travaillé sur le croiseur pendant toute la journée ont embarque un a un dans l'obscurité la plus grande et sans un accident. Voici un autre trait du sang-froid et dé la discipline de nos marins qui montre qu'ils étaient à bonne école avec le commandant Benoist avant l'évacuation, les hommes de la corvée ont mangé le ma:in et le soir sur le bateau avec la cuisine faite à bord, c'est-à-dire sur un navire dont la poS sition était particulièrement grave. De plus. les couleurs. ont. été faites. ce jour-là, à l'heure réglementaire, comme elles l'ont été le mardi pour la dernière fois.




La perte de l' «Edgar-Quinet"

Des cartes marines de 1873
La commission d'enquête fonctionnant Oran et présidée par l'amiral Traub, a terminé ses travaux. Ceux-ci viennent d'établir de façon catégorique que le commandant de l'Edgar-Quinet, le capitaine de vaisseau Benoist, n'est en quoi que ce soit responsable de la perte de son navire. La carte marine de la zone où naviguait le croiseur, qui mentionne les fonds d'Arzeu au cap Frejolo, a été levée en 1873 par le capitaine de Egouchez. du bureau des longitudes, commandant ie Narval. Cette carte a été éditée en 1876. 

A l'endroit même où l'Edgar-Quinet s'est échoué, à 6 milles 105 du feu d'Habibas, elle accuse des fonds de 32 et 28 mètres, signale au nord les roches des Moules et des fonds douteux, mais est muette sur le haut fond qui fut fatal à l'Edgar-Quinet D'autre part, les instructions nautiques, qui datent de 1919, ne portent aucune indication sur ce point. Le commandant Benoist n'a donc commis aucune faute et le conseil de guerre maritime qui se réunira à Toulon pour le juger selon la loi ne pourra que prononcer son acquittement.


Le 29 décembre dernier, le croiseur Edgar-Quinet, bâtiment école d'application des futurs officiers de marine, arrivait à Alger sous le commandement de M. le capitaine de vaisseau Benoist, après avoir effectué en Méditerranée une croisière d'environ deux mois, constituant la première partie de sa campagne annuelle d'instruction.
Le 3 janvier, il reprenait la mer à destination de Casablanca et stoppait le lendemain matin au large des jetées d'Oran pour la relève du groupe d'officiers élèves embarqués sur le torpilleur d'escadre Enseigne-Roux, qui lui avait été attaché comme annexe dans cette partie de son itinéraire. Ce petit bâtiment devait le rallier vers 14 heures, après s'être ravitaillé en mazout à l'intérieur du port.

Pour utiliser au mieux le temps dont il disposait jusque là, le commandant Benoist fit exécuter, de 10 h. 30 à 11 h. 30, un exercice de prise d'alignements, en baie de Mers-el-Kébir, puis traça sur la carte les routes à suivre au cours d'un exercice de navigation cotière à la vitesse de 10 noeuds.
Il ne quitta la passerelle qu'entre midi 15 et midi 25, après avoir indiqué au lieutenant de vaisseau Demotes-Mainard, qui avait pris le quart à midi, comment il avait tenu compte dans le tracé de ces routes des quelques dangers à éviter, notamment d'un haut fond de 12 mètres à l'Est des Roches des Moules.



Après avoir doublé le cap Falcon, la pointe Corales et le cap Lindess, le bâtiment, conformément aux ordres du commandant, devait passer entre ces roches et le cap Blanc, dont elles sont séparées par un chenal large de 1.500 mètres environ, où les cartes accusaient alors des profondeurs, toutes supérieures à 27 mètres.

Le dernier changement de route, pour donner dans ce passage, eut lieu à 13 h. 43. Un point porté immédiatement après, par relèvements, plaçait le bâtiment sur la route prescrite, mais l'officier de quart, s'estimant un peu plus sur la gauche, en fit prendre rapidement un autre et, en attendant qu'il fut tracé, ordonna, par mesure de prudence, de gouverner légèrement plus à droite.


Les îles Habibas forment un ensemble insulaire situé à l'ouest d'Oran, face à la plage de Madagh. 
Elles sont classées comme réserve naturelle maritime par l'UNESCO depuis 2003 

Cet ordre n'était pas encore exécuté que de violentes secousses, ébranlant l'avant du navire, furent ressenties sur la passerelle. Croyant qu'une des ancres venait de se dessaisir- et de tomber à la mer, M. Demotes-Mainard stoppa immédiatement, puis comprenant que le bateau venait de rencontrer un obstacle ou une épave, mit en arrière à toute vitesse, en ordonnant au clairon de sonner la fermeture des portes étanches et le rappel aux postes de sécurité.
Le commandant Benoist était déjà rendu sur la passerelle. Il fait stopper les machines et procéder à la très qu'il venait de repérer. Les marnent ainsi qu'à des sondages qui lui indiquent que bien qu'aucun danger ne figurait sur la carte à cet endroit, son navire était échoué à la hauteur de la passerelle sur une roche de peu d'étendue couverte de 7 à 8 mètres d'eau seulement, alors que son tirant d'eau arrière était de 8 m. 50 environ. Il ne lui parut donc pas impossible à première vue de se dégager de cet écueil et de se rapprocher d'une plage de sable distante d'environ 1.500 mètres qu’il venait de repérer. 


Les machines se révélant incapables d'arracher le bâtiment à l'emprise de la roche, il se décide à essayer de l'y maintenir en état de flottabilité jusqu'à l'arrivée de secours qu'il demande immédiatement par T. S. F. Oran, Bizerte, Toulon, Gibraltar même, alertés et invités à diriger d'urgence sur les lieux leurs bâtiments de sauvetage les plus puissants pendants que l'on met en oeuvre les organes d'épuisement du bord. Ceux dont on doit le plus attendre consistent en trois turbines électriques de 1.100 tonnes chacune, mais les dynamos qui les actionnent sont concentrées dans un compartiment qui sera malheureusement envahi bientôt par l'eau s'engouffrant à travers la brèche ouverte dans le fond du navire, brèche trop considérable pour que l'on songe à l'aveugler par les seuls moyens dont on dispose.

Les remorqueurs expédiés d'Oran à une trentaine de milles de là arrivent naturellement les premiers, mais leurs appareils de pompage sont manifestement insuffisants eux aussi et la mer calme, jusque-là, commence à grossir fâcheusement. Le mauvais temps qui s'établit et régnera désormais sans presque discontinuer retarde l'arrivée des secours annoncés et contrarie les opérations de sauvetage dont M. le Vice-Amiral Bouis, commandant de la marine d'Algérie, a pris la direction dès le 5, vers 11 heures du matin par ordre du ministère. Elles doivent être complètement interrompues du 5 au soir à la matinée du 7 où la position du bâtiment est reconnue désespérée.
Dans la soirée du 8, sa rupture était imminente, car il fatigue déjà beaucoup et une tempête de Nord-Ouest est annoncée. On l'évacué définitivement et à 21 h. 30, il se casse à la hauteur des tourelles milieu, sa partie avant noyée jusqu'aux écubiers restant accrochée à l'écueil, tandis que l'arrière disparaît par 30 mètres de fond.
La carte utilisée par le commandant et l'officier de quart de l’Edgar-Quinet pour leur navigation dans les parages du cap Blanc dans la journée du 4 janvier, est une carte au 100.000e portant le numéro 3483 de nomenclature. Elle fait partie du levé général de la côte nord d'Afrique, exécuté par une mission hydrographique sous les ordres de M. le contre-amiral Mouchez entre 1867 et 1877, époque où on ne disposait pas encore des moyens utilisés actuellement pour la recherche des roches isolées du genre de celle sur laquelle s'est perdu l’Edgar-Quinet. Une révision de ce levé a bien eu lieu en 1925 et 1926, mais l'insignifiance des résultats obtenus en regard des effectifs et des dépenses qu'elle nécessitait la fit suspendre provisoirement sans qu'elle eut été poussée à l'ouest d'Oran.


Il convient toutefois de noter que l'exemplaire de la carte incriminée était de la dernière édition faite en 1899, qu'il était à jour de toutes les corrections officielles et que la dernière qu'il portait ne datait que de 1929. Contrairement à certains bruits qui ont couru, la roche qui a causé la catastrophe ne figurait pas non plus sur les cartes anglaises, où elle n'a été portée que le 22 février 1930, soit un mois et demi après qu'elle se fut produite, ainsi qu'en fait foi l'avis aux navigateurs n° 286 de l'amirauté britannique.
Si par ailleurs, certains pêcheurs et patrons au cabotage et au bornage de la région oranaise connaissaient l'existence de cette roche, ils n'en avaient jamais parlé à personne en dehors du milieu très fermé auquel ils appartiennent, milieu n'utilisant jamais de cartes marines et où l'on ignorait naturellement que le danger qu'elle constituait n'y était pas signalé.


Cette lacune cartographique est-elle l'unique cause du sinistre? Doit-on, au contraire, l'imputer en partie à la façon dont le commandant Benoist pratiquait d'ordinaire la navigation à proximité des côtes en les longeant, comme il a été dit également, de beaucoup plus près qu'il n'aurait fallu et sans nécessité apparente. Cet officier supérieur doit pouvoir repousser tout grief de ce genre, en objectant que l’Edgar-Quinet n'était pas un bâtiment ordinaire, mais un navire-école, où les exigences de l'instruction des officiers élèves avaient une importance primordiale et comportaient obligatoirement la pratique courante intensive même d'une navigation côtière aussi serrée que possible, sous réserve bien entendu d'une marge de sécurité raisonnable.
Il estime n'y avoir jamais manqué et pense qu'en agissant de la sorte, il se conformait strictement aux directives qu'il avait soumises au département au début de sa campagne et qui avaient reçu son entière approbation
Abstraction faite de l'ignorance générale au sujet du danger qu'il a rencontré sur sa route et qui est un point acquis, les questions qui se posent dans cette douloureuse affaire sont donc celles de savoir jusqu'à quel point pareille conviction était justifiée de sa part, s'il n'a pas outrepassé les instructions par excès de zèle, si, par ailleurs, il a bien fait tout ce qui était en son pouvoir pour sauver son bâtiment, s'il l'a bien quitté le dernier comme il le devait et si, en définitive, on ne peut lui reprocher d'avoir fait preuve de négligence ou d'impéritie dans l'exercice de son commandement.


Sources 

L'Ouest-Eclair

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