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19 janvier 2022

Cuirassé Provence avril 1913 lancement Lorient Morbihan Ministre Marine nationale

Cuirassé Provence avril 1913




Avec les voeux de Daniel, cette carte postale avec le cachet du cuirassé Provence qui se sabordera à Toulon.
Et puis bien sûr un clin d'oeil coquin de notre marin qui adresse sa carte à l'adresse d'une dame qui loge rue de "Monplaisir".  Tout un programme!




Le Lancement du «Provence» ♦♦

Cette imposante cérémonie se déroule en présence du ministre de la marine au milieu de l'enthousiasme général

Lorient, 20 avril.

C'est par un temps pluvieux, qui ne s'éclairait qu'à de rares intervalles, que s'est déroulée l'imposante cérémonie du lancement du cuirassé Provence Mais en dépit de ce temps, cette fête n'en revêtit pas moins un caractère grandiose qui impressionna tous ceux qui eurent l'avantage d'y assister.

C'est par la visite de l'hôpital maritime que la journée ministérielle a débuté. M. Baudin, comme ses prédécesseurs, a pu se rendre compte de l'insuffisance notoire de ces baraquements.



 M. Pfihl, directeur du service de santé présente au ministre le corps médical, médecins et infirmiers, dont il dit la fidélité et le dévouement.

M. Baudin félicite un personnel qu'il connait depuis longtemps et qu'il a souvent pu apprécier.
Le ministre visite ensuite les malades et les blessés.

POSE DE LA PREMIERE PIERRE DU BASSIN DE RADOUB


Le cortège pénètre alors dans l'enceinte clôturée où sont commencés les travaux de construction de la forme de radoub et la cérémonie de la pose de. la première pierre. Sous une tente ornée de drapeaux, le ministre et les autorités signent les parchemins commémoratifs qu'on enferme dans une caissette en fer avec des médailles et des pièces de monnaie de notre époque. M. de Larminat, directeur des travaux hydrauliques, prononce un court mais éloquent discours. 

 Le ministre répond à M. de Larminat que depuis un certain nombre d'années, la marine se procure un outillage moderne sans lequel aucune force navale ne peut exister Il faut prévoir et ne pas refuser aux arsenaux les moyens d'assurer la défense nationale. Les ministres actuels la continueront et développeront dans toute la mesure possible le grand outillage dont la marine a besoin.

On peut remarquer sur le hangar les noms des cuirassés qui y furent construits :  Courbet - Gueydon - Victor Hugo - Waldeck-Rousseau - Jules Michelet 

On place ensuite dans la première pierre la cassette contenant les parchemins, puis le cortège prend place dans une vedette qui le conduit à l'arsenal et le débarque au champ de manœuvres de Caudan.



LES OPERATIONS DU LANCEMENT

Les opérations de lancement d'une unité d'un tonnage aussi puissant que la Provence, présentent toujours des difficultés, différentes suivant les arsenaux.

A Lorient, il y a nécessité d'arrêter très exactement le bâtiment qui, lancé par le travers de la rivière Le Scorff, a seulement 50 mètres d'eau derrière lui, au moment où il commence à flotter.

C'est pourquoi, on emploie des moyens de retenue et d'arrêt très complets c'est d'abord un masque de 140 mètres carres et quatre câbles de retenue de 70 centimètres de circonférence avec bosses cassantes.



La Provence est le premier cuirassé sans quille. Le navire est lancé sur une quille rapportée nommée « savate ».

La savate est une pièce de bois de 1 m. 20 de largeur et de 152 mètres de long. L'avant de la savate porte entièrement sur une coulisse suiffée (plus de 5.000 kilos de suif sont nécessaires. L'extrémité arrière de la savate porte sur un certain nombre de billottages entre lesquels se trouvent des morceaux de coulisse suiffée.

 Ces billottages, nommés tins secs, sont destinés a retenir le navire et a l'empêche de prendre trop de vitesse au départ.

Dès le matin on a commencé l'enlèvement des accores.

La Provence » prend possession de son élément 


A 2 heures 30, un roulement de tambour se fait entendre, suivi du sifflet du chef de chantier.

Les accores sont enlevées deux à deux et leur emplacement entièrement repeint. A 2 heures 50, les dernières accores sont enlevées. Aussitôt le drapeau national est hissé a l'arrière du navire. Désormais la savate arrête, seule, le départ du cuirassé, et voici que la scie grince, sectionnant la pièce de bois. La savate entièrement coupée, le navire ne bouge pas, il ne doit pas encore bouger, d'ailleurs, pour que le lancement soit parfaitement réussi, il faut maintenant soulever à l'aide de coins, à l'arrière de la savate, les morceaux de coulisse suiffée et les équipes d'ouvriers se placent de chaque coté de la savate.


 Les gueuses (lourdes pièces de fonte) viennent frapper en cadence les pièces de bois.
Les équipes d'ouvriers sont sous la direction d'un chanteur qui donne le mouvement. Après deux volées, l'énorme masse s'ébranle et glisse doucement.

 Les câbles de retenue se rompent avec des détonations, et le navire entre dans son élément.

Un grondement puissant, une seule acclamation s'échappe de 50.000 poitrines. La musique joue la Marseillaise.

C'est un moment de bonne et saine émotion patriotique.
il est exactement 3 heures.

sources 
L'Ouest-Eclair
Assemblée nationale
Sénat

Merci à Daniel Allançon

23 août 2021

Croiseur cuirassé Gueydon lancement Lorient amiral pont Brest Lorient

Croiseur cuirassé Gueydon


Allons sur le quai Gueydon,
Devant l'petit pont, Chanter la chanson,

Le branle bas de la croisière,
Et dans la blanche baleinière,

Ce pont flottant doit son nom à Louis-Henri de Gueydon, préfet maritime de Brest, de 1859 à 1861. Il est installé en 1946. Grâce à lui, les civils pouvaient franchir à pied la Penfeld. En 1949, ses caissons de bois sont remplacés par des pontons métalliques. Lors de l'ouverture du pont de Recouvrance, le pont Gueydon est déplacé pour que les civils puissent y accéder en cas de dépose de la travée amovible de Recouvrance. Un scénario qui ne s'est jamais produit. Y compris quand le pont de Recouvrance a été en travaux pour permettre le passage du tram

.

Le Gueydon est armé au port militaire de Toulon en 1903. Il fait sa première campagne en Extrême-Orient. 

Lancement du Gueydon



Le croiseur le Gueydon sera mis à l'eau le mercredi 20 septembre à 3 heures un quart de l'après midi.

L'arsenal sera ouvert à une heure et demie au public (il pourra être admis dans les tribunes sur la présentation de cartes dont la demande devra être faite à l'état-major du 11 au 18 septembre. On exécute en ce moment les travaux de curage nécessaires pour la lancement de ce navire, l'un des plus longs construits dans notre port. 
L'Ouest-Eclair 4-09-1899

Il participe ensuite à la Première Guerre mondiale, faisant essentiellement campagne sur les rivages de l'Amérique du Sud et des Antilles.


En 1923, il subit une refonte à l'Arsenal de Brest et, en 1926, une autre à Toulon pour servir d'école de canonnage. En 1927, il remplace le Pothuau comme navire-école des canonniers. Il est rayé du service actif en 1935, et sert alors de ponton-caserne à l’École Préparatoire de la Marine.

L'Ouest-Eclair 23-09-1899

A noter que Gueydon est écrit Guédon


Le « Guédon"
L'amiral Le Croiseur

Ce croiseur porte le nom d'un vice-amiral. le comte Henri de Guédon, qui naquit Granville, le 22 novembre 1809. II entra dans la marine en 1825, fut nommé enseigne en 1880. lieutenant en 1835 et capitaine de vaisseau en 1847.
En 1854, il fut nommé contre-amiral et en 1858 il fut appelé à Lorient où il servit pendant quelques mois comme préfet maritime, il occupa ensuite le même poste à Brest.

Eu 1861, il fat promu vice-amiral et prit le commandement de l'escadre d'évolution. Le 2 mais 1870, M. de Gueydon siège au Conseil de l'amirauté et le 22 février de l'année suivante il fat promu grand croix de la Légion d'honneur.


Le 24 mars 1871, il fut nommé gouverneur civil de l'Algérie, c'est surtout dans ce poste que l'on put juger de la valeur de cet admirable officier.
Atteint par la limite d'âge, l'amiral Gueydon quitta son poste, mais fut néanmoins maintenu dans les cadres de l'activité, en reconnaissance de ses services.
Il mourut le 1er décembre 1886 Kernalec (Finistère).



Le croiseur le "Guedon" a été mis en chantier le 2 août 1898 d'après les plans de M. Bertin le savant directeur des constructions navales, c'est un croiseur de première classe, il mesure 139 mètres 90 de long, 19 mètres 50 de large, avec un tirant d'eau de 7 mètres, son déplacement total est de 19,600 chevaux. Le Guédon possédera trois machines à triple expansion et la surface des grilles des chaudières sera d'environ 100 mètres carrés. Sa vitesse atteindre 21 nœuds, sa puissance offensive se composera de 36 canons 2 canons de 194 m/m sur tourelles simples, 8 canons de 164 m/m à tir rapide en réduits cuirassés, 4 canons 108 m/m tir rapide découvert à l'avant et à l'arrière, 16 canons de 47 m/m tir rapide, dont 4 dans la hune d'avant, 4 canons de 37 m/m tir rapide. Elle comprendra en outre deux tubes lances-torpi!les sous-marins. Le Guédon aura 4 cheminées, 6 projecteurs et 2 mâts. dont un militaire et l'autre. à signaux.
Son équipage comprendra 562 hommes commandés par un capitaine de vaisseau.


Le lancement

Vers une heure de l'après-midi une immense foule se presse aux diverses issues de l'arsenal, et court à l'assaut des tribunes qui sont trop petites pour contenir toute cette foule; plus de 1,000 cartes ont été distribuées pour les tribunes officielles, et beaucoup plus grande est la foule non munie de cartes et qui s'est dispersée aux environs de la cale couverte.

Le commencement de la cérémonie est indiquée par une sonnerie des clairons du 3e dépôt, puis, après les prières rituelle d'usage, M. l'abbé Darrieux aumônier de la marine, procède à la bénédiction de l'imposante masse. Les pompiers forment la garde d'honneur. Pendant ce temps, la musique de l'artillerie de marine joue une marche religieuse qui se termine par le « Domine Salvam)


Quelques minutes plus lard ou entend plusieurs coups de masse; une immense clameur s'élève de la foule l'imposant croiseur glisse sur son berceau et prend possession de son élément.

C'est un succès de plus pour notre port qui contient en ce moment en achèvement trois grands navires destinés à faire l'ornement de nos escadres. Le Saint Louis, le Jurien de la Gravière et le Guedon. Remarqués parmi les invités du Préfet maritime, M, l'amiral Besnard, ancien ministre de la marine, actuellement en résidence Part Louis ; MM. les commandants du Bruix, du Surcouf et du Fleurus. Les membres de la famille de Guédon, M. Dumglas, capitaine de vaisseau de la marine anglaise, attaché naval d'Angleterre.


Ouest-Eclair 13-01-1903
Au début de la Seconde Guerre mondiale il était basé à Brest et sabordé le , la veille de l'entrée des troupes allemandes dans la ville, puis en 1943, les Allemands, pour leurrer les observateurs de la RAF, le maquillent en faux Prinz Eugen. Il sera détruit lors de la prise de Brest.






Le pont Gueydon à Lorient

22 juin 2021

Lancement du Croiseur Foch 24 Avril 1929 Brest Pierre Le Conte

Lancement du Croiseur Foch 24 Avril 1929




« Ce croiseur ira fièrement montrer au-delà des mers la figure de la France libre, laborieuse, loyale, pacifique et fraternelle".

(Discours da vice-amiral Violette.)

Brest, 24 avril. (De notre rédaction brestoise). Le lancement d'un croiseur, c'est toujours la grande attraction brestoise.

La population, friande de ces spectacles grandioses, s'est portée hier en foule à l'arsenal 



La matinée, qui s'était montrée maussade, s'embellit, Et c'est par un clair soleil de printemps que le majestueux Maréchal-Foch a pris possession de l'élément liquide. M. Georges Leygues aurait été très désireux de présider cette cérémonie émouvante pour un ministre de la Marine. mais très fatigué depuis un certain temps, il dut déléguer ses pouvoirs a son chef d'état-major général, le vice-amiral Violette, qui arrivait à Brest, hier, par le rapide de 6 h. 50 était accompagné de son aide de camp, le lieutenant de vaisseau Brenac, du général Earatier, dernier chef d'état-major du regretté maréchal Foch; de l'ingénieur général François et de l'ingénieur en chef Charpentier. 

Le vice-amiral Pirot commandant en chef, préfet maritime, attendait l'envoyé du ministre en compagnie de son aide de camp, lieutenant de vaisseau Perzo, du chef d'état-major Bouquet, commandant Terme, lieutenant de vaisseau Noël Salaün. secrétaire général de la sous-préfecture, etc., etc. 

Le vice-amiral Violette monta aussitôt en auto pour se rendre à la Préfecture maritime, où il prit quelque instants de repos. Le chef d'état-major général et le vice-amiral Pirot, avec M. Thévenot, directeur des Travaux hydrauliques, se transportèrent ensuite sur le Suffren, qu'ils visitèrent en detail. Une heure plus tard, l'auto des vice-amiraux les déposait à Saint-Plerre-Quilbignon, à la Maison Blanche, où doivent être concentrés d'immenses réservoirs à mazout. 


De cette vallée au plateau où va prochainement être édifiée la nouvelle école naval il n'y a qu'un pas il fut vite franchi. Ces diverses visites, une fois effectuées, les vice-amiraux revinrent à la Préfecture où le Préfet et Mme Pirot offraient un déjeuner officiel. Après le déjeuner officiel le vice-amiral Pirot a reçu le télégramme suivant oui lui était adressé par Mme la maréchale Foch

Très sensible à l'honneur lait a ia mémoire du maréchal, en donnant son nom au croiseur lancé aujourd'hui, regrette d'être empêchée par deuils trop récents d'assister à la cérémonie à laquelle je m'associe de tout cœur. » Signé La Maréchale Foch.

En réponse à cette dépêche. le Préfet maritime a adressé le télégramme suivant à Mme la Maréchale à l'issue du lancement.

Le croiseur au nom glorieux flotte en rade de Brest. L'Amiral Violette, représentant ministre Marine, amiral Pirot, préfet maritime, autorités civiles et militaires, Préfet du département, président Commission Marine, Chambre des Députés, les représentants élus du département et de la ville de Brest présents au lancement, profondément touchés du télégramme par lequel vous avez bien voulu vous associer à une cérémonie doublement heureuse pour la Marine, vous remercie et vous adresse l'hommage de leur profond respect. »

A l'arsenal

 Dès une heure de l'après-midi, par un magnifique soleil, dans toutes les rues convergeant vers l'arsenal, de longues théories de citadins endimanchés se rendent vers le lieu du lancement. Une heure plus tard, plus de 10.000 personnes étaient massées sur la rive de la « Penfeld », dans les jardins haut perchés de l'arsenal, partout enfin d'où l'on pouvait apercevoir quelque chose de la cérémonie qui allait se dérouler.


Sur la cale de lancement, une tribune réservée aux officiels fut bientôt pleine à craquer, ainsi que la partie réservée aux invités, amenés tous les quarts d'heure par les canonnières partant soit du pont Gueydon, soit des deux embarcadères de Tourville. Le service d'ordre était parfaitement organisé



A 15 heures exactement, la vedette de l'amiral stoppe au bas de l'escalier de la cale. Le cortège des amiraux, des généraux et des invités va prendre la place qui lui est réservée à la tribune. Puis le vice-amiral Violette prononce l'allocution suivante


 Messieurs,

« Un bâtiment qu'on lance, c'est une force nouvelle qui surgit, c'est une personne morale et réelle, un homme de guerre, disent nos amis d'outre-mer. Il va intégrer en lui la somme des cœurs des hommes qui le monteront et l'idéal enclos dans les plis de nos couleurs. En lui vont se résumer des vertus que symbolise soir nom


< Déjà de grands capitaines ont honoré la poupe des vaisseaux de la République, Bayard, Vauban, Hoche, Marceau, Kléber et Charles Martel victorieux de l'envahisseur pour l'indépendance de la race européenne, et Jeanne d'Arc, ia libératrice du génie français, personnification de la patrie française, dressée pour sa défense. Le Foch, animé du souffle du nouveau libérateur, de celui qui fit triompher le droit et sauvegarder la justice imprègne de ses vertus le travail. la volonté, la persévérance et l'énergie tenace illuminé de son patriotisme, de sa pensée claire et humaine le  Foch, a son tour, peut aller ainsi montrer au-delà des mers la figure de la France libre, laborieuse, loyale, pacifique et fraternelle. Et si le malheur devait encore peser sur nous, menacer nos foyers et la liberté de notre vie, tu saurais. beau vaisseau, faire honneur à ton nom, être comme lui "Foch le Martel ».



« Déjà, l'an dernier, j'avais l'honneur de représenter M. Georges Leygues au lancement du Colbert et j'avais eu l'agréable mission de rendre hommage à l'activité déployée par le port de Brest. aux rapides et substantiels progrès accomplis dans la construction de nos croiseurs, si bien que le rythme de construction d'un croiseur par an est désormais chose aisée à obtenir.

« Je suis heureux d'avoir aujourd'hui à reconnaître encore de nouveaux progrès, moins importants certes, au fur et à mesure qu'on approche de la perfection, mais qui montrent que l'arsenal de Brest ne veut pas en rester à ses derniers records. Ainsi la tonne construite, qui avait exigé pour le Duquesne 42 journées, pour le Suffren 32, pour le Colbert 28, a été obtenue sur le Foch en 26 jours. la moitié exactement de ce qu'il avait fallu pour 1p Duguay-Trouin.

Ces beau résultats tiennent à de fortes traditions d'organisation, de discipline et de travail qui font honneur à l'arsenal de Brest, à l'entrain et au dévouement généreux de ces travailleurs qui réunissent en eux les solides qualités des populations de la Bretagne. au cœur droit et loyal, aux bras forts, ignorant la fatigue, amis du labeur joyeux et de l'autorité féconde. Ces beaux résultats sont également dus à l'amélioration constante des outils et des méthodes qui évitent les pertes d'efforts, à la haute technicité des cadres et surtout à la culture, à la science toujours profonde et à l'énergie persévérante des ingénieurs qui conçoivent et dirigent ces constructions.

« Au nom de M. Georges Leygues, je les félicite tous; j'adresse à tous l'expression de la satisfaction du ministre de la Marine. »

Le lancement


Mais la marée montante a atteint la hauteur voulue. Le moment psychologique approche. Sur le croiseur Maréchal-Foch, dont l'arrière resplendit au soleil, une centaine d'ouvriers attendent, penchés sur la corde servant de bastingages. 15 h 25 les accores qui soutiennent oh si peu la coque, tombent tour à tour sous les coups de masses vigoureux. Seule à l'avant la savatte retient le croiseur. Une sonnerie électrique retentit comme une volée de pierrots, les ouvriers sur le pont disparaissent, courant au poste qui est assigné à chacun d'eux.



Deuxième sonnerie électrique les cœurs battent. Le chef de la musique de la flotte fait un signe.

Troisième sonnerie la Marseillaise éclate, -l'énorme masse libérée par une flamme de chalumeau, glisse doucement, puis plus vite, et s'enfonce dans l'élément liquide dans un magnifique éclaboussement.


Pendant toute la durée de la cérémonie, des avions n'ont cessé de survoler la cale de lancement.

Sources 

L'Ouest-Eclair 25 avril 1929



16 juin 2021

Brest en ce temps là. Roparz Hémon Nenn Jani lancement du cuirassé 1911 Jean-Bart

Brest en ce temps là. Roparz Hémon  Nenn Jani lancement d'un cuirassé 


Je relis en ce moment un livre de Roparz Hemon écrit en breton et traduit en français. Sa conduite durant la seconde guerre mondiale n'ayant pas été exemplaire il sera condamné à 10 ans d'indignité nationale. N'empêche que le roman mérite d'être lu.

 L’histoire se déroule au début du XXe siècle, avant la première guerre mondiale, à Brest. C’est bien la ville de Brest qui est le personnage principal de ce roman.On a  à suivre les deux femmes courageuses que sont Nenn Jani et Malvina, ainsi que d’autres personnages, représentant toutes les couches de la société. Une découverte de Brest avant 1914. Je vous en propose un extrait : le lancement du cuirassé. Ce pourrait être le lancement du cuirassé Jean-Bart à brest en septembre 1911.


le lancement


"Cette année-là pourtant, le mardi 12 septembre, la ville toute entière se réveilla. Grand évènement : on allait mettre à l'eau le cuirassé construit à l'arsenal. La construction en avait été retardé à cause de la grève, mais à présent tout était fin prêt.


La mise à l'eau devait se passer à trois heures de l'après-midi. Les ouvriers du port avaient congé cet après-midi là. Leur coeur était rempli de fierté. Eh oui, malgré la rancoeur qu'ils éprouvaient envers le gouvernement et leurs patrons, ils étaient heureux. Ce bâtiment était leur enfant, leur création. Et ce jour-là, c'était son baptême.


Ceux qui avaient pu obtenir des billets d'entrée marchaient d'un coeur léger par le quartier de l'Harteloire, impatients d'atteindre la porte, du côté du Moulin à Poudre. Les familles des officiers de marine, sur leur trente-et-un, se mélangeaient à celles des sous-officiers et des employés du port, habillés plus modestement, mais d'une tenue soignée. Tout à l'heure, dans l'immense hangar de la cale du Point du Jour, sur l'estrade érigée des deux côtés de la gigantesque coque du navire, ils seraient séparés, les places les meilleurs revenant aux gens les plus hauts placés, comme il se doit.


Dans le quartier de Recouvrance, ma foi, les petites gensmarchaient tout aussi joyeusement. De ce côté la porte de l'Arsenal était grande ouverte et la carte d'invitation n'était pas nécessaire. Le Grand Pont était noir de monde, et tous ces hommes, femmes et enfants, accouraient du centre de la ville, de l'Octroi, de Saint-Marc, de Kérinou, de Lambézellec, pour envahir le terre-plein surplombant la rivière. De-là, ils auraient une vue imprenable sur la cale. On prétendait qu'il valait mieux se trouver là qu'en-bas, où l'on courait le risque de se faire écraser par le navire s'il venait à se renverser, ce qui ne s'était jamais produit mais qui pouvait toutefois arriver...


Le grand vaisseau se tenait tout droit comme par miracle, sa quille reposant sur la rampe. Il arborait le pavillon tricolore à la poupe, tournée vers la rivière. Quelques matelots du port allaient et venaient sur le pont, occupés à Dieu sait quoi. Malgré la foule massée des deux côtés de la rivière, on entendait pour ainsi dire aucun bruit, si ce n'est le son aigu des coups de marteau quelque part sous le hangar, que l'écho faisait résonner dans la vallée. Minute après minute, le temps s'écoulait. La coque demeurait immobile, comme si elle avait dû rester ainsi l'éternité.

Trois heures sonnèrent, et aussitôt, au son de la Marseillaise, on vit glisser l'immense navire, lentement d'abord, puis prenant de la vitesse, plonger brusquement dans l'eau en faisant déferler une grande vague dans la rivière. Aux applaudissements des spectateurs se mêlèrent des éclats de rire, car une partie des gens massés en bas sur les quais s'étaient fait éclabousser et se retiraient à la hâte.

C'était terminé, Maintenant il fallait rentrer, dans le piétinement et la cohue."




HIER, AUX ACCLAMATIONS D'UNE FOULE ENTHOUSIASTE LE JEAN-BART S'EST ÉLANCÉ DANS LA MER 

Le premier dreadnought français flotte majestueusement dans l'avant-port de Brest

BRFST, 22 septembre. (De notre correspondant particulier.) Brest s'est réveillée en fête hier matin. Un clair soleil éclairait sa rade immense, vide de navires, et tous les trains arrivaient avec de nombreux voyageurs. Beaucoup de maisons étaient pavoisées et une grande animation régnait en ville dès la première heure.


L'arrivée, de M. Delcassé

A 9 h. précises le train officiel entre en gare. D'un des compartiments réservés descend M. Delcassé qui est accompagné de l'amiral Moreau, son chef de cabinet et du lieutenant de vaisseau Bazire, son aide de camp. Le ministre est reçu par M. Chaleil, préfet du Finistère; le vice-amiral de Marolles, préfet maritime, et Ni. Delobeau, sénateur-maire, qui montent tous les trois dans le même landau. Celui ci se met en marche procédé par un peloton de gendarmes à cheval et une brigade d’Agents cyclistes. Les contre-amiraux, généraux, sénateurs et députés montent dans d'autres voitures qui suivent le landau ministériel dans cortège se termine par un taxi-auto dans lequel se trouve M. Wargnier, et un peloton de gendarmes.

Le ministre se rend directement à la préfecture maritime où il compte se reposer quelques instants avant d'aller au vin d'honneur qui lui est offert par la municipalité. Tout le long du parcours, le ministre a reçu de nombreuses marques de sympathie. Il en sera de même toute la journée et aucune note discordante ne viendra troublez la fête.


A une heure le cortège ministériel sort de la préfecture et se dirige vers la porte de Tourville. C'est à partir de ce moment que le voyage prend un caractère officiel. Les troupes font la haie tout le long du parcourt jusqu'à l’arsenal où le ministre embarque dans un canot à vapeur pour se rendre sur la cale du Jean-Bart

M. Delcassé fait tout le tour du navire en se faisant expliquer en détail la manœuvre du lancement. Les Tribunes sont déjà remplies d'une foule énorme et à son arrivée sur la cale du Jcan-Bart une imposante manifestation est faite au ministre, pondant que la musique des équipages de la flotte joue la Marseillaise...


LE LANCEMENT

Les préparatifs du lancement ont été presque terminés dans la matinée et à l'heure de l'arrivée du ministre il ne reste plus de chaque côté du cuirassé que seize acores, L'ordre de les abattre est donné 1h. 30 et les lourdes pièces de bois ne tardent pas à tomber sous les coups de masse appliqués par les ouvriers du Jean-Bart.

A 2 heures cette opération étant terminée on donne le premier coup de scie à la savate puis on procède au relèvement des tins secs et au sciage des coulisseaux. Enfin à 3 h. 15, au bout de deux minutes de sciage de la savate, sans que l'on ait eu même a faire fonctionner les trois vérins hydrauliques placés à l'avant du navire, le Jean-Bart glissait sur son ber, brisant les cent trente bosses cassantes qui se trouvaient à bâbord et a tribord, et prenait majestueusement possession de son élément 

La musique des équipages joue la Marseillaise pendant, que des applaudissements enthousiastes partaient non seulement de la tribune mais aussi do tous les coteaux dominant l'arsenal et où s'était réfugiée une foule de curieux. L'opération du lancement était dirigée par .Ni. Gilles, ingénieur principal. Sur la passerelle, d'où les ordres (H-aicn* donnés, se trouvaient également MM. Louis, directeur des constructions navales au ministère, et Lyasse, directeur du génie maritime, auteur des plans du Jean-Bart.

De l'avis de tous les spectateurs, le lancement du nouveau cuirassé de 23.000 tonnes a été merveilleux.


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