Une exécution capitale à Saint Louis
Pour les cartophiles une exceptionnelle carte postale
Saint-Louis faisait partie des quatre communes comme nous l'avons vu précédemment. L'administration française y est présente avec mairie et état-civil, mais aussi avec la justice.
Le samedi 25 février 1899, à Saint-Louis du Sénégal, l’exécution par la guillotine d’un employé de commerce de Podor, Biram-Kandé, employé de M. Albert Palmade, fait grand bruit. On en a la relation de trois sources : par le Journal Officiel de l’A.O.F., par le Journal des Pères du Saint-Esprit de Saint-Louis, et par une carte postale exceptionnelle de la maison Fortier de Dakar.
Une exécution capitale Cliché Fortier Collection JMB |
« Samedi dernier, 25 février, a eu lieu à Saint-Louis l’exécution du nommé Biram-Kandé, condamné à la peine de mort par la Cour d’assises du Sénégal dans sa dernière session.
Biram-Kandé avait, le 31 mai 1898, à Podor, tué d’un coup de feu, avec préméditation et guet-apens, le gérant d’une maison de commerce de l’escale, Albert Palmade, dont il avait été le domestique et qui, mécontent depuis longtemps de ses services, l’avait congédié quelques jours auparavant.
Arrêté immédiatement après le crime, il comparaissait le 7 octobre suivant devant la Cour d’assises et y faisait preuve, ainsi qu’il n’avait d’ailleurs pas cessé de le faire au cours de l’instruction, du cynisme le plus révoltant.
Condamné à mort, il comptait que sa peine serait commuée comme l’avaient été, depuis longtemps, les peines capitales prononcées par la Cour d’assises du Sénégal et, en dernier lieu celles des assassins de Jeandet et Rabuel.
Mais l’indulgence même a des limites, et la clémence présidentielle ne devait pas s’étendre à Biram-Kandé.
"Samedi dès 6 heures 30 du matin, les bois de justice étaient dressés sur la place de la Geôle entourée par une compagnie d’infanterie de marine et par un peloton de spahis. À 6 heures 45, Messieurs de Kersaint-Gilly, Procureur de la République de Saint-Louis, Villeroy, Juge d’instruction, Minvielle, Greffier du Tribunal Civil, Moreau, Commissaire principal de police, pénétraient avec le régisseur de la prison dans la cellule du condamné qu’ils trouvaient éveillé. Monsieur le Procureur de la République lui apprenait le rejet de son pourvoi en cassation et de son recours en grâce et lui annonçait que l’heure de l’expiation avait sonné pour lui. Biram-Kandé recevait cette nouvelle avec calme, et après un court entretien avec le Révérend Père Guérin, aumônier de la prison, il était remis aux exécuteurs qui procédaient rapidement à sa dernière toilette.
À 6 heures 55 il franchissait le seuil de la prison, ayant à ses côtés le Révérend Père Guérin et, entouré d’agents de police, il marchait d’un pas ferme vers la guillotine distante de quarante mètres à peine. Quelques minutes plus tard tout était terminé, Biram-Kandé avait payé sa dette à la société !
Une foule qu’on peut évaluer à un millier de personnes assistait à l’exécution qui a produit sur la population une impression profonde. Il est permis d’espérer que ce grand exemple ne sera pas inutile et qu’il rassurera les
commerçants établis dans nos escales en inspirant une crainte salutaire aux misérables, heureusement assez rares, qui ne craignent pas de jouer avec la vie humaine pour satisfaire leurs pires instincts.»
Sources :
J.O A.O.F.
Archives nationale d'outre-mer Aix en Provence
Images et Mémoire numéro 35
Jean-Luc Le Bras