01 mai 2020

Campagne 71-72 Les iles sous le vent les Gambier décembre 1971 Noël

Campagne 71-72 Les iles sous le vent les Gambier


LA CAMPAGNE DE L'ÉCOLE D'APPLICATION

Aux Iles Sous-le-Vent







Le dimanche 19 décembre au matin, la « Jeanne d'Arc » laissant derrière elle le « Victor Schoelcher », quitte Papeete où un pâle soleil est enfin revenu. Vers 16 heures, par un temps radieux, elle entre dans le magnifique lagon de Raiateatahaa, et vient mouiller entre ces deux îles, devant la commune d'Uturoa, chef-lieu administratif des îles Sous-le-Vent.

M. Angelier, chef de la circonscription administrative des îles Sous-le-Vent, monte à bord souhaiter la bienvenue. Bientôt c'est sur le quai que toute la population d'Uturoa, groupée autour de son maire et des personnalités locales, nous réserve un accueil très chaleureux : des couronnes de fleurs nous sont passées autour du cou par de charmantes Vahinés en robe longue.


Le maire prononce en français un discours très émouvant de bien venue. Le commandant répond en soulignant que cette escale esi une première pour la « Jeanne d'Arc », qui fréquentait jusqu'alors plutôt le lagon de Bora-Bora, et qu'elle a tout lieu de s'en réjouir à juger par l'accueil qu'elle reçoit et par le programme qui l'attend. Cette cérémonie se termine avec les « Oteas » d'un groupe local. Danses caractérisées par des mouvements d'ensemble des bras et des jambes. 


Ce cérémonial, toujours aussi pittoresque, naturel et sympathique, se répétera tout au long de l'escale. Dans les districts d'Opoa et «le Tenuru ! A Raiatea, de Patio à Tahaa, à Mauiti, autre île de l'archipel, avec quelques variantes : Marseillaise chantée par les enfants des écoles, discours des Tavanas des districts, prononcés en tahitien avec traduction simultanée, réponse du commandant, « Oteas » remplacés par des « Aparimas », danses mimées et chantées en chœur.

Cette première journée prend fin avec un bal populaire sur le quai, animé alternativement par un orchestre local et l'orchestre amateur du hord.

Pendant cette escale de huit jours, les officiers-élève.» vont se consacrer à leurs travaux hydrographiques, à des séances d'entraînement à la plongée ou à des exercices de manœuvre à bord de « La Lorientaise », cependant que l'équipage va connaître une agréable détente, très ensoleillée, particulièrement appréciée après les trombes d'eau que lui a réservées Tahiti. Mais les innombrables manifestations organisées dans les districts des îles de Raiatea et de Tahaa, ainsi que les excursions dans les autres îles Sous-le-Vent ne laisseront personne inactif.
Le lundi 20 décembre, c'est le district d'Ohoa, centre historique et spirituel de la Polynésie qui nous reçoit sur les dalles mêmes du célèbre Marae Taputapuatea, haut-lieu et sanctuaire de la royauté Maorie.

Le lendemain nous assistons en nocturne, à « une marche sur le feu », effectuée par les gens du village d'Apooti qui ont seuls, conservé le secret de cette tradition en Polynésie.

Le 22 décembre, le village de Patio organise un Tamaraa gigantesque, pour près de 200 personnes, qui se délecteront de poisson cru, huîtres, langoustes, chevrettes, cochon et autres mets cuits à l'étouffée dans le « himaa », four creusé dans le sol.

Le 24 décembre, nous ne sommes pas tout à fait dans l'ambiance de Noël, les districts de Tiva, Itapuamu et Patio nous offrent ainsi qu'à une centaine d'invités du C.E.P. et de Papeete et en présence de S.E. M. Lucet, ambassadeur de France à Washington, une « pêche aux cailloux ». 


Spectacle rare et coloré, sur un lagon turquoise, avec, pour toile de fond, l'élégante silhouette de l'île de Bora Bora : une armada de pirogues où les hommes frappent l'eau d'une pierre, pousse le poisson vers un immense filet fleuri et décoré que les femmes refermeront sur lui, les personnalités ont alors le délicat honneur de harponner les plus belles prises. Cette pêche est suivie d'une réception à bord de la « Jeanne d'Arc » des chefs de pêche, accompagnés de M. Lucet et des invités extérieurs parmi lesquels M. Rivière, député du Val-de. Marne, M. Santini, directeur d'Air France, l'amiral Laure, M. Pambrun, maire de Papeete, M. Flosse maire de Pirae.




Le 26 c'est encore le district de Tehurui qui organise une pittoresque course de pirogues à laquelle prennent part plusieurs villages. Le corn. mandant offre les prix aux équipes gagnantes. Un vin d'honneur y est offert par l'amicale des anciens marins.



Au milieu de ces fêtes publiques, celle de Noël sera célébrée dans l'intimité du bord : visite des crèches où chaque poste à déployé des trésors d'imagination, veillée qui nous présente une crèche proven. çale vivante avec des santons plus vrais que nature, disant « avec l'accent » un texte de Pagnol, ponctué par les interventions de la musi. que et de la chorale du bord, messe de minuit très recueillie, puis réveillon familial puisqu'il rassemblait les différentes catégories de personnel par service.

Aux manifestations spectaculaires s'ajoutent bien d'autres rencon. tres amicales : un déjeuner en la résidence de M. Angelier, un cocktail offert par le maire d'Uturoa dans les jardins de la mairie, un déjeuner à bord réunissant ces autorités ainsi que M. Flamand, président du syndicat d'initiative et plusieurs Tavanas locaux, n'omettons pas non plus les rencontres sportives en football, basket et volley qui voient s'imposer les clubs locaux. D'autre part, chaque jour, les hélicoptères s'envolent vers les autres îles de l'archipel et, grâce à la « Saintonge » et à l'« Edic 9071 » l'équipage peut visiter Bora-Bora Etihuahine où il est chaleureusement accueilli.



En guise de remerciements, la « Jeanne d'Arc » ne peut que faire l'honneur de ses installations, qui recevront la visite de nombreux amis, d'écoliers et de la population de plusieurs districts. Un cocktail dan. sant réunissant officiers et équipage, nous permettra aussi d'accueillir à bord les habitants de l'île. Dans une excellente ambiance, cette soirée est animée par les danses d'un groupe amateur et d'un autre semiprofessionnel, qui nous permettront d'apprécier les différentes facettes de l'art chorégraphique polynésien. Mais plus encore que le nombre et la qualité des distractions qui nous sont offertes, c'est l'amitié simple, sincère, souvent touchante de ces populations insulaires dont nous garderons le souvenir le plus profond. Des liens solides se sont créés entre la « Jeanne d'Arc » et les habitants de l'archipel.



Aussi le lundi 27 après-midi avant d'appareiller pour la Nouvelle Zélande, le commandant tient-il à organiser sur le pont d'envol, en présence de tout l'équipage, une cérémonie d'adieu au cours de laquelle il remercie officiellement l'administrateur des îles Sous le Vent et les diverses personnalités de Raiatea pour toutes les marques d'amitié et les sommes d'efforts qu'ils ont déployées à notre égard, ainsi que toute la population des îles de Raiatea et de Tahaa qui nous a montré au cours de ces 8 jours d'escale la fidélité et la sincérité de son attachement à la France et à la marine.



Des cadeaux sont échangés de part et d'autre, et c'est en présence de toute la population rassemblée sur le quai que la « Jeanne d'Arc » défile lentement devant Uturoa tirant cinq coups de canon en guise d'adieu avant de franchir la passe et de mettre le cap sur Wellington.

30 avril 2020

Donec Humour dans le carré - Point sur la victoire de Narvik

Point sur la victoire de Narvik

Bonjour la compagnie,

Le 29 mai, c’est désormais une tradition, nous nous réunissons à l’ancien quartier Saint Jean d’Angély à Nice, dans le minuscule square de Narvik pour commémorer ce qui fut, dit-on, la seule victoire que nous ayons remportée en 1940. Nous nous y retrouvons en compagnie d’une solide escouade de légionnaires et de superbes chasseurs alpins toujours émus par le souvenir de cet événement qui les mit à l’honneur. Les marins sont naturellement présents car le combat ayant lieu en Norvège, il était indispensable de posséder des moyens de transport adaptés aux circonstances.




Ainsi, chaque année, en bombant le torse, je me présente à la cérémonie. Après les dépôts de gerbes, le président de l’amicale des chasseurs alpins nous conte par le menu les conditions de cet inoubliable fait d’armes.

Pourtant tous ne partagent pas la même émotion à commencer par Jean Dutourd dont l’ironie mordante est connue de tous. Cet écrivain haut en couleur, petite moustache et lunettes sur le front nous donne son ressenti des faits.

Lisons un extrait de son livre : « les taxis de la Marne ». Il y évoque au détour d’une page quelques soldats, vainqueurs de Narvik qui sont venus échouer, après la défaite de 1940 dans une caserne bretonne.

« En vérité si nous n’avions pas eu l’esprit et le cœur complètement faussés, nous les aurions haïs, ces vainqueurs en fuite, nous les aurions enveloppés dans le mépris où nous pouvions tenir nos aînés. »



« On a débaptisé récemment une place de Paris non loin du boulevard Haussmann : elle s’appelle maintenant place de Narvik. Reportons-nous par la pensée en 1880, et imaginons que le conseil municipal du temps ait pris l’initiative de nommer un endroit de Paris rue de Sarrebruck ou boulevard de Gravelotte ou avenue de Reichshoffen. Quelle indignation ! Pourtant Sarrebruck fut pris par nos troupes comme Narvik. On en fit même une image d’Epinal. Gravelotte fut une victoire française. L’ennemi y perdit dix-sept mille hommes et battit en retraite partout. A Reichshoffen enfin nous avions rencontré quelque désespoir : les braves cuirassiers du général Duchesne s’étaient fait tuer tout aussi bien que, cinquante-huit ans plus tôt les cuirassiers de Caulaincourt en Russie et pas pour rien. Mac Mahon célèbre pour sa bêtise sauvait l’armée en faisant donner cette cavalerie ; Il se montrait bien meilleur stratège que tout ce qu’a produit l’Ecole de guerre entre 1920 et 1940.

[…] De toutes les actions militaires de 1940, Narvik est peut-être celle dont le souvenir est le plus douloureux. Quoi de plus amer qu’une victoire perdue ? Le conseil municipal parisien eût-t’il un peu d’honneur ou de fermeté, il rebaptiserait sa place de Narvik : carrefour des succès inutiles. On pourrait inscrire sur la plaque comme on disait jadis, comme on le fait encore en province : « Cette place a été nommée en souvenir de la prise de Narvik qui ne servit à rien à cause de la sottise et de la lâcheté du G.Q.G. français de 1940. » Humilions-les enfin nos généraux ganaches, réincarnation des badernes dorées sur tranche d’Autriche et de Prusse que les colonels analphabètes de Napoléon mettaient dans leur poche. »

Voilà c’est dit et à bientôt pour de nouvelles aventures.

Donec

Kerguelen Xmas James Cook Port Christmas Baie de l'Oiseau TAAF

NOËL aux Kerguelen par le contre-amiral de Brossard (2s)


approche de la pointe de l'Arche et de la baie de l'Oiseau photo JM Bergougniou


Nous avions la plupart du temps de forts grains du nord-ouest... le 16 décembre, les premiers pingouins apparurent et des algues qui augmentaient à mesure que l'on avançait ». Puis, vers les 650 de longitude, « nous avions maintenant un temps à brouillard et comme nous prévoyions de tomber sur la terre à chaque heure, notre navigation devint à la fois pénible et dangereuse. »





la baie de l'Oiseau entre Mt Havergal et Cap Français  photo JM Bergougniou




Ainsi, James Cook, parti de Plymouth le 12 juillet 1776 à bord du Résolution accompagné du Discovery monté par Clerke, après une escale au Cap en novembre, décrit-il dans son journal, son approche des îles Kerguelen découvertes plus de quatre ans auparavant par le courageux navigateur breton.



Le 24 décembre enfin, alors qu'ils gouvernaient à l'est, par 48°25' sud, le voile de brouillard s'entrouvrit et le cri tomba de la grand-hune en même temps que l'état-major voyait la terre une île assez haute, courtaude, puis une autre semblable. C'étaient l'île de Croy et l'île du Roland baptisées en 1774 par Kerguelen lors de son second voyage. Le brouillard s'éclaircissant encore, l'île de Clugny parut dans le sud, ainsi que les îlots du groupe qui précède le cap François dans l'ouest.



Entrée de la baie de l'Oiseau photo JM Bergougniou

Puis le brouillard se referma et Cook prit avec raison une route de sécurité vers le nord où il tomba sur l'île de la Réunion ou du Rendez-vous.





Il observa rapidement la silhouette de ce caillou, puis, se tournant vers le jeune Bligh, master à bord du Résolution, il lorgna son chapeau cabossé et planté à la diable sur sa tête.

— Eh bien, monsieur, lui dit-il. Il me semble indiqué de baptiser cet îlot Bligh's Cap. J'espère que vous en serez fier.

Cook n'était jamais prodigue de compliments ou de plaisanteries et lorsqu'il se laissait aller à en faire, elles étaient parfois jugées un peu raides (rough). Mais le futur capitaine du Bounty n'en était pas à cela près. L'intérêt sans grande nuance que lui portait le célèbre James Cook donnait à ses mots, un tour d'affection inestimable.





Pendant ce temps, à l'avant, au poste et même autour de Cook, chacun se réjouissait d'avoir eu enfin la vue de la terre et le reste n'était, dans l'esprit des gens du Résolution, qu'affaire d'un peu de chance et de routine. Telle était la confiance qu'ils avaient en leur capitaine. La Terre était là — et ils pensaient bien qu'il trouverait un bon mouillage avant la nuit, où, selon la tradition, une franche gaieté salée ferait oublier les dangers courus la semaine précédente et les voltiges dans la mâture fouettée par des grains glacés.



Cette euphorie de la terre régnait dans les esprits malgré une mer violente qui brisait effroyablement sur toutes les côtes. Cook ne put s'empêcher d'extérioriser sa pensée

— Bligh's Cap est peut-être l'île du Rendez-vous de M. de Kerguelen, mais je ne vois aucun être pour y venir à part les oiseaux car elle est certainement inaccessible pour tout autre animal.


A 11 heures, le temps s'éclaircit et sans perdre de temps, le Résolution gouverna sur la terre, dans le sud.





Que Cook confondit le cap François avec le cap Saint-Louis, n'a qu'un intérêt particulier. Ce qui est important, en relation avec son caractère, c'est le déroulement des événements.




Dès qu'il put contempler l'extraordinaire découpage de la côte, il présuma qu'il pourrait rencontrer un bon mouillage. Son équipage ne s'était pas trompé sur ses réactions. La première baie, profonde et apparemment abritée des vents du secteur ouest, lui apparut comme un signe. Mais le vent tomba et il dut mouiller à l'entrée de la baie où le Discovery le rejoignit.

Aussitôt Bligh fut envoyé avec un canot en reconnaissance. Son rapport fut excellent.



Cependant la position actuelle était peu confortable et chacun le sentit bien. Aussi lorsque la soirée s'avança sans qu'aucun ordre ne fût donné de sortir les réserves de conserves habituellement destinées aux fêtes carillonnées, chacun se replia sur soi et, considérant la précarité du mouillage, fila prendre son quart sur le pont ou se coucher en priant qu'un grain ne vienne pas troubler cette première nuit proche de terre. La dinde en confit serait pour plus tard.

En fait, la nuit passa sans alerte et sans festivité. Le service avait été assuré comme à la mer et ce n'était que prudence.





Le 25 à l'aube, qui est très tôt en décembre sous cette latitude australe, la cloche appela les bordées. Les barres de cabestan étaient déjà en place. Il n'y eut qu'à virer. La brise était d'ouest, fort maniable et gentiment le Résolution pénétra dans l'étroite baie de l'Oiseau entre les deux impressionnants massifs noirs et vert sombre, sous le regard curieux de nombreux manchots alignés au garde-à-vous sur les corniches. L'ancre tomba à un quart de mille de la plage grise qui est au fond du couloir, par huit brasses d'eau claire.



Vers la pointe d'Anières photo JM Bergougniou

Aussitôt, Cook, la mine rougeoyante et le geste vif, ordonna qu'on mit les bateaux à la mer et sans désemparer, les hommes brassèrent les vergues pour extraire canot, chaloupe et yole du pont du milieu.

Le Discovery rejoignait son chef de division au début de l'après-midi lorsque les premières corvées poussaient du bord vers la côte ouest, la plus proche.



la baie de l'Oiseau photo JM Bergougniou

Le spectacle était fort paisible de ces deux navires aux voiles carguées, avec leurs câbles d'ancres à peine raidis, posés comme sur un plateau de glace et s'y reflétant, sans qu'aucune ride ne vînt troubler les, images, sans qu'un souffle de vent n'inclinât les pavillons. Tout semblait immobile.



pointe de l'Arche photo JM Bergougniou

Des sujets de vitrine placés dans un décor romantique au sud, une masse dressée comme un château féodal sombre sur une falaise verdâtre terminée en mer par une étrange roche percée en arc romain ; au nord, une chute verticale noire surmontée d'une colline arasée comme une table.

Des hunes et des barres où quelques gabiers avaient été envoyés travailler sur les manoeuvres, les hommes découvraient vers l'est, la succession des caps d'une côte déchiquetée.



pointe de l'Arche photo JM Bergougniou

Calme étrange de la nature...

Par contre, agitation des hommes. Trafic de bateaux corvées d'herbe pour les animaux des bords, corvées d'eau, corvées de bois — hélas le vert n'était pas de l'herbe, mais Cook fit tout de même ramasser grande quantité de bottes d'azorella. Les animaux devraient s'en contenter.

Lorsqu'on lui rendit compte qu'on ne trouvait pas de bois, il devint rouge et cria qu'il fallait mieux chercher. Et puis :



 Mt Havergal photo JM Bergougniou


— Je vois des phoques, monsieur King, dit-il sans se tourner vers son lieutenant en second, envoyez-moi une corvée pour en tuer trois ou quatre, et qu'on fonde leur lard aussitôt. Il nous faut de l'huile pour nos lampes, nos cuirs, et peut-être du lard pour brûler dans les fourneaux, allez, allez vite, monsieur...

Et le lieutenant en second James King, alla...



 Mt Havergal photo JM Bergougniou

Jusqu'à la nuit, tous ceux qui ne travaillaient pas à bord, furent à terre fort occupés ; les mieux partagés étaient ceux qui étaient chargés de pêcher.

Lorsqu'il fut évident que les poissons étaient pareillement absents dans l'eau que le bois sur la terre, l'équipe alla dans les rochers assommer quelques manchots royaux qui reçurent le coup de bâton fatal en restant tranquillement au garde-à-vous.

Le soir de Noël, tout le monde à bord ne songeait qu'à dormir. Cook, infatigable comme toujours, s'était retiré dans sa chambre pour écrire ses déceptions quant aux ressources de la terre.

Il avait débarqué avec le premier canot et aussitôt entrepris d'escalader les rochers. Il eut assez vite une vue d'ensemble de la baie mais dès ce moment un brouillard épais dévala par le couloir de l'ouest et rendit le retour à bord difficile. Cette brume nécessita de renforcer le service de nuit pour parer un changement de temps.

Le 26, pluie et brouillard. Dès l'aube,

pointe de l'Arche photo JM Bergougniou


Cook était encore sur le pont.

— Allons, monsieur Bligh, hâtez-moi l'envoi des corvées, ne voyez-vous pas que le temps ne sera pas éternellement clément ? L'eau, le tussock, la mousse (il s'agissait de l'Azorella Selago dont le vert avait trompé tout le monde à l'arrivée), les phoques et des oiseaux... Allons, vite !

La pluie gonflait les ruisseaux, les collines semblaient couvertes d'une nappe d'eau, des cascades nouvelles jaillissaient, tout ruisselait.

Ce jour-là, tout le monde fut trempé et fourbu.




Le lendemain, comme on lui rendait comp te que tous les tonneaux étaient pleins d'une eau excellente, que le parc à fourrage était bourré de - mousse » et de tussock, voyant que l'essentiel était acquis de ce que cette terre pauvre pouvait lui procurer, il dit le plus simplement du monde à Gore, son premier lieutenant

— Monsieur, nos hommes ont bien travaillé. Nous avons pris quelque liberté avec le calendrier, mais il le fallait bien, n'est-ce pas ? On n'est pas maitre du temps. Alors cette journée sera celle du repos et nous fêterons Noél, l'âme en paix, quittes de nos devoirs.

En fait, pendant les sept jours qu'il passa sur les côtes de Kerguelen, Cook bénéficia d'une extraordinaire absence de tempête, dans un pays où les dépressions passent à la cadence d'une par jour.

Ce fut ce 27 décembre qu'un matelot découvrit accrochée à un rocher sur la
rive nord de la baie, une bouteille qui fut aussitôt portée au capitaine. Il eut alors la confirmation du passage de Kerguelen en lisant l'inscription qu'elle renfermait

Ludovico XV Galliarum/Rege et D. de Boynes/Regi a Secretis ad res/ Maritimas annis 1772 et 1773.
Il écrivit au dos du document
Naves Resolution/ et Discovery/ de Rege Magnae Brittaniae/Decembris 1776.

Puis il le remit dans la bouteille avec une pièce de deux pennies, boucha au plomb et le lendemain alla lui-même la replacer sur un cairn qu'il fit édifier dans ce but.

Les deux navires restèrent au mouillage jusqu'au 29. Après quoi ils gouvernèrent au sud-est le long de la côte nord de l'ile puis ils suivirent la côte est et lorsqu'il la quitta, Cook, après avoir nommé les baies et les caps rencontrés, écrivit ceci

« Les premiers découvreurs, avec quelque raison supposèrent qu'il s'agissait d'un cap du continent austral, les Anglais ont depuis prouvé qu'un tel continent n'existe pas et que la terre en question est une île sans grande étendue, qu'en raison de sa stérilité, .. j'appellerai l'île de la Désolation (*). »


Il savait cependant que Kerguelen avait appelé sa découverte « France Australe -, Par contre, lorsqu'il baptisa « Christmas Harbour » son premier mouillage, il ignorait que Kerguelen l'avait déjà nommé la « baie de l'Oiseau », du nom de la frégate commandée par le lieutenant de vaisseau: de Rosnevet.

Quoi qu'il en soit, les états-majors et les équipages du Résolution et du Discovery se souvinrent de leur Noël décalé de l'an 1776. Jamais, écrivit un témoin, jamais avant cela, je n'avais vu la fête de Noël réduite à si peu.

(*) Journal original de James Cook, reproduit intégralement dans The Journals of Captain James Cook. edited by J.C. Beaglehole. Hakluyt Society.

Vol. III, pp. 42-43. Cambridge 1967. Toutes les citations de cet article sont tirées de cet ouvrage.


PH Jeanne d'Arc EE Victor Schoelcher Campagne 1971 - 1972 Lima Pérou

Sur les traces des Incas et des Conquistadores - Lima - Pérou



Il ne sera pas facile de vous rapporter dans le détail le tourbillon que fut cette escale du Pérou ; nous emportons le souvenir d'une atmosphère pleine de chaleur et de mystère, d'un peuple attachant et combien hospitalier, d'une civilisation à la fois proche de la nôtre par sa dominante espagnole et insolite par ses racines incas : ce fut là notre grande découverte.

Parmi les nombreuses histoires ou anecdotes auxquelles nous associons volontiers le Pérou, les aventures de Tintin occupent une place non négligeable : « Quand lama fâché, lui toujours faire comme ça ». Au cours de leur escale, les marins de la « Jeanne d'Arc * et du « Victor Schoelcher », dignes émules du capitaine Haddock aspergé par cet animal, auront eu l'occasion de mesurer tout le mépris dont sont capables les lamas. Fort heureusement, leur attitude hautaine n'a guère inspiré les autorités et la population péruviennes, qui nous ont réservé un accueil particulièrement chaleureux.

PH Jeanne d'Arc 16-02-2010 Escale à Lima


Lima la Cathédrale San Juan photo JM Bergougniou

Le 24 octobre, la « Jeanne d'Arc » et le « Victor Schoelcher » se présentent devant Callao, le grand port du Pérou. Il est à peine huit heures et une légère brume estompe quelque peu les silhouettes de la ville. Les deux bâtiments échangent les saluts d'usage avec la terre et les unités de la Marine péruvienne, mouillées à l'extérieur de la rade. Sous l'œil critique de nombreux pélicans qui stationnent sur la jetée, blanche de guano, ils viennent s'accoster au quai du port de commerce.

C'est presque aussitôt le coup d'envoi d'une activité tantôt officielle, tantôt moins protocolaire, qui ne faiblira pas tout au long de notre séjour : réception à l'ambassade de France, à l'Ecole navale péruvienne, cocktail et représentation théâtrale à bord de la « Jeanne d'Arc ", démonstration d'Alouette III, visite fleuve des bâtiments par la population. 


Les invitations faites par les familles françaises et péruviennes avec beaucoup de gentillesse atteignent un chiffre record. Pour pouvoir les honorer, il faut faire preuve d'ingéniosité ; nous ne sommes vraiment pas assez nombreux.


Du point de vue touristique, le Pérou est original à plus d'un titre. Il représente en premier lieu, le seul pays d'Amérique latine que nous visitions cette année. Occasion à ne pas négliger d'autant plus que chacun a mis à profit l'escale de Panama pour compléter sa panoplie de parfait touriste. Ensuite il ne faut pas oublier que le Pérou conserve de nombreux témoignages d'un passé culturel particulièrement riche.




Nous sommes donc partis sur les traces des Incas et des Conquistadores. Lima est à peine distante d'une quinzaine de kilomètres de Callao : un quart d'heure de palabres pour fixer le prix de la course avec le chauffeur volubile et un quart d'heure de taxi qui semble parfois bien long lorsque le chauffeur se pique de virtuosités et d'acrobaties automobiles. Les églises, le palais de l'actuel président, l'université, les nombreuses plazas », le remarquable musée de l'Or nous attendent, richesses, parmi tant d'autres, de l'ancienne capitale de la vice-royauté du Pérou. Les rues du centre, bruyantes et animées par les vendeurs ambulants, les cireurs de chaussures et le prochain tirage de la « loteria », laissent s'engouffrer, à grand renfort de coups de klaxon, les autobus pittoresques et colorés. Visitant avec méthode les divers magasins de souvenirs, la foire du Pacifique, le centre artisanal de « Pueblo Libre », tour à tour bavards ou hermétiques, les marins français affinent leur technique du marchandage et repartent toujours les bras chargés. Des excursions sont organisées dans la région, ce qui vaut à un grand nombre d'entre nous la visite du site inca de Pachacamac, avec son temple du Soleil, celui de la lune et ses dépouilles posées à même le sol,

Dans la première chapelle de la nef de droite, se trouve la crypte de Francisco Pizarro, entièrement recouverte de mosaïques retraçant la Conquête, où reposent les restes du Conquistador couché dans un imposant sarcophage. photo JM Bergougniou

Les hasards du service permettant à une cinquantaine d'entre nous de se rendre par avion à Cuzco, ancienne capitale de l'empire inca, situé dans les Andes à plus de 3.000 mètres d'altitude. La première journée est consacrée à la visite de la ville et de ses environs : de nombreux vestiges incas, une étonnante cathédrale baroque, un marché local haut en couleurs et riche en odeurs. Nous sommes vraiment chez les Indiens du Pérou et les ponchos foisonnent. Les magasins de souvenirs aussi.



Le lendemain, les excursionnistes se mettent en route vers la célèbre cité perdue du Machu Picchu. Trois heures de trajet et une petite micheline sont nécessaires pour y accéder. La voie ferrée franchit un col, serpente dans la plaine fertile, se faufile entre les maisons de terre cuite, dérange quelques vaches et s'infiltre dans la Vallée Sacrée, que dominent les ruines de la cité religieuse. Un quartier administratif, les appartements princiers, le temple du Soleil, les terrasses aménagées pour les cultures : les pierres parlent. La salle de bains de la princesse, son solarium suscitent l'intérêt de tous. Les navigateurs s'interrogent sur la précision du cadran solaire auquel, chaque soir, les prêtres incas attachaient symboliquement le soleil, de peur qu'il ne reparaisse le lendemain. Le retour s'effectue à temps pour que les privilégiés puissent encore une fois écumer le marché de Cuzco.

Evidemment, nous sommes repartis : nous repartons toujours. Notre étonnement et nos découvertes progressives ont été à la mesure de ce pays attachant et si varié. Malgré les problèmes qui se posent au Pérou et que /'on ne nous a pas cachés, il nous semble qu'il doit être agréable d'y vivre, qu'il y a tout à découvrir là-bas, tout à apprendre, jusqu'aux splendeurs des civilisations enfouies et peut-être aussi un certain humanisme hérité des siècles passés et qui semble mieux survivre au pied des Andes.

EV2 DUFOURCQ et GROSjEAN


Sources :
Gallica - BnF Cols bleus n°1213

Mission Jeanne d'Arc 2020 PHA Mistral Résilience Mayotte Réunion

Mission Jeanne d'Arc 2020 PHA Mistral  FLF Guépratte
Lancée le 25 mars 2020, l’opération « Résilience » constitue la contribution des armées à l’engagement interministériel contre la propagation du COVID-19. Avec « Résilience », les armées s’engagent dans l’ensemble des secteurs où elles peuvent apporter un soutien aux autorités civiles, en adaptant leur action aux contextes locaux et dans le cadre d’un dialogue permanent avec les autorités civiles. « Résilience » est une opération militaire inédite, dédiée au soutien des services publics et des Français dans les domaines de la santé, de la logistique et de la protection, en métropole et outre-mer, tout en prenant en compte la nécessité de poursuivre les opérations au profit de la sécurité des Français, sur le territoire national, dans les airs, sur les mers, dans l’espace cyber, comme sur les théâtres extérieurs.

TàD V SPID 10675 00100 HUB ARMEES Escale à Mahé



Suite à la décision du Président de la République de déployer les porte-hélicoptères amphibie (PHA) de la Marine nationale dans le cadre de l’opération Résilience, le groupe Jeanne d’Arc, composé du PHA Mistral et de la frégate Guépratte, alors en escale technique à Male (Maldives), a mis le cap vers le sud de l’Océan Indien dès le 26 mars 2020. Dès son arrivée au large de Mayotte le 4 avril 2020, le Mistral a déployé un sous groupement tactique embarqué (SGTE) composé de 66 militaires en renfort du Détachement de la Légion étrangère de Mayotte (DLEM), dans le cadre du soutien aux autorités locales. A l’issue du débarquement du SGTE, les deux bâtiments ont repris la mer pour rallier l’île de La Réunion, qu’ils ont atteint le vendredi 10 avril 2020 dans la matinée.
TàD V SPID 10675 13.AVR 2020 Date départ de la Réunion pour Mayotte
Mayotte Dzaoudzi Petite-Terre photo JM Bergougniou
Cette escale technique avait pour objectif le chargement de fret à destination des autorités locales mahoraises pour soutenir la lutte contre le coronavirus. Au total, ce sont près de 350 palettes constituées de plus de 200 tonnes d’eau et de denrées alimentaires, de masques et autres matériels sanitaires qui seront transportées à bord du Mistral. Durant cette manœuvre, les contacts avec l’extérieur ont été limités au strict nécessaire et toutes les mesures sanitaires ont été prises à bord comme à terre, dont le respect des gestes barrières, le respect des distances et le port des équipements de sécurité. Le porte-hélicoptères amphibie Mistral et la frégate Guépratte sont repartis dès le lundi 13 avril 2020 pour rejoindre Mayotte et livrer le fret embarqué en fin de semaine

PHA Mistral photo Marine nationale


Dans le cadre de la mission Résilience, deux opérations d’acheminement de fret à destination de Mayotte se sont déroulées le 16 avril, afin de soutenir les autorités locales mahoraises dans la lutte contre l’épidémie de COVID-19.
A l’issue d’une escale de trois jours au port de la Réunion dont l’objectif majeur était le chargement de fret, le porte-hélicoptères amphibie (PHA) Mistral, accompagné de la frégate de type La Fayette (FLF) Guépratte, a repris la mer le 13 avril pour rejoindre Mayotte le 16.
Mayotte le lagon et les 4 frères photo JM Bergougniou

PHA Mistral photo Marine nationale

Le déchargement, effectué dans le strict respect des mesures barrières, a débuté dès l’accostage du Mistral au port de Longoni, au nord de l’île. La gestion de ce déchargement a été traitée entre la Préfecture, le port et les différents prestataires chargés d’acheminer les denrées et autres matériels médicaux vers leurs destinataires respectifs. Au total, 424 palettes ont ainsi été livrées, soit 233 tonnes d’eau, de denrées alimentaires, de masques et autres matériels sanitaires ainsi qu’un tractopelle.
Mayotte photo JM Bergougniou
Le même jour, un Casa CN-235 de l’escadron de transport 50 « Réunion » stationné sur le détachement air 181 des forces armées dans la zone sud de l’océan Indien (FAZSOI) a décollé vers Mayotte pour y livrer 1,3 tonne de fret sanitaire, notamment composé de solution hydro alcoolique et de masques de protection. Il s’agissait de la seconde mission de ce type effectuée par le Casa CN-235 vers Mayotte en une semaine, la première ayant eu lieu le 7 avril dernier. Composante aérienne des FAZSOI, le DA 181 est toujours prêt à répondre aux sollicitations afin de venir en aide à la population dans le cadre de l’opération Résilience.

Mayotte la résidence photo JM Bergougniou

29 avril 2020

PHM Aviso LV Le Henaff Corymbe 151 Afrique de l'Ouest Coronavirus Covid-19

PHM Aviso LV Le Henaff Corymbe 151

Les opérations extérieures françaises (Opex) ont à pâtir de la pandémie de coronavirus.


Tout le monde à entendu parler du Charles de Gaulle et de son retour anticipé à Toulon...

Fin mars, la France a décidé de rapatrier jusqu'à nouvel ordre ses 200 militaires déployés en Irak, pays durement frappé par le Covid-19.

Le porte-hélicoptère français Mistral, qui faisait route vers l'Asie pour veiller au respect du droit maritime international dans des zones de tensions comme en mer de Chine, a changé de cap la semaine dernière pour rallier La Réunion et Mayotte afin de porter assistance aux populations de ces deux territoires français d'Outre-mer situés dans l'océan Indien, où l'épidémie de coronavirus commence à sévir. 

Pour la première fois, la Marine française a également suspendu la mission Corymbe, qui prévoit la présence permanente d'un navire au moins dans le Golfe de Guinée pour protéger les intérêts français dans la zone (80.000 ressortissants français) et contribuer à la diminution de l'insécurité maritime, a-t-on appris de source militaire.

Les militaires français de retour d'opérations extérieures bénéficiaient depuis 2009 d'un séjour en Crète (appelé «sas») pour décompresser avant leur arrivée en France, mais le coronavirus a contraint les armées à la «fermeture temporaire» de ce dispositif, a appris l'AFP.

Sources 

La Croix

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