Brest Désarmement du Patrouilleur Albatros
Les pérégrinations et mésaventures du Clemenceau conduisent notre pays à engager une réflexion générale sur la situation des navires en fin de vie. La commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale a souhaité s’intéresser à cette problématique pour les navires militaires et a créé, le 1er mars 2006, une mission d’information sur ce sujet.
"Dès le début de ses travaux, le rapporteur a constaté que le terme « démantèlement » avait pour la marine un sens bien particulier. Il désigne en effet le retrait de la tranche réacteur d’un sous-marin à propulsion nucléaire. Pour les navires de commerce ou de pêche, l’appellation la plus souvent utilisée pour la démolition de ces bateaux est celle de « déchirage ». Compte tenu de ces éléments et de l’utilisation, largement répandue dans les médias du terme de démantèlement pour désigner la déconstruction des navires, le rapporteur utilisera indifféremment les termes de démantèlement, déconstruction, démolition ou déchirage pour désigner la même opération."
PA Albatros la passerelle |
"Prétendre dresser une liste limitative et définitive de l’ensemble des produits dangereux pour la santé ou pour l’environnement susceptibles d’être présents à bord des bateaux à déconstruire relève de l’utopie. En effet, la dangerosité de certains produits est aujourd’hui clairement définie mais il ne peut être exclu que les progrès scientifiques et l’expérience ne mettent pas en évidence le caractère plus ou moins nocif de substances aujourd’hui considérées comme neutres. Par ailleurs, s’agissant de navires âgés, la succession des interventions suite à des avaries ou dans le cadre d’opérations d’entretien planifiées sans qu’une contrainte de traçabilité impose un suivi précis des produits utilisés à bord ne permet pas de garantir la localisation géographique des produits potentiellement dangereux. "
"De fait, il n’existe pas de liste unique de produits et substances dangereuses pouvant être présents dans les navires militaires. Deux listes génériques sont aujourd’hui retenues : celle de l’Organisation maritime internationale (OMI), qui a pour cible principale les navires marchands et celle de la Délégation générale pour l’armement (DGA), qui couvre l’ensemble des matériels d’armement et concerne donc non seulement les navires militaires mais aussi les aéronefs de l’armée et les chars."
"Parmi les substances dangereuses, figure l’amiante dont il convient de préciser que l’usage est totalement interdit en France depuis 1997. Dans les navires, elle est le plus souvent utilisée sous sa forme libre, dite aussi friable, pour des calorifugeages ; cet usage, qui représente un niveau de risque beaucoup plus élevé d’émission de fibres, a été interdit à la fin des années 1970, mais cette problématique reste d’actualité pour les navires anciens comme l’ex-Clemenceau ou la Jeanne d’Arc. Elle se présente également sous forme liée, c’est à dire mêlée à d’autres matériaux, son usage le plus courant étant dans des dalles en vinylamiante, notamment dans les navires, ou dans l’amiante ciment."
PA Albatros la Machine |
"Selon les informations recueillies par le rapporteur, il existe deux types de déconstruction des navires : les déconstructions verticales, qui sont réalisées par tranches à partir d’une extrémité du navire, et les déconstructions horizontales, auxquelles il est procédé pont par pont."
"Le choix de la déconstruction obéit à une logique de marché. D’une part, certains états, dont le développement repose sur leur capacité à se procurer des matières premières dont ils sont naturellement dépourvus, développent des industries de récupération et démolition pour recycler les matières issues de cette déconstruction. D’autre part, la décision de vendre un navire à une entreprise en vue de sa déconstruction dépend des taux de fret du moment et du cours des matériaux, en particulier l’acier, donc de la rentabilité de l’opération."
PA Albatros à Kerguelen PAF "Les navires militaires relèvent, quant à eux, d’une compétence étatique. Les États disposant d’une marine militaire significative et régulièrement renouvelée sont confrontés aux mêmes interrogations que la France. Le marché de l’occasion des bâtiments de guerre connaît une offre abondante depuis de nombreuses années. Plusieurs grandes marines s’efforcent de réduire l’âge moyen de leurs flottes par des cessions de navires de 15 à 20 ans d’âge à des prix avantageux au profit de celles en développement. Ainsi, la marine américaine a vendu, depuis 1996, 17 bâtiments de premier rang. Le Royaume-Uni dispose d’un organisme étatique (Disposal Sales Agency/DSA), doté du statut d’agence depuis 1994, très actif pour la vente des navires d’occasion : 87 bâtiments et 202 bâtiments auxiliaires1 ont ainsi été cédés à des pays amis depuis 1990 ; 12 navires sont en attente de cession depuis 2003 soit pour poursuivre leur navigation soit pour démantèlement. Les ventes de navires militaires néerlandais sont effectuées à 15 ou 20 ans d’âge à des marines amies : grecque, chilienne, belge et lettone ; depuis 1992, la marine néerlandaise a ainsi vendu 11 frégates. La marine espagnole démilitarise ses navires et les met en vente aux enchères sans nécessairement les dépolluer. Les bâtiments militaires norvégiens sont vendus à des prix symboliques ou donnés à d’autres pays. En Russie, 90 % des bâtiments militaires sont déconstruits dans le pays. Quant à la Roumanie, ses navires sont déconstruits en Turquie et en Inde."
"S’agissant de la marine française, les grandes orientations 2006 initialement annoncées de destination des bâtiments de surface progressivement retirés du service actif jusqu’en 2017 faisaient état de 3 bâtiments destinés à la démolition, à savoir l’ex-Clemenceau (24 000 tonnes), le porte-hélicoptères Jeanne d’Arc (10 500 tonnes) et l’ex-Colbert (8 500 tonnes), soit un tonnage global de 43 000 tonnes. Parallèlement, 38 bâtiments étaient signalés comme ayant vocation à être utilisés pour les tirs d’entraînement des équipages et les mises au point des systèmes d’armes : 3 frégates F67 (4 700 tonnes) , 2 frégates anti-aériennes (4 000 tonnes), 4 frégates F70 (3 600 tonnes), 2 frégates type Suffren (5 300 tonnes), le navire atelier Jules Verne (7 800 tonnes), 10 patrouilleurs de type P400 (370 tonnes), le bâtiment de soutien mobile — Loire (2 050 tonnes), 4 bâtiments bases de plongeurs démineurs (400 tonnes), 2 patrouilleurs rapides (120 tonnes), le bâtiment de surveillance Sterne (250 tonnes), 3 bâtiments hydrographiques (850 tonnes), le bâtiment d’expérimentation Thétis (900 tonnes), 3 bâtiments de soutien de région (400 tonnes) et le bâtiment de soutien plongée Isard (400 tonnes) ; le tonnage global de ces bâtiments qui devront subir des préparations préalables, voire être déconstruits après usage, est de 67 790 tonnes."
CP d'après aquarelle M Patrice Simon
PA Albatros carré commandant |
"A la fin de l’année 2006, la marine a réactualisé ses perspectives de démantèlement et fourni une nouvelle estimation portant à 18 le nombre de navires voués à la démolition pour les huit prochaines années. Enfin, 4 sous-marins nucléaires du type Le Redoutable1 seront progressivement démantelés, au sens initial de ce terme pour la marine2 , à partir de 2008, Le Redoutable l’étant déjà ; les 5 bâtiments ont ensuite vocation à être déconstruits sauf à être exploités comme musée. À partir de 2016, débutera le retrait du service actif des 6 sous-marins nucléaires d’attaque du type Rubis sera terminé en 2025/2026."
sources :
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