Le 28 mai 1825 la goélette L'Aventure quitte Port-Louis (Maurice aujourd'hui) pour déposer du personnel destiné à la chasse aux éléphants de mer et le matériel destiné à l'extraction de l'huile.
Le mât de L'Aventure Alfred Faure 7-11-2013 |
CP Gilles Troispoux |
l'île de l'Est photo JM Bergougniou |
l'île de l'Est photo JM Bergougniou |
Ruines de la cabane de G. M. Lesquin Alfred Faure 7-11-2013 |
CP Gilles Troispoux |
Navigant dans le mauvais temps, l'eau du bord est épuisée. Une équipe débarquée à terre ne peut regagné le bord. Le navire fait eau, l'équipage limité et malade. Le navire se brise sur les récifs et 7 hommes gagnent la terre.
l'île de l'Est photo JM Bergougniou |
L'île de l'Est Anse de l'Aventure Crozet photo Gilles Troispoux |
Chaudron de phoquier île de la Possession Crozet photo JM Bergougniou |
Ils seront récupérés le 6 janvier 1827 par le Cape-Paquet. Lesquin débarquera à Saint-Nazaire le 7 mai 1827
le morne rouge Baie américaine (BUS) île de la Possession Crozet photo JM Bergougniou |
Cet archipel désolé porte un nom qui devrait être honoré en France, mais dont on a complètement perdu le souvenir. Crozet était le compagnon habituel de ce brave Marion du Fresne, qui a tout au moins un article dans les biographies, et qui périt comme l'illustre Cook, en 1772, assassiné par les Nouveaux-Zélandais. Marion l'avait choisi à l'île de France, en 1771, pour commander en second sous lui. Quand le douloureux événement qui priva la marine française d'un de ses plus braves officiers eut jeté le deuil dans les équipages, Crozet prit le commandement de l'expédition et s'acquitta admirablement de ses fonctions nouvelles. Il avait acquis une pratique vraiment supérieure de la navigation, et comme il le dit lui-même, il avait voyagé dans toutes les parties du monde. Errant dans le dédale des îles océaniennes, la pensée philanthropique du digne marin avait cherché à parer ces îles déjà si heureuses des plus belles fleurs de nos climats; à l'île Motouaro, il avait créé, dit-il, un jardin où venaient les légumes savoureux de l'Europe, et où, plus tard, devaient mûrir quelques-uns de nos fruits. C'est peut-être à lui que la Nouvelle-Zélande est redevable de ses premières pommes de terre. Il allait semant partout, et nous faisons aujourd'hui la moisson.
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Il ne put rien semer toutefois sur l'archipel stérile qui porte son nom. Nous savons heureusement d'une façon bien précise en quel temps il découvrit ces pauvres rochers couverts de neiges éternelles. Ce fut le 23 janvier 1772, à l'époque où il commandait le MascarÍn; sa navigation nous est connue en ce temps, aussi bien que celle de M. du Clcsmeur.
Le 28 mai 1825, la goélette L’Aventure partait de Port-Louis (île de France) pour aller déposer aux îles Crozet un personnel destiné à la chasse des éléphants marins (1), et le matériel nécessaire à l'extraction de l'huile qu'on tire
(') A cette époque, les spéculations de plusieurs industriels se portaient sur ce genre de pcclie.
Il s'agit ici du miouroung, ou phoque à trompe de Péron, que ce grand voyageur a le premier de ces phoques gigantesques. L'équipage, composé de seize marins, Français, Anglais, Espagnols, Portugais et Hollandais, était aux ordres d'un Anglais, Fotheringan, qui devait rester aux îles avec neuf hommes, pendant que Lesquin ramènerait le navire avec les cinq autres. La traversée devant être de vingt-cinq ou trente jours au plus, on n'avait pris de l'eau que pour quarante jours. Mais les mauvais temps ayant ralenti considérablement la marche de la goélette, l'équipage eut bientôt à souffrir, et quand on arriva au but du voyage, la provision d'eau était presque épuisée, quoiqu'on eût depuis longtemps diminué les rations.
Pendant vingt jours, il ne fut pas possible de gagner la terre, tant la mer était grosse. Enfin, l'eau venant à manquer complètement, il fallut bien essayer de s'en procurer. Neuf hommes descendirent dans la pirogue et parvinrent à débarquer sur l'une des îles. Ils devaient rallier le navire le plus promptement possible; mais, après leur départ, le temps devint si mauvais qu'ils ne purent revenir.
Le 28 mai 1825, la goélette L’Aventure partait de Port-Louis (île de France) pour aller déposer aux îles Crozet un personnel destiné à la chasse des éléphants marins (1), et le matériel nécessaire à l'extraction de l'huile qu'on tire
(') A cette époque, les spéculations de plusieurs industriels se portaient sur ce genre de pcclie.
Il s'agit ici du miouroung, ou phoque à trompe de Péron, que ce grand voyageur a le premier de ces phoques gigantesques. L'équipage, composé de seize marins, Français, Anglais, Espagnols, Portugais et Hollandais, était aux ordres d'un Anglais, Fotheringan, qui devait rester aux îles avec neuf hommes, pendant que Lesquin ramènerait le navire avec les cinq autres. La traversée devant être de vingt-cinq ou trente jours au plus, on n'avait pris de l'eau que pour quarante jours. Mais les mauvais temps ayant ralenti considérablement la marche de la goélette, l'équipage eut bientôt à souffrir, et quand on arriva au but du voyage, la provision d'eau était presque épuisée, quoiqu'on eût depuis longtemps diminué les rations.
Pendant vingt jours, il ne fut pas possible de gagner la terre, tant la mer était grosse. Enfin, l'eau venant à manquer complètement, il fallut bien essayer de s'en procurer. Neuf hommes descendirent dans la pirogue et parvinrent à débarquer sur l'une des îles. Ils devaient rallier le navire le plus promptement possible; mais, après leur départ, le temps devint si mauvais qu'ils ne purent revenir.
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Sur la goélette, cependant, il ne restait que trois hommes valides; les autres étaient malades, et la pirogue avait emporté les plus robustes et les plus agiles. Bientôt la tempête fatigua tellement le navire qu'une voie d'eau se déclara; vers minuit, un des câbles se rompit, et à- deux heures du matin la chaîne-câble, dernier espoir des naufragés, se brisa aussi. Un coup de vent emporta la seconde pirogue. Dans cette extrémité, sans autre ancre qu'une ancre à jet, sans canot, avec un équipage malade, brisé de fatigue et insuffisant pour la manœuvre, ils se décidèrent à se diriger vers les îles orientales; ils voulaient y remplir leurs barriques vides, en construisant un radeau pour aller à terre. Ils approchèrent de l'île du Roi-Charles, mais ne purent y débarquer ; ils mouillèrent enfin en face de l'île Chabrol, après avoir ainsi erré pendant trois jours, et commencèrent aussitôt la construction qu'ils avaient appelé l'éléphant marin; c'est le Phoca leonina Linn., Phoca coxii Desm. Cet animal atteint jusqu'à 8 ou 10 mètres de longueur, sur une circonférence de 4111,872 à 5m,847. On peut se figurer aisément l'aspect formidable de ce beau phoque. Son pelage est ras et d'un gris bleuâtre, parfois d'un brun tirant sur le noir; mais il est fort grossier, et l'on comprend aisément les difficultés que nos naufragés rencontrèrent lorsqu'ils durent faire usage de sa peau rugueuse à la place des peaux tannées. La trompe du miouroung est un prolongement du nez de l'animal : elle n'a pas moins d'un pied; elle est membraneuse et érectile, et l'on suppose qu'elle sert au phoque à préserver son nez des coups, qui lui donneraient facilement la mort. Un seul coup de lance porté au cœur suffit pour le tuer. Les miouroungs, que l'on considère comme tout à fait inoffensifs, forment parfois des troupeaux de cent cinquante à deux cents individus. Nous supposons que l'espèce que l'on rencontra sur les îles Crozet était le Mirounga Ansonii, qui est, dit-on, un peu moins grande que la précédente et dont le pelage -est d'un fauve clair. Lesson a donné une foule de détails intéressants sur ce phoque dans sa continuation de Buffoa, projetée. Le lendemain, Fotheringan, quoique malade, s'embarqua sur le radeau avec quatre hommes, dont deux aussi étaient très-faibles; mais, après trois heures de tentatives infructueuses, ils furent obligés de revenir à bord.
Le vent s'étant élevé, ils s'efforcèrent de s'éloigner de la côte pour éviter les brisants qui la bordent, mais ils ne purent y réussir. Ils laissèrent tomber leur ancre à jet, tout fut inutile : la mer les entraîna violemment sur les récifs, le navire s'entr'ouvrit, et les sept hommes qui s'y trouvaient encore furent trop heureux de gagner tous la terre. Ces sept hommes étaient Fotheringan, Lesquin, Pierre Aline, maître d'équipage, Louis Joseph, Atolphe Fortier, Jouan Salvador et Christian Metzelaar.
Le vent s'étant élevé, ils s'efforcèrent de s'éloigner de la côte pour éviter les brisants qui la bordent, mais ils ne purent y réussir. Ils laissèrent tomber leur ancre à jet, tout fut inutile : la mer les entraîna violemment sur les récifs, le navire s'entr'ouvrit, et les sept hommes qui s'y trouvaient encore furent trop heureux de gagner tous la terre. Ces sept hommes étaient Fotheringan, Lesquin, Pierre Aline, maître d'équipage, Louis Joseph, Atolphe Fortier, Jouan Salvador et Christian Metzelaar.
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Cependant, pour avoir échappé à la mer, ces malheureux ne se trouvaient pas moins dans la position la plus critique. Ils étaient dans une affreuse solitude; partout une neige épaisse couvrait la terre, où n'apparaissait nulle trace de végétation. Ils n'avaient pu rien sauver dans leur désastre, et, sur cette île dénuée de bois, ils ne savaient même pas comment ils pourraient se préserver du froid. Lesquin avait eu la précaution de se munir de deux pierres à fusil et d'une corne d'amorce contenant environ un quart de livre de poudre.
Cette poudre avait été mouillée, mais il en restait assez pour allumer du feu.
La mer venait de jeter un aviron à la côte : ils s'en servirent pour assommer un des éléphants marins qui couvraient le rivage. Ils le dépecèrent avec le secours de trois couteaux qu'ils avaient gardés sur eux, et prirent la graisse pour faire du feu, car cette graisse était le seul combustible qui fût à leur disposition. A l'aide de la poudre et d'un morceau de velours de coton que Lesquin déchira du collet de sa veste, ils obtinrent une flamme assez vive, et parvinrent à se réchauffer.
Ils retournèrent ensuite au rivage, où la mer avait jeté des débris du navire.
Ils purent y recueillir quelques vergues et le grand mât de hune avec leur gréement et leurs voiles, quatre barriques vides, un sac contenant environ cinquante livres de biscuit, et le fond d'un coffre de charpentier dans lequel il y avait une scie, une hache de tonnelier, une grosse vrille et un marteau.
Après avoir transporté ces objets en lieu sûr, et les avoir garantis de la neige en les recouvrant d'une voile, ils dressèrent une tente au milieu de laquelle ils entretinrent avec de la graisse d'éléphant marin le feu qu'ils avaient allumé.
Ils songèrent ensuite à manger; le biscuit, quoique mouillé par l'eau de mer, fit les frais de ce repas. Ils essayèrent d'y ajouter quelques tranches rôties de la chair de l'éléphant mariii,. mais ils trouvèrent ces grillades tellement mauvaises qu'ils durent y renoncer, La nuit venue, ils essayèrent de dormir, pendant que l'un d'eux veillait alternativement à l'entretien du feu; mais il leur fut impossible de goûter le moindre repos sous cette tente où pénétrait la neige, préoccupés comme ils l'étaient du sort qui leur était réservé sur cette terre inhospitalière où ils se trouvaient dénués de tout, et à la veille peut-être de succomber à la faim et au froid. Ils ne purent même reposer de toute la nuit : un tourbillon de vent emporta la toile qui les couvrait, et ils furent obligés, pour ne pas geler, de se lever, et de se tenir constamment en mouvement jusqu'au jour.Le matin, ils trouvèrent encore sur le rivage quelques paquets de douvelles de barriques : quant aux voiles que le vent leur avait enlevées, ils n'en retrouvèrent qu'une, l'autre ayant été sans doute remportée par la mer. Puis ils assommèrent un éléphant pour entretenir leur feu, et déjeunèrent avec leur biscuit.
Divisés ensuite en deux bandes, ils explorèrent les environs, pour y chercher des provisions et un abri. Après avoir parcouru la vallée que fermaient de toutes parts de hautes montagnes, la troupe de Fotheringan rapporta douze jeunes albatros. De son côté, Lesqu.in et ses compagnons découvrirent, près du lieu du naufrage, une caverne entaillée dans le roc qui pouvait contenir cinq ou six personnes. Ils y établirent leur feu, et mangèrent les albatros.
Pendant le reste du jour, ils mirent en sûreté tout le bois que la mer jeta au rivage et qui provenait des débris du navire.
Cette poudre avait été mouillée, mais il en restait assez pour allumer du feu.
La mer venait de jeter un aviron à la côte : ils s'en servirent pour assommer un des éléphants marins qui couvraient le rivage. Ils le dépecèrent avec le secours de trois couteaux qu'ils avaient gardés sur eux, et prirent la graisse pour faire du feu, car cette graisse était le seul combustible qui fût à leur disposition. A l'aide de la poudre et d'un morceau de velours de coton que Lesquin déchira du collet de sa veste, ils obtinrent une flamme assez vive, et parvinrent à se réchauffer.
Ils retournèrent ensuite au rivage, où la mer avait jeté des débris du navire.
Ils purent y recueillir quelques vergues et le grand mât de hune avec leur gréement et leurs voiles, quatre barriques vides, un sac contenant environ cinquante livres de biscuit, et le fond d'un coffre de charpentier dans lequel il y avait une scie, une hache de tonnelier, une grosse vrille et un marteau.
Après avoir transporté ces objets en lieu sûr, et les avoir garantis de la neige en les recouvrant d'une voile, ils dressèrent une tente au milieu de laquelle ils entretinrent avec de la graisse d'éléphant marin le feu qu'ils avaient allumé.
Ils songèrent ensuite à manger; le biscuit, quoique mouillé par l'eau de mer, fit les frais de ce repas. Ils essayèrent d'y ajouter quelques tranches rôties de la chair de l'éléphant mariii,. mais ils trouvèrent ces grillades tellement mauvaises qu'ils durent y renoncer, La nuit venue, ils essayèrent de dormir, pendant que l'un d'eux veillait alternativement à l'entretien du feu; mais il leur fut impossible de goûter le moindre repos sous cette tente où pénétrait la neige, préoccupés comme ils l'étaient du sort qui leur était réservé sur cette terre inhospitalière où ils se trouvaient dénués de tout, et à la veille peut-être de succomber à la faim et au froid. Ils ne purent même reposer de toute la nuit : un tourbillon de vent emporta la toile qui les couvrait, et ils furent obligés, pour ne pas geler, de se lever, et de se tenir constamment en mouvement jusqu'au jour.Le matin, ils trouvèrent encore sur le rivage quelques paquets de douvelles de barriques : quant aux voiles que le vent leur avait enlevées, ils n'en retrouvèrent qu'une, l'autre ayant été sans doute remportée par la mer. Puis ils assommèrent un éléphant pour entretenir leur feu, et déjeunèrent avec leur biscuit.
Divisés ensuite en deux bandes, ils explorèrent les environs, pour y chercher des provisions et un abri. Après avoir parcouru la vallée que fermaient de toutes parts de hautes montagnes, la troupe de Fotheringan rapporta douze jeunes albatros. De son côté, Lesqu.in et ses compagnons découvrirent, près du lieu du naufrage, une caverne entaillée dans le roc qui pouvait contenir cinq ou six personnes. Ils y établirent leur feu, et mangèrent les albatros.
Pendant le reste du jour, ils mirent en sûreté tout le bois que la mer jeta au rivage et qui provenait des débris du navire.
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Le lendemain, ils se mirent à l'œuvre pour bâtir une maison et fabriquer quelques ustensiles de cuisine avec ce qu'ils avaient pu recueillir du doublage métallique de la goélette. Ils échouèrent dans ce dernier travail, à cause du grand nombre de trous percés dans le cuivre pour le passage des clous, mais ils parvinrent à réunir une certaine quantité de pierres dans le but d'édifier leur maison, et ils terminèrent le lendemain ce trayail préliminaire. Ils eurent, le matin de ce jour, une bonne fortune inespérée : le rouf dressé sur le pont avait été jeté à la côte; ils le recueillirent. Outre les planches qu'ils en iirèrent, ils trouvèrent dans une caisse une douzaine de couteaux, des fusils, une lance, une marmite cassée qui cependant leur fut fort utile, un outil de tonnelage, un matelas appartenant à Lesquin, et qui fut réservé par lui pour les malades. Le soir, ils tuèrent un animal qui différait de l'éléphant marin et qu'ils ne connaissaient pas : ils voulurent en manger, mais ils trouvèrent sa chair détestable et quelques-uns d'entre eux se crurent même empoisonnés.
On était au 1er août, et quatre jours seulement s'étaient écoulés depuis le naufrage. Cependant des symptômes graves d'insubordination se montraient déjà chez les naufrages, malgré le dévouement avec lequel Folhcringan et Lesquin prenaient leur part des fatigues communes : le partage des objets
On était au 1er août, et quatre jours seulement s'étaient écoulés depuis le naufrage. Cependant des symptômes graves d'insubordination se montraient déjà chez les naufrages, malgré le dévouement avec lequel Folhcringan et Lesquin prenaient leur part des fatigues communes : le partage des objets
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ils furent obligés, pour ne pas geler, de se lever, et de se tenir constamment en mouvement jusqu'au jour.
trouvés dans le rouf amena même une discussion fort vive qui ne liuit que devant l'attitude énergique des deux chefs.
Le 2 août, l'abondance de la neige ne leur permit pas de travailler à la maison. Ils trouvèrent sur la plage un instrument nautique qu'ils emportèrent, et une légère somme d'argent à laquelle ils ne touchèrent pas, tant ils étaient persuadés que l'île devait être leur tombeau. A leur retour, ils tuèrent trois éléphants, et, comme ils n'avaient plus que trois galettes de biscuit, ils se décidèrent à essayer de cette chair que l'habitude leur fit bientôt trouver supportable.
Les deux jours suivants, ils travaillèrent à leur maison, autant que la neige le leur permit. Le 5, ils s'éveillèrent emprisonnés par cette neige, qu'ils mirent plus de deux heures à déblayer. Elle tombait si abondamment qu'ils furent obligés d'employer deux hommes à ttmr de rôle pour débarrasser l'entrée de la caverne, à mesure qu'elle se trouvait encombrée.
Le 6 et le 7, le froid les retint enfermés : ils s'occupèrent à convertir en fil fin propre à coudre les fils de caret obtenus d'un cordage qu'ils avaient sauvé. Ils destinaient ce fil à réparer leurs vêtements, mais ils ne savaient comment ils pourraient suppléer aux aiguilles qui leur manquaient.
Le 8, la mer jeta encore au rivage une partie considérable du navire qui leur fournit de fort belles planches pour la couverture de leur maison. Ils trouvèrent également trois livres de navigation, un exemplaire anglais des Nuits d'Young, appartenant à Lesquin, une boîte de compas, deux lances à éléphant, et un sac contenant environ dix livres de haricots rouges gonflés par l'eau salée. Leurs provisions étaient épuisées : ils mangèrent une partie de ces haricots, et gardèrent le reste pour le semer au printemps. Ils continuèrent ensuite, malgré le froid, à construire leur maison. Pendant ce temps, Lesquin, avec un matelot, alla à la recherche des phoques : il n'en trouva aucun; mais s'étant éloigné plus que les autres fois, il arriva à un endroit où une centaine de pingouins avaient fait leurs nids. Il rapporta cent trente-huit œufs qui leur furent d'un grand secours, car les provisions touchaient à leur fin.
Cette marmite cassée, dont nous avons parlé tout à l'heure, cet humbletesson, si on l'aime mieux, que le pauvre habitant de la Bretagne n'eftt pas hésité, peut-être, à jeter hors de sa chaumière, joua dès lors un grand rôle dans la vie intérieure des naufragés; l'industrieux Lesquin s'en servit avec succès pour conduire à bonne fin plusieurs préparations culinaires qui variaient un peu la chère détestable que l'on faisait sur l'île Crozet. Le moins estimé de ces mets cuits à la graisse des miouroungs n'était certes pas un plat d'œufs au miroir, dont les nids de pingouins faisaient les frais. Il faut avoir passé par les extrémités où se trouvaient nos pauvres marins pour se figurer la joie innocente que produisait chez eux la réussite de ces plats délicats qu'ils variaient par des étuvées, Le 9, ils terminèrent les murs de la maison et tuèrent un éléphant mâle extrêmement gros. Le 10, retenus chez eux par le mauvais temps, ils continuèrent à effiler leur cordage. Le 11, ils tuèrent deux pingouins royaux qu'ils essayèrent vainement de manger, mais dans la structure desquels ils trouvèrent une ressource inattendue. En les dépouillant, ils cassèrent une des nageoires de ces oiseaux si bizarres et remarquèrent qu'elle était formée de plusieurs os très-minces et longs. Ils en aiguisèrent un, et y pratiquèrent un chas à l'aide d'un clou rougi : ils possédaient désormais des aiguilles.
trouvés dans le rouf amena même une discussion fort vive qui ne liuit que devant l'attitude énergique des deux chefs.
Le 2 août, l'abondance de la neige ne leur permit pas de travailler à la maison. Ils trouvèrent sur la plage un instrument nautique qu'ils emportèrent, et une légère somme d'argent à laquelle ils ne touchèrent pas, tant ils étaient persuadés que l'île devait être leur tombeau. A leur retour, ils tuèrent trois éléphants, et, comme ils n'avaient plus que trois galettes de biscuit, ils se décidèrent à essayer de cette chair que l'habitude leur fit bientôt trouver supportable.
Les deux jours suivants, ils travaillèrent à leur maison, autant que la neige le leur permit. Le 5, ils s'éveillèrent emprisonnés par cette neige, qu'ils mirent plus de deux heures à déblayer. Elle tombait si abondamment qu'ils furent obligés d'employer deux hommes à ttmr de rôle pour débarrasser l'entrée de la caverne, à mesure qu'elle se trouvait encombrée.
Le 6 et le 7, le froid les retint enfermés : ils s'occupèrent à convertir en fil fin propre à coudre les fils de caret obtenus d'un cordage qu'ils avaient sauvé. Ils destinaient ce fil à réparer leurs vêtements, mais ils ne savaient comment ils pourraient suppléer aux aiguilles qui leur manquaient.
Le 8, la mer jeta encore au rivage une partie considérable du navire qui leur fournit de fort belles planches pour la couverture de leur maison. Ils trouvèrent également trois livres de navigation, un exemplaire anglais des Nuits d'Young, appartenant à Lesquin, une boîte de compas, deux lances à éléphant, et un sac contenant environ dix livres de haricots rouges gonflés par l'eau salée. Leurs provisions étaient épuisées : ils mangèrent une partie de ces haricots, et gardèrent le reste pour le semer au printemps. Ils continuèrent ensuite, malgré le froid, à construire leur maison. Pendant ce temps, Lesquin, avec un matelot, alla à la recherche des phoques : il n'en trouva aucun; mais s'étant éloigné plus que les autres fois, il arriva à un endroit où une centaine de pingouins avaient fait leurs nids. Il rapporta cent trente-huit œufs qui leur furent d'un grand secours, car les provisions touchaient à leur fin.
Cette marmite cassée, dont nous avons parlé tout à l'heure, cet humbletesson, si on l'aime mieux, que le pauvre habitant de la Bretagne n'eftt pas hésité, peut-être, à jeter hors de sa chaumière, joua dès lors un grand rôle dans la vie intérieure des naufragés; l'industrieux Lesquin s'en servit avec succès pour conduire à bonne fin plusieurs préparations culinaires qui variaient un peu la chère détestable que l'on faisait sur l'île Crozet. Le moins estimé de ces mets cuits à la graisse des miouroungs n'était certes pas un plat d'œufs au miroir, dont les nids de pingouins faisaient les frais. Il faut avoir passé par les extrémités où se trouvaient nos pauvres marins pour se figurer la joie innocente que produisait chez eux la réussite de ces plats délicats qu'ils variaient par des étuvées, Le 9, ils terminèrent les murs de la maison et tuèrent un éléphant mâle extrêmement gros. Le 10, retenus chez eux par le mauvais temps, ils continuèrent à effiler leur cordage. Le 11, ils tuèrent deux pingouins royaux qu'ils essayèrent vainement de manger, mais dans la structure desquels ils trouvèrent une ressource inattendue. En les dépouillant, ils cassèrent une des nageoires de ces oiseaux si bizarres et remarquèrent qu'elle était formée de plusieurs os très-minces et longs. Ils en aiguisèrent un, et y pratiquèrent un chas à l'aide d'un clou rougi : ils possédaient désormais des aiguilles.
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Le lendemain, ils tuèrent deux éléphants dont ils employèrent les peaux, étendues sur des planches, pour dresser un toit ; leur habitation étant terminée, ils s'y installèrent le jour suivant. Le soir de ce même jour, Lesquin, étant allé à la découverte, crut apercevoir un passage dans les montagnes qui entouraient la vallée, et il en conclut l'existence d'une seconde vallée qu'il pouvait être utile de visiter. Il communiqua sa pensée à Fotheringan, qui consentit à
l'accompagner.
Le 14, au point du jour, tous deux se mirent en route, munis chacun d'un bâton et d'un sac de toile qui contenait leurs vivres. Après deux heures de marche, ils pénétrèrent dans la gorge de la montagne. Ils arrivèrent péniblement, à travers la neige et la glace, jusqu'à un sommet où ils crurent pouvoir se préparer à descendre le revers opposé que leur dérobait une brume épaisse.
Ils se laissèrent donc glisser sur cette pente rapide et périlleuse. Dans la nouvelle vallée où ils se trouvaient était réunie une innombrable quantité de pingouins. En parcourant le rivage, ils aperçurent une grotte, et reconnurent qu'on y avait fait du feu ; un peu plus loin gisaient quelques vieilles planches qui paraissaient avoir fait partie d'un canot. Outre les pingouins, ils virent encore un grand nombre d'albatros et de nelleys, espèce de corbeau. Ils tuèrent douze albatros, et en emportèrent chacun six, avec une forte provision d'œufs.
Malheureusement la nuit les surprit, et ils s'égarèrent sans pouvoir effectuer leur retour. Après avoir erré longtemps dans la montagne, ils atteignirent un glacier sur la pente duquel ils se laissèrent glisser, comme ils l'avaient fait le matin sur le versant opposé. Mais la pente était beaucoup plus rapidè qu'ils ne l'avaient cru, et elle ne s'abaissait pas jusqu'à la vallée. Au bout de quelques instants, ils perdirent prise à un endroit perpendiculaire, et tombèrent d'une hauteur de plus de cinquante pieds. Ils auraient infailliblement été tués sur le coup si leur chute n'eût été amortie par l'épaisse couche de neige qui couvrait la terre. Fotheringan, tombé debout, en fut quitte pour une forte douleur dans les cuisses, dont il se ressentit pendant plus d'un Ils perdirent prise à un endroit perpendiculaire, et tombèrent d'une hauleiu de plus de cinquante pieds an. Lesquin eut le côté meurtri cruellement et le pouce gauche démis. Ce malheur les rendit plus prudents. Malgré les souffrances qu'ils éprouvaient, et quoique la neige tombât abondamment, ils résolurent d'attendre le jour en cet endroit, et ils passèrent le reste de la nuit marchant et se donnant du mouvement, pour combattre le froid.
Ils atteignirent enfin leur demeure vers midi. Leurs compagnons perdaient déjà l'espoir de les revoir, et ils étaient d'ailleurs fort abattus, car les provisions étaient presque épuisées, et ils avaient vainement essayé de tuer des éléphants. Aussi furent-ils forcés de ménager beaucoup le peu de viande de eet animal qui leur restait.
l'accompagner.
Le 14, au point du jour, tous deux se mirent en route, munis chacun d'un bâton et d'un sac de toile qui contenait leurs vivres. Après deux heures de marche, ils pénétrèrent dans la gorge de la montagne. Ils arrivèrent péniblement, à travers la neige et la glace, jusqu'à un sommet où ils crurent pouvoir se préparer à descendre le revers opposé que leur dérobait une brume épaisse.
Ils se laissèrent donc glisser sur cette pente rapide et périlleuse. Dans la nouvelle vallée où ils se trouvaient était réunie une innombrable quantité de pingouins. En parcourant le rivage, ils aperçurent une grotte, et reconnurent qu'on y avait fait du feu ; un peu plus loin gisaient quelques vieilles planches qui paraissaient avoir fait partie d'un canot. Outre les pingouins, ils virent encore un grand nombre d'albatros et de nelleys, espèce de corbeau. Ils tuèrent douze albatros, et en emportèrent chacun six, avec une forte provision d'œufs.
Malheureusement la nuit les surprit, et ils s'égarèrent sans pouvoir effectuer leur retour. Après avoir erré longtemps dans la montagne, ils atteignirent un glacier sur la pente duquel ils se laissèrent glisser, comme ils l'avaient fait le matin sur le versant opposé. Mais la pente était beaucoup plus rapidè qu'ils ne l'avaient cru, et elle ne s'abaissait pas jusqu'à la vallée. Au bout de quelques instants, ils perdirent prise à un endroit perpendiculaire, et tombèrent d'une hauteur de plus de cinquante pieds. Ils auraient infailliblement été tués sur le coup si leur chute n'eût été amortie par l'épaisse couche de neige qui couvrait la terre. Fotheringan, tombé debout, en fut quitte pour une forte douleur dans les cuisses, dont il se ressentit pendant plus d'un Ils perdirent prise à un endroit perpendiculaire, et tombèrent d'une hauleiu de plus de cinquante pieds an. Lesquin eut le côté meurtri cruellement et le pouce gauche démis. Ce malheur les rendit plus prudents. Malgré les souffrances qu'ils éprouvaient, et quoique la neige tombât abondamment, ils résolurent d'attendre le jour en cet endroit, et ils passèrent le reste de la nuit marchant et se donnant du mouvement, pour combattre le froid.
Ils atteignirent enfin leur demeure vers midi. Leurs compagnons perdaient déjà l'espoir de les revoir, et ils étaient d'ailleurs fort abattus, car les provisions étaient presque épuisées, et ils avaient vainement essayé de tuer des éléphants. Aussi furent-ils forcés de ménager beaucoup le peu de viande de eet animal qui leur restait.
Implantation de cabanes de phoquiers Baie américaine (BUS) île de la Possession Crozet photo JM Bergougniou |
Le lendemain 16, n'ayant pu se procurer ni éléphant, ni pingouins, ils mangèrent le reste du morceau de viande qu'on tenait en réserve ; mais cela fut loin de suffire pour apaiser leur faim. La graisse leur manquant également pour entretenir leur feu, ils furent forcés de brûler le bois qu'ils avaient sauvé du naufrage.
Le 17, quoique le mauvais temps continuât, ils essayèrent encore de se procurer des vivres, car ils n'avaient rien mangé depuis la veille au matin ; mais ils ne trouvèrent rien, et ils passèrent cette journée et la nuit suivante dans un découragement d'autant plus grand que la tourmente augmentait de minute en minute, et qu'ils se voyaient condamnés presque inévitablement à mourir de faim. Le jour venu, Lesquin eut assez de force pour aller chercher au magasin un peu de bois afin d'entretenir le feu; mais les autres ne purent sortir, car ils étaient de plus en plus affaiblis. Le lendemain, Lesquin sortit encore avec Fotheringan, mais sans succès; le moment fatal semblait venu, car les provisions manquaient depuis quatre jours, et deux des matelots paraissaient déjà parvenus au dernier degré de l'épuisement. Vers midi, Lesquin prit une résolution désespérée : il fit considérer à ses compagnons qu'ils ne pouvaient éviter la mort s'ils cédaient au découragement, et que la seule ressource qui leur restât était d'essayer un voyage dans la vallée située de l'autre côté de la montagne, et qu'ils appelaient la vallée de l'Abondance. Il s'offrit à y aller lui-même si on voulait l'accompagner : Fotheringan et deux hommes consentirent à le suivre. Comme ils n'avaient pas de chaussures, ils coupèrent une des peaux de phoque qui couvraient leur maison, et en lacèrent les morceaux autour de leurs pieds.
Vers six heures du soir, ils arrivèrent au but de leur voyage. Ils eurent le bonheur d'y trouyer quelques éléphants qu'ils tuèrent, et avec la chair desquels ils firent un premier repas. Ils allumèrent ensuite un grand feu autour duquel ils passèrent la nuit, Au point du jour, chargés de morceaux d'élé- phant et de chair d'albatros, ils revinrent à la vallée du naufrage. Mais, en traversant la montagne, un d'eux, le Hollandais Metzelaar, dégoûté de tant de misère et brisé par la fatigue et les souffrances, se laissa tomber sur la neige et refusa d'aller plus loin. Ils essayèrent de le porter, mais ils furent forcés d'y renoncer, tant ils étaient faibles. Désespérant alors de le sauver, ils prirent sa charge de provisions, lui firent leurs derniers adieux et l'abandonnèrent.
Le 17, quoique le mauvais temps continuât, ils essayèrent encore de se procurer des vivres, car ils n'avaient rien mangé depuis la veille au matin ; mais ils ne trouvèrent rien, et ils passèrent cette journée et la nuit suivante dans un découragement d'autant plus grand que la tourmente augmentait de minute en minute, et qu'ils se voyaient condamnés presque inévitablement à mourir de faim. Le jour venu, Lesquin eut assez de force pour aller chercher au magasin un peu de bois afin d'entretenir le feu; mais les autres ne purent sortir, car ils étaient de plus en plus affaiblis. Le lendemain, Lesquin sortit encore avec Fotheringan, mais sans succès; le moment fatal semblait venu, car les provisions manquaient depuis quatre jours, et deux des matelots paraissaient déjà parvenus au dernier degré de l'épuisement. Vers midi, Lesquin prit une résolution désespérée : il fit considérer à ses compagnons qu'ils ne pouvaient éviter la mort s'ils cédaient au découragement, et que la seule ressource qui leur restât était d'essayer un voyage dans la vallée située de l'autre côté de la montagne, et qu'ils appelaient la vallée de l'Abondance. Il s'offrit à y aller lui-même si on voulait l'accompagner : Fotheringan et deux hommes consentirent à le suivre. Comme ils n'avaient pas de chaussures, ils coupèrent une des peaux de phoque qui couvraient leur maison, et en lacèrent les morceaux autour de leurs pieds.
Vers six heures du soir, ils arrivèrent au but de leur voyage. Ils eurent le bonheur d'y trouyer quelques éléphants qu'ils tuèrent, et avec la chair desquels ils firent un premier repas. Ils allumèrent ensuite un grand feu autour duquel ils passèrent la nuit, Au point du jour, chargés de morceaux d'élé- phant et de chair d'albatros, ils revinrent à la vallée du naufrage. Mais, en traversant la montagne, un d'eux, le Hollandais Metzelaar, dégoûté de tant de misère et brisé par la fatigue et les souffrances, se laissa tomber sur la neige et refusa d'aller plus loin. Ils essayèrent de le porter, mais ils furent forcés d'y renoncer, tant ils étaient faibles. Désespérant alors de le sauver, ils prirent sa charge de provisions, lui firent leurs derniers adieux et l'abandonnèrent.
Implantation de cabanes de phoquiers Baie américaine (BUS) île de la Possession Crozet photo JM Bergougniou |
- Ils n'arrivèrent que vers cinq heures du soir à la maison, où leurs trois compagnons, abattus par le froid et la faim, ne purent ni se lever à leur approche, ni répondre même à leurs questions. A l'aide d'un peu de poudre, ils allumèrent du feu et firent cuire de la chair d'éléphant; mais les trois malheureux étaient si faibles qu'ils refusèrent toute nourriture et qu'il fallut les faire manger comme des enfants. Brisés comme ils l'étaient par la fatigue et les privations, ils ne tardèrent pas à s'endormir ; mais, vers minuit, des cris lamentables les réveillèrent en sursaut : ils sortirent, et à quelque distance de là ils trouvèrent Metzelaar enfoui sous un énorme tas de neige dans laquelle il s'enfonçait de plus en plus, malgré tous les efforts qu'il faisait pour se dégager. Il leur raconta qu'après leur départ il s'était endormi dans la montagne, mais que, réveillé bientôt par une vive douleur aux jambes, il avait essayé de marcher pour échapper à ce genre de souffrance et y avait réussi; qu'après une marche pénible, il était arrivé jusqu'à l'endroit où ils l'avaient trouvé, mais que là il aurait infailliblement péri si 011 ne l'eût secouru : la neige était profonde, et il ne pouvait en sortir. Ils l'emportèrent, le mirent sur l'unique matelas qu'ils possédassent, et la nuit se passa tranquillement. - Le lendemain, ils tuèrent deux éléphants. Ils recueillirent la graisse pour entretenir leur feu, et étendirent les peaux sur la cabane pour s'en faire des chaussures au besoin. Il fallait éviter la faim à l'avenir : ils trempèrent les chairs dans l'eau de mer, et les suspendirent à la fumée dans leur maison, afin de les conserver. Du reste, cette précaution fut inutile, car, pendant les mois d'août et de septembre, les éléphants et les pingouins leur fournirent des aliments en abondance. Ils achevèrent de clore leur maison, et, leur santé se rétablissant, ils reprirent courage et mirent une certaine organisation dans leur genre de vie. Chacun d'eux faisait la cuisine pendant une semaine et était, à ce moment, exempt de toute corvée. Deux hommes étaient chargés de transporter chaque jour à la maison une quantité de. graisse suffisante pour l'entretien du feu; deux autres se relevaient la nuit, veillaient à ce qu'il ne s'éteignit pas. Ceux qui restaient à la maison réparaient les effets et préparaient du fil de caret pour coudre. Les corvées générales entraînaient avec elles les voyages au lieu de la ponte des pingouins, l'attaque des éléphants mâles et les réparations de la maison. Le service ainsi disposé, l'exil parut moins intolérable aux naufragés, et ils commencèrent à s'habituer à leur affreuse position.
Du reste, ils étaient heureux de pouvoir se chauffer dans une habitation bien close, car le froid fut très-vif en septembre et en octobre. Durant ce dernier mois, ils durent renoncer à parcourir la grève, tant était considérable le nombre des éléphants de mer. Lesquin les évalue à plus de vingt mille. Ils allèrent à la vallée de l'Abondance et en rapportèrent une provision de jeunes albatros.
Du reste, ils étaient heureux de pouvoir se chauffer dans une habitation bien close, car le froid fut très-vif en septembre et en octobre. Durant ce dernier mois, ils durent renoncer à parcourir la grève, tant était considérable le nombre des éléphants de mer. Lesquin les évalue à plus de vingt mille. Ils allèrent à la vallée de l'Abondance et en rapportèrent une provision de jeunes albatros.
Implantation de cabanes de phoquiers Baie américaine (BUS) île de la Possession Crozet photo JM Bergougniou |
Vers les premiers jours de novembre, ayant parcouru la côte nord-ouest de l'île, ils y trouvèrent une quantité prodigieuse de pingouins (Lesquin dit un peu arbitrairement plus de trois millions) ; ils leur enlevèrent sept à huit mille œufs. La neige étant presque entièrement fondue, ils virent que le sol se composait de petites pierres, parmi lesquelles s'élevaient quelques tertres couverts d'une mousse entourant une sorte de plante dont l'espèce leur était inconnue. Cette plante, à laquelle ils goûtèrent, leur parut excessivement amère; néanmoins ils s'en servirent en guise de légumes dans les ragoûts qu'ils faisaient avec la chair _de miouroung.
Pendant la dernière portion de novembre, les œufs de pingouins leur fournirent des provisions assurées. Vers la fin du mois, comme la neige avait presque entièrement-disparu, Lesquin et Fotheringan résolurent d'explorer les parties de l'île qu'ils ne connaissaient pas encore. Ils s'habillèrent donc le plus chaudement qu'il leur fut possible, se chargèrent de provisions, de poudre et de fil de caret pour allumer du feu, s'armèrent de leurs couteaux de chasse et d'un bâton, et se mirent en route le 29 novembre. Leur excursion dura trois jours, mais elle n'eut d'autre résultat que la découverte d'une région de l'île où se trouvaient des loups marins. Ils se promirent d'en profiter, la peau de cet animal étant plus souple que celle de l'éléphant, et plus propre à faire des vêtements (1).
A leur retour, ils trouvèrent les choses dans le plus grand désordre : leurs hommes s'étaient battus, et l'un d'eux, Metzelaar, était resté comme assommé et avait de plus reçu un coup de couteau du Portugais Salvador. Le massacre des Anglais par les Hollandais à Amboine, pendant le siècle précédent, avait été la cause de la querelle. On avait reproché ce massacre à Metzelaar, qui
(1) Il s'agit ici de VOtaria Peronîi et Nigra, Desm. (loup marin de Pagès). Il a seulement de deux à quatre pieds de longueur (Om,650 à 1l1,299). Sa couleur est noirâtre, son pelage est doux.
avait répondu par des invectives contre les Anglais et les Français. Là-dessus, on en était venu aux coups, et Salvador avait poussé la rage jusqu'à frapper le Hollandais avec son couteau, au moment où il était tombé.
Fotheringan et Lesquin déclarèrent aussitôt à leurs compagnons qu'ils allaient se séparer d'eux : en huit jours ils se construisirent une maison longue de huit pieds et large de six, et ils s'y installèrent avec Metzelaar, qui commençait à marcher. Ils partagèrent la marmite cassée en deux morceaux à peu près égaux, mais ces deux tessons devinrent parfaitement inutiles. Tout ce mois, ils vécurent bien, et ramassèrent environ vingt mille œufs de pingouins, dont ils conservèrent une partie pour l'avenir. Les gens de l'autre maison les imitèrent, mais ils ne se parlaient plus et évitaient même de se voir.
Implantation de cabanes de phoquiers Baie américaine (BUS) île de la Possession Crozet photo JM Bergougniou |
Le 11 décembre fut un jour mémorable pour les naufragés, car Lesquin fit une découverte importante. En se promenant, il trouva une caverne dont le sol était recouvert d'une terre bleue très-sèche et très-fine dans laquelle il reconnut d'excellente argile. Il essaya aussitôt d'employer cette terre à fabriquer des pots : les premiers, qu'il fit sécher au soleil, se fendirent. Comme Robinson, il en fabriqua d'autres, les laissa sécher à l'ombre, et les plaça ensuite au milieu d'un feu ardent où il les laissa cuire pendant six heures. Un seul ne se fendit pas ; mais ce résultat suffisait, car dès lors les naufragés
pouvaient faire bouillir leurs aliments, et ils espéraient bien se procurer d'autres pots de la même manière.
Malgré la mésintelligence qui séparait en deux camps la petite colonie, Lesquin fit part de cette bonne fortune aux gens de l'autre maison, et leur indiqua le gisement d'argile ainsi que le procédé de la fabrication des pots.
Ses compagnons le remercièrent de cette démarche, mais lui déclarèrent qu'ils n'en profiteraient pas parce que, décidés à tout risquer pour sortir de ce triste lieu, ils avaient construit un canot afin de gagner l'île du Roi-Charles. Ils lui montrèrent ce canot, qui était formé de douvelles de barriques attachées ensemble avec du fil de caret, et recouvert d'une peau d'éléphant. Lesquin leur représenta tous les dangers de ce voyage, mais il les quitta sans avoir pu les persuader.
Le 17 décembre au matin, les quatre hommes partirent par un temps clair et un assez bon vent. Mais bientôt le temps devint mauvais et il s'éleva une véritable tempête. Le lendemain, la mer étant toujours très-grosse, Lesquin, Fotheringan et Metzelaar ne doutèrent plus de la perte de leurs imprudents compagnons, et voulurent au moins profiter de ce qu'ils avaient abandonné.
Ils se rendirent donc à l'autre maison, et emportèrent tout ce qui pouvait leur
être utile, particulièrement la porte, qui, étant faite de planches, était bien préférable au morceau de peau de phoque qui leur avait jusque-là servi de clôture. Comme les femelles d'éléphants venaient alors souvent à terre, et que., dans les nuits précédentes, plusieurs de ces étranges visiteuses étaient entrées jusque dans la maison, ils barricadèrent leur porte à l'intérieur. Cette précaution les sauva d'un danger qu'ils étaient loin de prévoir.
Vers le milieu de la nuit, ils furent réveillés en sursaut par des coups violents frappés à la porte et par un tumulte de voix menaçantes qu'ils reconnurent pour être celles de leurs compagnons partis la veille au matin. Ne comprenant rien à une pareille agression, ils se hâtèrent de sortir par le derrière de la maison en fendant la peau d'éléphant qui tenait lieu de mur. A peine sont-ils dehors que la porte cède et que les assaillants se précipitent à l'intérieur, cherchant avec surprise les habitants. Désappointés de ne pas les trouver, ils brisent les marmites, et s'en retournent avec la porte et un paquet de peaux d'éléphant.
Le jour venu, Lesquin et ses deux compagnons constatèrent le dégât qui leur avait été causé, et résolurent d'aller demander des explications aux agresseurs. La guerre était déclarée et venait s'ajouter à toutes les misères des naufragés. Comme il fallait se tenir sur ses gardes après la scène de la nuit,.
pouvaient faire bouillir leurs aliments, et ils espéraient bien se procurer d'autres pots de la même manière.
Malgré la mésintelligence qui séparait en deux camps la petite colonie, Lesquin fit part de cette bonne fortune aux gens de l'autre maison, et leur indiqua le gisement d'argile ainsi que le procédé de la fabrication des pots.
Ses compagnons le remercièrent de cette démarche, mais lui déclarèrent qu'ils n'en profiteraient pas parce que, décidés à tout risquer pour sortir de ce triste lieu, ils avaient construit un canot afin de gagner l'île du Roi-Charles. Ils lui montrèrent ce canot, qui était formé de douvelles de barriques attachées ensemble avec du fil de caret, et recouvert d'une peau d'éléphant. Lesquin leur représenta tous les dangers de ce voyage, mais il les quitta sans avoir pu les persuader.
Le 17 décembre au matin, les quatre hommes partirent par un temps clair et un assez bon vent. Mais bientôt le temps devint mauvais et il s'éleva une véritable tempête. Le lendemain, la mer étant toujours très-grosse, Lesquin, Fotheringan et Metzelaar ne doutèrent plus de la perte de leurs imprudents compagnons, et voulurent au moins profiter de ce qu'ils avaient abandonné.
Ils se rendirent donc à l'autre maison, et emportèrent tout ce qui pouvait leur
être utile, particulièrement la porte, qui, étant faite de planches, était bien préférable au morceau de peau de phoque qui leur avait jusque-là servi de clôture. Comme les femelles d'éléphants venaient alors souvent à terre, et que., dans les nuits précédentes, plusieurs de ces étranges visiteuses étaient entrées jusque dans la maison, ils barricadèrent leur porte à l'intérieur. Cette précaution les sauva d'un danger qu'ils étaient loin de prévoir.
Vers le milieu de la nuit, ils furent réveillés en sursaut par des coups violents frappés à la porte et par un tumulte de voix menaçantes qu'ils reconnurent pour être celles de leurs compagnons partis la veille au matin. Ne comprenant rien à une pareille agression, ils se hâtèrent de sortir par le derrière de la maison en fendant la peau d'éléphant qui tenait lieu de mur. A peine sont-ils dehors que la porte cède et que les assaillants se précipitent à l'intérieur, cherchant avec surprise les habitants. Désappointés de ne pas les trouver, ils brisent les marmites, et s'en retournent avec la porte et un paquet de peaux d'éléphant.
Le jour venu, Lesquin et ses deux compagnons constatèrent le dégât qui leur avait été causé, et résolurent d'aller demander des explications aux agresseurs. La guerre était déclarée et venait s'ajouter à toutes les misères des naufragés. Comme il fallait se tenir sur ses gardes après la scène de la nuit,.
Eléphant de mer Baie américaine (BUS) île de la Possession Crozet photo JM Bergougniou |
Lesquin s'arma de son couteau de chasse et d'une lance à éléphant ; Fotheringan prit aussi son couteau, et un bâton au bout duquel était fixé un gros clou.
Metzelaar se chargea d'un sac de pierres et d'une énorme massue. Dans cet équipage, ils se mirent en route, et allèrent frapper à la porte de l'habitation ennemie.
Le maître d'équipage se présenta devant les assaillants et leur demanda avec arrogance ce qu'ils voulaient. Lesquin lui pointa aussitôt la lance au cœur, et lui déclara qu'il allait le tuer s'il-ne lui rendait ses peaux d'éléphant. Les autres accoururent pour secourir leur camarade ; mais en voyant l'attitude menaçante de Lesquin, ils jetèrent sur-le-champ les peaux dehors.
Reculant alors de quelques pas, Lesquin les somma de s'expliquer sur leur conduite durant la nuit précédente. L'Espagnol sortit seul et leur dit qu'après avoir échoué dans le voyage qu'ils se proposaient de faire et couru mille dangers, ils étaient parvenus à regagner leur maison vers onze heures du soir, et qu'en voyant la porte enlevée ainsi que d'autres objets, ils avaient résolu de prendre tout ce qui était dans l'autre habitation, par forme de représaille.
Lesquin lui répondit qu'ils n'avaient enlevé la porte que parce qu'ils n'espéraient plus les revoir, qu'une agression si violente était de tout point inexcusable, et que, s'ils recommençaient, ils pouvaient compter sur une guerre dont la fin n'aurait d'autre issue que leur mort à tous. Lesquin retourna ensuite chez lui avec ses deux compagnons, et employa le reste du mois de décembre à fabriquer huit pots pour remplacer ceux qu'on lui avait cassés.
Eléphant de mer Baie américaine (BUS) île de la Possession Crozet photo JM Bergougniou |
Les naufragés des deux maisons consacrèrent tout le mois de janvier de l'année 1826 à la chasse des loups marins. Lesquin, aidé de Fotheringan et de Metzelaar, ramassa près de deux cents peaux : ils en employèrent une partie à se faire des vêtements et des lits assez confortables.
Lesquin lui pointa aussitôt la lance au cœur.
Avec février commença l'hiver : ce mois fut employé à couvrir l'habitation avec des peaux de phoque et à ramasser des tourbes pour entretenir le feu pendant la mauvaise saison.
Dans les premiers jours de mars, Louis-Josepli vint un matin inviter Lesquin et Fotheringan à constater la mort naturelle d'Adolphe Fortier, l'un des hommes de l'autre maison. Ils reconnurent qu'il avait dû mourir d'épuisement. Lesquin creusa une fosse avec un marteau, car la terre était encore gelée; les autres cousirent le corps dans des peaux de loup marin, et à midi ils procédèrent à l'inhumation. Depuis deux mois, toute relation était mter- rompue entre les habitants des deux maisons, et, quoique réunis à la cérémonie funèbre, ils évitèrent de se parler. Cependant, au moment où ils retournaient chacun chez eux, Metzelaar témoigna à Lesquin et à Fotheringan le désir d'aller vivre avec ses camarades. Il emporta ce qui lui appartenait, et les deux chefs restèrent seuls.
Tout alla assez bien jusqu'au mois de juin; mais, à cette époque, les provisions ayant considérablement diminué, ils furent souvent forcés, malgré le mauvais temps, d'aller en chercher à la vallée de l'Abondance. Un beau jour, tout changea d'aspect; ils avaient passé une nuit détestable et ils se reposaient de leurs fatigues, quand ils furent éveillés tout à coup par une masse d'eau qui, tombant sur la couverture de la maison, la défonça, renversa deux murs et couvrit tout d'une couche de gQëmon. Ils s'élancèrent dehors, et aussitôt une seconde vague emporta tout ce qui restait de la maison.
L'inondation qui venait de les mettre dans un si grand danger provenait d'un très-fort ras de marée. Le matin, il ne leur resta d'autres ressources que de recueillir le peu d'objets que la mer leur rejetait, et ils durent songer à se construire une demeure dans un endroit plus éloigné de la mer : ils se mirent à l'œuvre immédiatement. Cependant leurs compagnons, qui n'avaient pas eu à souffrir du ras de marée, vinrent les trouver, et les engagèrent vivement à retourner vivre avec eux, leur promettant respect et déférence : Lesquin et Fotheringan cédèrent à leurs vives instances, et, depuis ce moment, en effet, ils n'eurent plus à se plaindre d'eux.
Lesquin lui pointa aussitôt la lance au cœur.
Avec février commença l'hiver : ce mois fut employé à couvrir l'habitation avec des peaux de phoque et à ramasser des tourbes pour entretenir le feu pendant la mauvaise saison.
Dans les premiers jours de mars, Louis-Josepli vint un matin inviter Lesquin et Fotheringan à constater la mort naturelle d'Adolphe Fortier, l'un des hommes de l'autre maison. Ils reconnurent qu'il avait dû mourir d'épuisement. Lesquin creusa une fosse avec un marteau, car la terre était encore gelée; les autres cousirent le corps dans des peaux de loup marin, et à midi ils procédèrent à l'inhumation. Depuis deux mois, toute relation était mter- rompue entre les habitants des deux maisons, et, quoique réunis à la cérémonie funèbre, ils évitèrent de se parler. Cependant, au moment où ils retournaient chacun chez eux, Metzelaar témoigna à Lesquin et à Fotheringan le désir d'aller vivre avec ses camarades. Il emporta ce qui lui appartenait, et les deux chefs restèrent seuls.
Tout alla assez bien jusqu'au mois de juin; mais, à cette époque, les provisions ayant considérablement diminué, ils furent souvent forcés, malgré le mauvais temps, d'aller en chercher à la vallée de l'Abondance. Un beau jour, tout changea d'aspect; ils avaient passé une nuit détestable et ils se reposaient de leurs fatigues, quand ils furent éveillés tout à coup par une masse d'eau qui, tombant sur la couverture de la maison, la défonça, renversa deux murs et couvrit tout d'une couche de gQëmon. Ils s'élancèrent dehors, et aussitôt une seconde vague emporta tout ce qui restait de la maison.
L'inondation qui venait de les mettre dans un si grand danger provenait d'un très-fort ras de marée. Le matin, il ne leur resta d'autres ressources que de recueillir le peu d'objets que la mer leur rejetait, et ils durent songer à se construire une demeure dans un endroit plus éloigné de la mer : ils se mirent à l'œuvre immédiatement. Cependant leurs compagnons, qui n'avaient pas eu à souffrir du ras de marée, vinrent les trouver, et les engagèrent vivement à retourner vivre avec eux, leur promettant respect et déférence : Lesquin et Fotheringan cédèrent à leurs vives instances, et, depuis ce moment, en effet, ils n'eurent plus à se plaindre d'eux.
Eléphant de mer Baie américaine (BUS) île de la Possession Crozet photo JM Bergougniou |
L'hiver se passa sans autre incident, et avec le mois de septembre les éléphants marins et les albatros reparurent en grand nombre. La présence de ces derniers inspira à Lesquin un projet qu'il exécuta aussitôt. Réfléchissant que les jeunes albatros, en quittant leur nid, se dirigent vers le nord et se rendent souvent dans des parages fréquentés par des navires, il écrivit cent billets qu'il cousit chacun dans un sac de peau, et il attacha ces sacs au cou de jeunes albatros. Par ce billet, il indiquait en peu de mots la situation de l'île où il se trouvait avec ses compagnons, et priait ceux qui trouveraient ce renseignement de venir à leur secours.
Lesquin conçut aussi le dessein de construire un canot : Fotheringan et Louis-Joseph partagèrent son projet; les trois autres leur promirent aide et activité pour construire l'embarcation, mais ils déclarèrent qu'ils ne partiraient pas avec eux, car l'entreprise leur semblait trop périlleuse. Avec des débris de leur navire, des douvelles de barriques et des peaux de loup marin, ils parvinrent, en quelque temps, à se procurer une embarcation bien pontéo et mâtée, ayant seize pieds de quille et six de bau. Pour la voile, ils avaient cousu ensemble des peaux de jeunes éléphants assouplies par le frottement. 1 De plus, ils avaient approvisionne la barque d'une barrique d'eau douce, d'une autre barrique pleine de chair d'éléphant et d'une quantité d'oeufs de * pingouins. J Il ne leur restait plus qu'à revêtir le canot de peaux de loup marin, et ils | étaient décidés à se mettre ensuite en route, quand, le 21 décembre, vers onze heures du matin, Fotheringan, qui était dehors, poussa tout à coup un grand cri et rentra en faisant mille contorsions; il était tellement ému qu'il ne pouvait parler. Lesquin sortit aussitôt, et ne fut guère moins vivement touché en voyant, à peine à trois lieues en mer, un navire qui se dirigeait vers l'île.
Il appela aussitôt ses compagnons, et ils allumèrent un grand feu sur une colline. Le lendemain, le navire aavait disparu! Qu'on juge de leur désespoir.
Pendant les quinze jours qui suivirent, ils aperçurent trois fois encore ce bâtiment; ils allumèrent toujours des feux, mais le navire ne les vit pas.
Dans la nuit du 5 janvier 1827, ils aperçurent très-près de terre un feu qu'ils pensèrent provenir des fourneaux du bâtiment, occupé sans doute à faire de l'huile. De leur côté, ils allumèrent aussitôt un grand feu, qu'ils entretinrent tout le jour.;. Ils n'obtinrent encore aucun résultat.
Lesquin conçut aussi le dessein de construire un canot : Fotheringan et Louis-Joseph partagèrent son projet; les trois autres leur promirent aide et activité pour construire l'embarcation, mais ils déclarèrent qu'ils ne partiraient pas avec eux, car l'entreprise leur semblait trop périlleuse. Avec des débris de leur navire, des douvelles de barriques et des peaux de loup marin, ils parvinrent, en quelque temps, à se procurer une embarcation bien pontéo et mâtée, ayant seize pieds de quille et six de bau. Pour la voile, ils avaient cousu ensemble des peaux de jeunes éléphants assouplies par le frottement. 1 De plus, ils avaient approvisionne la barque d'une barrique d'eau douce, d'une autre barrique pleine de chair d'éléphant et d'une quantité d'oeufs de * pingouins. J Il ne leur restait plus qu'à revêtir le canot de peaux de loup marin, et ils | étaient décidés à se mettre ensuite en route, quand, le 21 décembre, vers onze heures du matin, Fotheringan, qui était dehors, poussa tout à coup un grand cri et rentra en faisant mille contorsions; il était tellement ému qu'il ne pouvait parler. Lesquin sortit aussitôt, et ne fut guère moins vivement touché en voyant, à peine à trois lieues en mer, un navire qui se dirigeait vers l'île.
Il appela aussitôt ses compagnons, et ils allumèrent un grand feu sur une colline. Le lendemain, le navire aavait disparu! Qu'on juge de leur désespoir.
Pendant les quinze jours qui suivirent, ils aperçurent trois fois encore ce bâtiment; ils allumèrent toujours des feux, mais le navire ne les vit pas.
Dans la nuit du 5 janvier 1827, ils aperçurent très-près de terre un feu qu'ils pensèrent provenir des fourneaux du bâtiment, occupé sans doute à faire de l'huile. De leur côté, ils allumèrent aussitôt un grand feu, qu'ils entretinrent tout le jour.;. Ils n'obtinrent encore aucun résultat.
Eléphant de mer Baie américaine (BUS) île de la Possession Crozet photo JM Bergougniou |
Enfin, le 6, vers quatre heures du soir, le navire se rapprocha, et une embarcation vint à terre. Les matelots furent bien étonnés en apercevant des naufragés où ils avaient cru devoir rencontrer des miouroungs et des pingouins : ils leur dirent que la navire en vue était le Cape-Packet de Londres, qu'ils étaient venus jusque-là en poursuivant des baleines, et qu'ils n'avaient aperçu leurs feux que la nuit précédente. Du reste, ils se déclarèrent tout disposés à recueillir les malheureux dans lesquels ils voyaient des frères.
A huit heures du soir, nos solitaires, arrivaient à bord du Cape-Packet.
Le capitaine Duncan les reçut avec toute l'humanité possible, et le 3 février, ayant terminé son chargement, il fit route pour l'île Dauphine, afin d'y chercher les neuf hommes qui, depuis plus de dix-sept mois, y étaient abandonnés. Ils furent assez heureux-pour les retrouver tous, et ils les prirent à bord.
Le Cape-Packet fit voile ensuite pour le cap de Bonne-Espérance, où il arriva le 5 mars. Lesquin s'y embarqua sur le navire français le Fils-de-France, allant de Chine en France, et le 7 mai, descendant à Saint-Nazaire, il revoyait sa patrie, dont il avait pu se croire séparé pour toujours.
fVey. le Lycée armoricain, publié à Nantes. Cet article est extrait du récit original de Lesquin lui-même.)
Sources :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k65319294/f245.image.r=lesquin.langFR
http://crozetvv.free.fr/histoire_naufrages2.php
http://ilescrozet.blogspot.fr/2012/02/ile-de-lest.html
A huit heures du soir, nos solitaires, arrivaient à bord du Cape-Packet.
Le capitaine Duncan les reçut avec toute l'humanité possible, et le 3 février, ayant terminé son chargement, il fit route pour l'île Dauphine, afin d'y chercher les neuf hommes qui, depuis plus de dix-sept mois, y étaient abandonnés. Ils furent assez heureux-pour les retrouver tous, et ils les prirent à bord.
Le Cape-Packet fit voile ensuite pour le cap de Bonne-Espérance, où il arriva le 5 mars. Lesquin s'y embarqua sur le navire français le Fils-de-France, allant de Chine en France, et le 7 mai, descendant à Saint-Nazaire, il revoyait sa patrie, dont il avait pu se croire séparé pour toujours.
fVey. le Lycée armoricain, publié à Nantes. Cet article est extrait du récit original de Lesquin lui-même.)
Sources :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k65319294/f245.image.r=lesquin.langFR
http://crozetvv.free.fr/histoire_naufrages2.php
http://ilescrozet.blogspot.fr/2012/02/ile-de-lest.html