Les fusiliers marins avancent prudemment, précédés par un sapeur qui semble chercher une montre ou un peu de monnaie en balayant le sable avec un détecteur de métaux. Puis les hommes au visage peinturluré en noir se tapissent sur le talus, face à l’hôtel et au Fort Neuf, lui aussi squatté par les Quiberonnais. Deux hydroglisseurs de Sa Majesté vrombissent, se hissent sur la plage, libèrent une vingtaine de militaires britanniques et repartent par la mer. Les hommes progressent entre les commandos, les photographes de l’armée et les «VIP» (élus, généraux et amiraux regroupés sous une tente rayée blanche et verte). Puis arrivent des blindés, toujours depuis la baie. Un engin de débarquement amphibie rapide vomit trois véhicules de transport et de combat, tandis qu’un antique chaland de transport dépose un non moins vieux char. Les bateaux font demi-tour, les hommes avancent sur la terre. Fin de la démonstration amphibie. Mines satisfaites des gradés français et britanniques.



«Il n’y a pas deux pays au monde dont les intérêts partout dans le monde sont plus proches», se félicite le chef d’état-major de la Marine, Christophe Prazuck, monté à bord du Tonnerre avec la délégation. Son homologue britannique, le «First Sea Lord» Philip Jones, vante les «capacités incroyablement similaires» des «deux plus grandes marines d’Europe». La dernière opération commune est récente : Hamilton, le 14 avril, pour bombarder depuis le ciel et la mer des installations chimiques du régime syrien. Londres et Paris sont les seuls Etats européens à envoyer des bâtiments militaires en mer de Chine méridionale, pour tenter de dissuader Pékin d’y étendre sa souveraineté.

Les deux haut gradés ne font pas que s’autocongratuler sur leurs exploits passés ou présents, ils ont chacun un petit mot pour l’avenir. «Ce qu’on a vu aujourd’hui est le genre de chose que nous devons continuer à faire ensemble», dit Jones. «Ces engagements qui procèdent d’une proximité ancrée dans l’histoire, dans la géographie, dans des valeurs communes, sont durables. Demain nous approfondirons encore cette coopération», répond Prazuck. Parce qu’il s’est tout de même passé quelque chose ces dernières années, un certain Brexit qui écarte la Grande-Bretagne d’une nébuleuse Europe de la défense.


FAA Jean Bart en escale à Lorient à l'issue de Catamaran photo P. Le Pestipon

De fait, la relation militaire franco-britannique est cimentée par des accords bilatéraux. Le premier, dit de Lancaster House, remonte à 2010, et ces engagements ont été approfondis au début de l’année à Sandhurst. L’exercice du jour s’inscrit dans ce cadre. Il vise plus précisément à créer une force expéditionnaire conjointe, placée à la disposition des autorités politiques. Un «instrument supplémentaire»qui peut être engagé par les deux Etats, ou pour des missions sous l’égide de l’Union européenne, de l’Otan ou des Nations unies. Les résultats du jour, comme des précédents, sont encourageants, estiment les deux armées.


Repas.

Londres gardera un lien militaire avec les puissances continentales avec son adhésion à «l’initiative européenne d’intervention (IEI)»,imaginée à l’automne par Macron et qui sera formellement lancée fin juin. Ce mécanisme, encore flou, sera indépendant de l’UE, et consistera en «un canal qui relie directement les états-majors de l’IEI», pour accomplir «des travaux de planification conjoints sur des scénarios jugés probables de crises potentielles pouvant menacer la sécurité européenne [catastrophe naturelle, intervention dans une crise comme en Centrafrique, évacuation de ressortissants… ndlr]», selon l’entourage de la ministre des Armées, cité par l’AFP.

A bord du Tonnerre, tout le monde s’est mélangé. Des militaires de l’armée de terre et de la marine, des Français et des Britanniques. Deux Anglais, assis derrière un petit bureau de la salle densément peuplée, contribuent à la partie renseignement de l’exercice. Sur le Lyme Bay,des Français ont embarqué sous l’Union Jack. Un changement radical ? Les horaires des repas ne sont pas les mêmes, relève sobrement l’un d’eux. Evoquant aussi des problèmes pour comprendre ou se faire comprendre en anglais, la langue de travail

Sources :

http://www.liberation.fr/france/2018/06/08/a-quiberon-anglais-et-francais-font-pioupiou-dans-l-eau_1657771